Conakry : immersion dans le monde des camions ‘’ZIL’’ qui attirent les regards

Dans la capitale guinéenne, il arrive aux usagers de la route de rencontrer ces vieux camions, défoncés, ressemblant à un tas de ferraille. Il s’agit des ZIL (lire : Zavod Imeni Likhatchiova) des années 1930, utilisés encore dans le transport d’agrégats. Malgré tout, conducteurs et apprentis se relaient sur ces engins d’un autre âge pour gagner la pitance quotidienne dans une conjoncture économique qui ne laisse aucun choix, a constaté Guineematin.com à travers un de ses reporters.

Ce sont des anciens poids lourds des années 1930. Ces camions de fabrication chinoise et russe, autrement appelés ZIL, ont fait leur belle époque. Aujourd’hui, ces engins qui ont l’air de dater de la période antédiluvienne, ont presque disparu de la circulation.

En Guinée, il existe encore une petite dizaine de ces engins. A Conakry, il n’y en a que cinq qui continuent à défier le temps. Pour trouver ces camions à l’architecture spéciale et au fonctionnement particulier, il faut se rendre à Matam, non loin de la mairie. Là, on peut les trouver, chargés de sable en attente d’un potentiel acheteur.

Ibrahima Diallo, chauffeur de camion ZIL

Les conducteurs de ces vieux engins passent la plupart du temps en groupe, en train de discuter des vieux jours qui ont marqué leur succès de chauffeur. Ibrahima Diallo, propriétaire du camion dénommé « Fow Fotaly », vient d’avoir une commande à livrer. Son jeune apprenti traîne difficilement un bidon de 20 litres d’eau qu’il s’apprête à déverser dans le radiateur.

Pendant ce temps, le chauffeur remplit de carburant ce qui fait office de réservoir, un bidon taillé sur mesure. Ibrahima utilise un petit tuyau pour y mettre l’essence. Tout est maintenant fin prêt, la meute d’apprentis s’entraide pour soulever le vieux capot afin de sortir une barre de fer, de forme brisée, pour démarrer de façon manuelle le vieux camion.

Ibrahima Diallo prend le temps de se confier à Guineematin.com : « Nous achetons un chargement de sable de 10m³ avec les gros camions, nous mettons 4m³ dans nos gilles. Nous revendons notre chargement à 900 000 GNF. Pour ce qui est de l’obtention des pièces, les usines ont fermé il y a des lustres. Nous en gagnons quelques-unes avec les camions qui ne sont plus en état de circuler ».

Lansana Kaloga, Chauffeur de Camion ZIL

Lansana Kaloga est un autre chauffeur qui évolue sur le site de Matam. Même s’il est inquiet de l’avenir de sa profession, il préfère jouer à l’humour. « Quand les gens nous voient arriver dans la circulation, certains prennent la fuite à cause de la laideur de nos camions. Ce sont des camions caducs dont les usines n’existent plus. Bientôt vous ne nous les verrez plus dans la circulation ».

Amadou Sarah Bah, un des doyens de la profession, est propriétaire du camion dénommé « Mission Finale ». Il a commencé à conduire ce genre de véhicules au début des années 70. Il est marié et père de plusieurs enfants, tous élevés grâce à l’argent qu’il gagne avec son vieux camion. Il dit s’accrocher à son camion faute de mieux.

Amadou Sarah Bah, chauffeur de Camion ZIL

« Nous conduisons ces camions par manque de moyens. Dans la circulation, les gens nous regardent bizarrement. Certains nous crient dessus et d’autres demandent à faire des photos », a-t-il fait savoir.

Malgré la menace de disparition de ces vieux camions transporteurs de sable, qui démarrent manuellement à l’aide d’une barre de fer, il y a de jeunes garçons qui viennent apprendre le métier avec les anciens pour perpétuer une tradition en voie d’extinction.

Mamadou Tanou Bah pour Guineematin.com

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