Qui était le commandant du régiment le 28 septembre 2009 ? Dadis et Toumba divisés, Marcel joue à l’arbitre

Le procès du massacre du 28 septembre 2009 se poursuit ce lundi, 15 avril 2024, devant le tribunal criminel de Dixinn (délocalisé à la cour d’appel de Conakry). Et, c’est Moussa Dadis Camara, Aboubacar Diakité alias ‘’Toumba’’ et Marcel Guilavogui qui sont à la barre pour la phase des confrontations. Ils doivent, pour l’instant, répondre à une seule question qui leur a été posée par le président Ibrahima Sory 2 Tounkara. Et cette épineuse question qui focalise l’attention depuis le début de ce procès est : qui était le commandant du régiment lors du massacre du 28 septembre 2009 ? Une question qui divise déjà les trois accusés, a constaté Guineematin.com à travers un de ses reporters.

« Au cours des débats, vous trois qui êtes à la barre avez tous évoqué la question du commandant du régiment. Donc, le tribunal revient sur cette question précise pour savoir à ce moment-là (le 28 septembre 2009) qui était effectivement le commandant du régiment », a dit le juge Ibrahima Sory 2 Tounkara avant de donner la parole au capitaine Moussa Dadis Camara.

En 2009, le capitaine Moussa Dadis Camara était le président de la Transition et président du CNDD, la junte militaire qui avait pris le pouvoir en décembre 2008 après le décès du président Lansana Conté. Et, il a souvent été présenté par certains de ses coaccusés (particulièrement le commandant Aboubacar Diakité) comme étant celui qui endossait les responsabilités de commandant de régiment lors des douloureux évènements du 28 septembre 2009 au stade de Conakry où plus de 157 personnes avaient été lors d’un meeting de l’opposition. Mais, il a toujours réfuté ces accusations. Une position qu’il a réitéré ce lundi devant le tribunal.

« Comme je l’avais dit à l’époque, puisque les deux commandants n’étaient plus en fonction, c’est le commandant Toumba qui assurait les fonctions commandant de régiment… Quelque chose qui n’est pas réel, on ne peut pas l’inventer. Vous avez remarqué lors du passage du commandant Toumba que je respecte beaucoup, (…) il a clairement dit qu’il était le commandant du régiment, mais les autres qui lui faisaient la guerre ne le savaient pas », a déclaré Moussa Dadis Camara.

Cependant, ces accusations du capitaine Dadis Camara ont très vite été balayées d’un revers de la main par le commandant Toumba Diakité. Cet accusé assure qu’il n’était qu’un seul « aide du camp » du président Dadis. Et à ce titre, il était son « confident et conseiller direct » et son autorité était circonscrite au Salon.

« Je viens d’écouter la réponse de mon président (…), mais je voudrais le rappeler ici qu’il est question d’Etat, ce n’est pas un jeu. Et c’est pourquoi à la prise du pouvoir, les fonctions ont été bien définies, sachant qu’une seule personne ne pouvait en aucun cas être par-ci par-là. C’est pourquoi la gestion de la présidence est partie de la nomination d’un ministre chargé de la sécurité présidentielle et des décrets ont été pris pour nommer un commandant de régiment et son adjoint et me nommant aide du camp, c’est-à-dire confident et conseiller direct du président de la république. Donc, mon autorité était circonscrite au salon… S’il (le capitaine Moussa Dadis Camara) a nommé des personnes à des fonctions où elles ne connaissent pas leurs attributions, en toute sincérité le président ne pourra en vouloir qu’à lui-même… Le président Dadis était le commandant du régiment… Si ce n’est pas le cas, qu’il me montre un acte me nommant officiellement commandant du régiment », a martelé le commandant Toumba Diakité.

Cette dernière partie de la réponse de Toumba Diakité a amené le tribunal à poser cette autre question de précision au capitaine Moussa Dadis Camara : comment devient-on commandant du régiment ?

« C’est lorsque le président [de la république] signe l’acte… Mais dans le cas précis monsieur le président, il faut qu’on soit honnête, je n’ai aucun intérêt à mentir sur mes subordonnés. Comme l’a dit commandant Toumba, il était aide du camp. Je suis d’accord. Mais au-delà de ça, il y a ce qu’on appelle l’usurpation du pouvoir. L’acte [nommant Toumba Diakité commandant du régiment] n’avait pas été pris, c’était en attente de chercher un commandant de régiment. Et pendant ce temps, c’est le commandant Toumba qui gérait le régiment », s’est défendu Moussa Dadis Camara.

Suite à ce jeu de ping-pong entre le capitaine Dadis et le commandant Toumba, le tribunal s’est alors tourné vers le capitaine Marcel Guilavogui -peut concerner par cette question de commandant de régiment- pour chercher des réponses. Mais, cet accusé commence par abreuver le tribunal de leçon sur l’armée et sa complexité avant d’enfoncer Dadis.

« Les décrets sont pris par le président de la république. Les notes de servir chez nous dans l’armée viennent dans les compagnies. Le commandant de compagnie peut nommer adjudant de bataillon, adjudant de compagnie, chef de section, etc. Mais, les titres de responsabilité incombent tout simplement au président de la république et son ministre de la défense. Alors moi, en aucun cas je n’ai vu un deuxième décret nommant une autre personne à la place du colonel Sâa Alphonse qui était l’adjoint du colonel Aïdor. Et, c’est le président lui-même qui les a révoqués de leurs fonctions. Parce qu’ils furent arrêtés… Donc, le président Dadis était le commandant du régiment. Je le sais parce que c’est lui qui s’occupait de son régiment », a déclaré Marcel Guilavogui.

Mamadou Baïlo Keïta pour Guineematin.com

Tel : 622 97 27 22

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