« Privatisation » de l’hôpital Donka : les travailleurs rejettent les nouvelles propositions des autorités

Mettre fin à la colère des travailleurs et les convaincre à adhérer à la nouvelle politique de gestion du CHU de Donka, c’est la volonté des autorités de la transition. C’est dans ce cadre que le ministère de la santé a décidé de mettre de côté la convention signée avec la société canadienne « NESTERNE Groupe » pour la gestion de l’hôpital, et de rédiger un mémorandum qui sera soumis à l’approbation des travailleurs. Mais ces derniers ont, dans leur grande majorité, rejeté ce mémorandum, a constaté un journaliste de Guineematin.com qui était sur place.

Selon nos informations, c’est le 11 mars dernier que le ministère de la santé a signé une convention avec la société « NESTERNE Groupe » pour la gestion du CHU de Donka. A travers ce document, le gouvernement guinéen confie la gestion de cet hôpital national à cette société canadienne. Mais cette convention de concession a provoqué la colère des travailleurs du centre hospitalier, qui dénoncent la « privatisation d’un patrimoine national ».

Face à cette situation, les autorités guinéennes ont décidé de revoir leur démarche. Le ministère de la santé a mis en place une équipe chargée de rédiger un mémorandum prenant en compte toutes les préoccupations des travailleurs. Et au terme de ces travaux, le directeur général de l’hôpital national Donka a convié les travailleurs à une réunion ce mardi, 7 juin 2022, pour leur présenter ce mémorandum.

Pr Mohamed Cissé, Directeur Général de l’hôpital de Donka

« Le président de la République a instruit le ministre de la santé de discuter avec les travailleurs de Donka par rapport à cette situation et de lui remonter les informations le plus rapidement possible. Ce qui a fait que le mercredi dernier, j’ai eu une première rencontre avec le secrétaire général et Mme la cheffe de cabinet. On a décidé de revoir cette concession et de faire des propositions concrètes dans l’intérêt des travailleurs et dans l’intérêt de la Guinée. Et pour cela, une réunion a été convoquée le vendredi. Réunion au cours de laquelle on m’a demandé de choisir certaines personnes pour se joindre à moi pour faire un mémorandum. J’ai appelé Dr Karamba et Pr Namory, on est venus travailler au ministère. Et à la suite de cela, je n’ai reçu aucun document officiel de cette concession.

Mais là où nous sommes aujourd’hui, oublions ce document qui a été signé. Pourquoi ? Parce qu’il ne sera pas appliqué. L’équipe qui a été mise en place a fait un travail. Les points forts et les points faibles ont été ressortis, et il y a eu des propositions. Et c’est ce que M. le ministre m’a demandé hier devant le syndicat de venir vous présenter. Et qu’au terme de cela, de remettre le document aux syndicalistes qui vont discuter avec les travailleurs. Si on estime que ce qui est dans le document est insuffisant, s’il y a des choses à rajouter, on rajoute. Donc on est à ce stade », a expliqué le Pr Mohamed Cissé, directeur général de l’hôpital national Donka.

Dr Fernandes Moustapha

Mais dès après la lecture du mémorandum, la plupart des travailleurs ont exprimé des sentiments de déception et de colère. Ils ont rejeté le document sur le champ. « Notre ancien président Alpha Condé a travaillé pour trouver 666 milliards de francs guinéens pour reconstruire l’hôpital Donka pour que les médecins guinéens puissent travailler. Mais les nouvelles autorités du pays ont pris cet hôpital pour le donner à des Canadiens. Là où nous sommes, aucun travailleur de Donka n’a accès à cet hôpital, sauf s’il passe un test. Ce que nous demandons, c’est de nous aider pour que notre hôpital nous revienne », a déclaré Dr Moustapha Fernandez, en service au laboratoire central du CHU Donka.

Dr Soua Koly Alexandre Lamah

Même son de cloche chez Dr Soua Koly Alexandre Lamah, qui défend l’intérêt des travailleurs internes. « On a compris que nos chefs qui sont là, c’est pour leur intérêt seulement qu’ils ont accepté la concession. Nulle part dans le mémorandum, ils n’ont parlé des internes. Alors que quand on prend l’hôpital national de Donka, les 98% des activités qui sont menées dans cet établissement, ce sont les internes qui font ces activités. L’interne, c’est quelqu’un qui a soutenu une thèse de mémoire pendant des années, il est auprès de son chef. Vu qu’il n’est pas rémunéré, il est dans le service en tant qu’interne durant plus de 5 à 10 ans. Donc, on a plus de 800 internes qui évoluent ici, y compris les infirmiers, les laborantins, les lavandiers et tous les stagiaires qui sont là avec nous. On ne peut pas accepter qu’on nous ignore comme si nous n’étions pas là », a-t-elle dit.

Selon cette dernière, si le gouvernement ne prend en compte la situation des internes dans les prochains jours, ils vont tous vider l’hôpital Donka jusqu’à nouvel ordre.

Dr Tolno Jean Pierre

Mohamed Guéasso DORE pour Guineematin.com

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