Diffamation contre le président Mamadi Doumbouya : Djènè Diaby et Tawel Camara implorent vainement le pardon du tribunal

Djeéné Diaby, commissaire de la HAC, lors d'un entretien avec des journalistes à Kankan, le 12 juin 2024

Le procès ministère public contre les deux commissaires de la HAC, Ibrahima Tawel Camara et Djènè Diaby a connu son épilogue ce jeudi, 20 juin 2024, devant le tribunal de première instance de Kaloum. Poursuivis par l’État guinéen à travers le ministère public, ces deux commissaires de la Haute Autorité de la Communication (HAC) répondaient devant cette juridiction des faits de “diffamation à l’égard du chef de l’État”. À l’issue des deux jours d’audience, le tribunal a reconnu coupables les prévenus et les a condamnés à 8 mois de prison dont 7 mois assortis de sursis. Et ce, malgré le mea-culpa des concernés et leurs avocats, a constaté Guineematin.com à travers un de ses reporters.

Accusés pour allégation des faits de nature à porter atteinte à l’honneur et à la considération du chef de l’État et d’autres hauts cadres de la Présidence, Ibrahima Tawel Camara et Djènè Diaby, tous commissaires à la HAC, ont été situés sur leur sort ce jeudi, devant tribunal correctionnel de Kaloum. Après une longue journée hier mercredi essentiellement consacrée aux débats de fond, cette deuxième journée a été consacrée aux réquisitions et plaidoiries des parties. Le représentant du ministère public, convaincu de l’imputabilité de l’infraction aux prévenus, a requis un an d’emprisonnement dont 8 mois assortis de sursis et au paiement d’un million d’amende. Avant que cela ne soit compressé à un mois de prison ferme par le tribunal dans son délibéré.

À l’ouverture de l’audience à 12 heures précises, la parole est revenue au ministère public, Mohamed Bangoura de présenter ses réquisitions. Après avoir brièvement rappelé les faits ayant conduits ces deux commissaires devant cette juridiction, le substitut du procureur de la République près du tribunal de première instance, a estimé que ces deux commissaires sont allés au-delà de leur mission à Kankan. Il soutient que les propos tenus par ces deux prévenus constituent des allégations qu’ils imputent à des personnes. Car selon, ces propos “diffamatoires” n’ont aucun fondement, parce qu’ils n’ont pas été à même d’apporter des preuves de leurs déclarations. Par conséquent, Mohamed Bangoura affirme que ces agissements des deux commissaires de la HAC portent atteinte à l’honneur et à la considération du chef de l’État et certains hauts cadres de la présidence.

Toutefois, selon ce magistrat, ces faits précités sont constitutifs du délit de la diffamation. Par conséquent, de retenir les prévenus dans les liens de la prévention. Pour la répression, de les condamner à un an d’emprisonnement dont 8 mois assortis de sursis, et au paiement d’une amende d’un million de francs guinéens chacun.

Pour sa part, le collectif des avocats de la défense des prévenus a plaidé coupable. Maître Bakary Millimono et Me Karamoko Malick Diakité ont également sollicité du tribunal l’application de la loi organique L02 portant liberté de la presse en République de Guinée. Car selon eux, bien que les propos tenus soient regrettables, il faut tout de même reconnaître qu’ils ont été tenus par voie de presse.

En prenant le premier la parole, Me Bakary Millimono a pris le contre-pied des réquisitions du représentant du ministère public en ce qui concerne l’application des dispositions du code pénal dans cette procédure. Il a bien voulu rappeler au tribunal que le délit de diffamation dont fait allusion le parquet est un délit de presse vu que leurs propos que nous regrettons aujourd’hui ont été relayés par les médias et dans une maison de presse. Donc, selon l’avocat, la loi qui sied, c’est la loi L002 pourtant liberté de la presse. Ainsi, il sollicite du tribunal d’écarter le code pénal dans cette procédure et de se référer à la loi organique L02 portant de la liberté de la presse en son article 106. Plus loin, Me Millimono a affirmé que depuis Kankan, lieu de commission de l’infraction, ses clients ont regretté leurs propos. Ils ont même partagé leur mea-culpa à plusieurs reprises. Avant de plaider de leur accorder une large circonstance atténuante.

De son côté, maître Karamo Malick Diakité, l’un des avocats de la défense, après les plaidoiries de son prédécesseur a plaidé coupable, en reconnaissant ces propos constituent une offense à l’égard du chef de l’État. Mais pour lui, leurs clients sont déjà sanctionnés non seulement par leur institution à travers la décision de leur suspension, mais aussi par l’opinion de manière générale. Nul n’aurait approuvé ce qu’ils ont dit. Mais l’erreur est humaine, s’excuse l’avocat Diakité au nom de ses clients. Il s’en est focalisé par ailleurs sur l’intention de leurs clients. Il estime que l’intention c’était de sensibiliser les journalistes dans le cadre du respect de l’éthique et de la déontologie et non pas de nuire. Pour finir, il demande au président : « Si vous estimez que ce n’est pas la L02, nous demandons clémence ».

Ainsi finies les réquisitions et plaidoiries du ministère public et de la défense. Le président du tribunal, Ousmane Sylla,  redonne la parole aux prévenus afin d’articuler leurs derniers mots pour leur propre défense.

« Monsieur le président, la majeur partie des journalistes présents dans cette salle m’ont vu aujourd’hui pour la première fois. Ils entendent mon nom Tawel sans me connaître physiquement. Ça veut dire que je n’aime pas le bruit. Je regrette amèrement cet acte. Je n’avais aucune autre intention de mettre en mal mes confrères journalistes avec autorités. Je demande pardon à la plus haute autorité du pays, à tous les journalistes et à l’ensemble du peuple de Guinée. Je suis malade. Hier nuit j’ai failli piquer crise dans ma cellule à cause de la chaleur suffocante qu’il y a à l’intérieur. Nous sommes 90 dans notre cale. Mon pied gauche est fortement impacté par cette maladie. Donc, je demande pardon au tribunal », a dit le journaliste.

Ainsi, le tribunal, statuant sur siège, a déclaré Ibrahima Tawel Camara et Djènè Diaby coupables du délit de diffamation à eux reproché. Pour la répression, les condamne à 8 mois d’emprisonnement dont 7 mois assortis de sursis et au paiement d’une amende d’un million de francs guinéens chacun.

Toutefois, il faut retenir que les prévenus retournent en prison pour y purger un mois moins 2 deux jours déjà purgés.

Malick DIAKITE pour Guineematin.com 

Tél : 626-66-29-27

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