Assises nationales au METFP : un citoyen dénonce les exactions policières à Wanindara

Les assises nationales ont eu lieu hier, vendredi 29 avril 2022, au sein du ministère de l’Enseignement technique et de la formation professionnelle (METFP). L’événement a été organisé au chapiteau du Palais du peuple, sous la présidence du ministre Alpha Bacar Barry, en compagnie de son homologue de l’Administration du territoire et de la décentralisation, Mory Condé. Il a connu une forte mobilisation et a été marqué par plusieurs témoignages, rapporte un journaliste de Guineematin.com qui était sur place.

A l’entame, la cheffe de Cabinet du ministère de l’Enseignement technique et de la formation professionnelle, Mme Yansané Fatou Baldé, a décrit le contexte de ces assises nationales, tout en soulignant leur importance. Selon elle, c’est une occasion qui est offerte à chaque Guinéen d’exprimer ses sentiments et de dire ce qu’il pense de la Guinée de demain.

Madame Yansané Fatou Baldé, cheffe de Cabinet METFP

« Pendant près de 65 ans, on a vécu dans un État qui n’existe que par le nom, et où l’Etat de droit n’a vraiment pas existé. Les frustrations, la violation systématique des droits humains, l’exclusion, la délation et la diffamation, sont devenues monnaie courante et instituées en mode de gouvernance. Pour casser ce cycle, il faut qu’à un moment donné, quelqu’un décide pour dire, on arrête, je ne me venge plus, mais je veux parler avec ceux qui me causent du tort pour qu’on mette en place un mécanisme de non répétition des faits avérés », a-t-elle expliqué.

Mory Condé, ministre de l’Administration du territoire

De son côté, le ministre de l’Administration du territoire et de la décentralisation, Mory Condé, s’est réjoui de l’engouement qu’ont suscité ces assises au niveau du ministère de l’Enseignement technique et de la formation professionnelle. Il a ensuite rappelé que « ces assises visent à rassembler les Guinéens autour du pardon et de la vérité, mais aussi, à établir des mécanismes de non répétition des faits que nous avons connus.

Ces assises ne feront pas ombrage à la justice, mais elles visent à ce que les Guinéens se disent certaines vérités. C’est l’Etat, de 1958 à nos jours, qui a toujours été indexé comme bourreau par certains citoyens. C’est toujours des hauts commis de l’Etat qui ont été utilisés pour commettre des actes de violation des droits humains. Et c’est cet Etat qui a décidé d’organiser ces assises pour la vérité et pour le pardon, et ensuite la réhabilitation ».

Alpha Bacar Barry, ministre de l’Enseignement technique et de la formation professionnelle

Pour sa part, le ministre de l’Enseignement technique et de la formation professionnelle, Alpha Bacar Barry, a indiqué que ces assises sont un exercice de vérité, de dialogue, un processus dynamique, interactif, qui se passe entre deux, trois ou plusieurs personnes. « C’est un exercice où on doit faire l’effort sur nous-mêmes après avoir dialogué pour nous débarrasser du venin de la rancœur, du pressentiment et surtout du ressentiment. C’est ce qui nous a manqué depuis 1958 », a dit Alpha Bacar Barry.

Cette rencontre a été marquée par plusieurs témoignages, dont celui du doyen Ibrahim Mah, un habitant du quartier Wanindara, en banlieue de Conakry. Ce dernier a dénoncé la discrimination et la stigmatisation de son quartier, ainsi que les exactions que les forces de l’ordre commettent souvent dans cette zone.

Ibrahima Mah, citoyen de Wanindara

« Je loge à Wanindara, dans la commune de Ratoma. Pour rentrer chez moi, il me faut faire des tours, alors que j’ai construit cette maison sur mon salaire, avec toutes les privations du monde. Quand les policiers ne veulent pas que je rentre chez moi, mes enfants et moi restons à la maison sans manger, ni rien.

Le quartier Wanindara est réputé d’être un quartier rebelle. Parfois, quand mes amis me demandent où je loge, j’ai honte de dire que je suis de Wanindara. Pourtant, Wanindara est aussi de la Guinée. C’est un quartier qui relève du territoire national. À Wanindara, il n’y a ni route, ni école publique encore moins d’hôpital. Quand vous y allez, il n’y a que des écoles privées. On ne bénéficie pas des services de l’Etat. C’est ce que nous avons voulu dénoncer, et on nous prend pour des rebelles. On connaît dans quelles circonstances l’imam Elhadj Baldé (Elhadj Abdoulaye Baldé, qui a été incarcéré sans jugement pendant près d’une année par le régime d’Alpha Condé) a été arrêté.

Un imam n’est pas n’importe qui, c’est quelqu’un qui dirige plus de 500 personnes. Plus de 10 pick-up sont venus chez lui pour l’arrêter. Les agents arrivent chez lui à 23 heures, et jusqu’à 4 heures du matin, ils sont chez lui, dans sa concession. Du rez-de-chaussée jusqu’au dernier étage, on a tout saccagé. Pourquoi de telles violences dans ce pays ? Ceux-là qui ont commis ces exactions sont là, ils se connaissent. La seule réparation que nous demandons à l’Etat, c’est de réparer l’injustice causée à Wanindara, car nous avons les mêmes droits que le quartier Almamyah de Conakry », a dit ce citoyen.

Mamadou Alpha Baldé pour Guineematin.com

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