« Nous vivons dans l’humiliation totale », dit Aboubacar Keïta, garde pénitentiaire (entretien)

Tous les dossiers judiciaires en cours dans les cours et tribunaux du pays ont été renvoyés ce lundi, 26 mars 2018 à cause de la grève déclenchée par les agents de l’administration pénitentiaire. Le ministère de la justice a mis en place une commission de négociation qui a rencontré les agents grévistes.

Mais, cette médiation s’est soldée par un échec. Après cette réunion, un reporter de Guineematin.com a rencontré Aboubacar Keïta, agent pénitentiaire en service à la maison centrale de Conakry et porte-parole des grévistes. Avec monsieur Kéita, il a été question des conditions difficiles dans lesquelles les agents de l’administration travaillent, de la suspension de certains de leurs collègues, entre-autres.

Guineematin.com : Bonjour monsieur Aboubacar Keïta, vous êtes allé en grève depuis ce matin. Qu’est-ce qui se passe réellement ?

Aboubacar Keïta : ce qui se passe, c’est qu’on a fait un avis de grève depuis plus de six (6) mois et la grève a été suspendue pour une première fois parce qu’il y a eu un protocole d’accord entre le ministère de la justice et la commission. C’est ainsi qu’ils ont envoyé des denrées alimentaires et nous ont dit que ça allait continuer et que nos grades allaient sortir. A notre grande surprise, trois mois après, rien n’en a été. Nous avons fait un écrit pour adresser à son excellence monsieur le ministre de la Justice Garde des sceaux, jusqu’à présent nous n’avons pas eu de réponse. C’est pourquoi nous sommes allés en grève. Donc aujourd’hui, une commission de négociation est venue nous rencontrer. Mais, le protocole d’accord fait lors de la dernière négociation n’a pas été respectée, comment nous allons suspendre encore la grève ? Nous leur avons dit que c’était impossible. A l’heure où je vous parle notre président, celui qui nous avait représenté lors de la première réunion, Mamady II Camara, a été arrêté et transféré à la prison de Mamou.

Guineematin.com : Qu’est-ce que vous réclamez réellement ?

Aboubacar Keïta : nous voulons être rétablis dans nos droits dans les plus brefs délais. Nous demandons nos grades. Il y a 18 ans que nous sommes en service, mais personne d’entre nous n’a de grade. Nous demandons les denrées alimentaires, les équipements et la vitalisation de notre statut particulier.

Guineematin.com : quels seront les impacts de cette grève dans le monde judiciaire ?

Aboubacar Keïta : cette grève va paralyser la justice parce que désormais, nous ne recevons pas, nous ne libérons pas et il n’y aura non plus pas de jugement. Donc, actuellement personne ne rentre et personne ne sort de la prison.

Guineematin.com : vous assurez quand même le service minimum ?

Aboubacar Keïta : oui, nous assurons le service minimum. Les détenus ont droit au manger, leurs parents peuvent leur rendre visite.

Guineematin.com : un dernier mot ?

Aboubacar Keïta : je demande à tout le monde de nous soutenir. Nous souffrons, nous vivons dans l’humiliation totale.

Propos recueillis à la maison centrale de Conakry par Ibrahima Sory Diallo pour Guineematin.com

Tel. : (00224) 621 09 08 18

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