Gaoual-Télimélé : une histoire de père et de fils ! Par Amadou Diouldé Diallo

Amadou Diouldé Diallo, journaliste et historien

Après son écrasante victoire sur les animistes à la bataille de Talansan, en 1727, et l’islamisation complète du Fouta Djallon, les Marabouts Fondateurs de la Confédération Théocratique tournèrent leurs sabres vers les royaumes réputés imprenables et hostiles à la Religion de Mouhamad (Psl).

Le Ngabou, dans l’actuelle Guinée-bissau, avait justement la réputation d’être intraitable et son Roi Diankewali Sane invincible. 

C’est alors que les troupes des neuf Diwes du Fouta convergerent sur Daka le lieu dégagé par le Roi de Labé, le Kaldouyanké Alpha Ibrahima Bassagui et qui sera le point de départ pour Ngabou. 

Le Seydiyanké Soriya Almamy Oumar Barry, fils de Almamy Abdoul Gadiri et petit-fils de Almamy Sory Mawdho, prit le commandement de l’expédition guerrière. 

Le Fouta sortit vainqueur de la mémorable bataille de Tourban- Kansala, grâce à la bravoure de ses guerriers parmi lesquels on peut citer le Kaldouyanké de Singueti, Thierno Aliou Tindima, le premier à avoir escaladé le Tata de Diankewali, avant que le plus jeune des troupes foutaniennes, le Koulounnanké Balla Alpha Abdourahmane Koïn Baldé, ne captura le puissant Roi de Ngabou. 

Le vainqueur de Tourban est le fils de Alpha Ibrahima et petit-fils de Saikou Saliou Balla Mo Koin, l’un des 9 marabouts fondateurs de la Confédération Théocratique du Fouta Djallon. Diankewali Sané, capturé, son royaume islamisé, sa famille asservie, sa fille Koumanthio Wali Sané contracta un mariage avec le Roi de Labé dont dépendait désormais le Ngabou. 

Sur le chemin de retour au Fouta, Alpha Ibrahima Bassagui fixa sa nouvelle mariée à Foulamory à une cinquantaine de kilomètres de Kansala sur l’autre rive du fleuve Koliba. Elle était déjà enceinte de l’enfant prédestiné dont le monde entier parlerait jusqu’à la fin de ses jours selon les prédictions expresses de Thierno Sadou Mo Dalein devenu Waliou à l’âge de 16 ans seulement. Koumanthio Wali Sané donna ainsi naissance à Alpha Yaya à Foulamory, en 1850.

Malheureusement Almamy Oumar ne retourna jamais à Timbo. Le grand conquérant trouva la mort sur le chemin de retour dans le village de Dombiadji, situé dans le Kaadé entre Kithiar et Kamélé, le chef-lieu de la province éponyme. Plusieurs versions dont celle de l’empoisonnement ont été relayées sans qu’aucune à ce jour ne soit la plus plausible. 

Toujours est-il que le tombeur de Ngabou et de son Roi Diankewali, repose à Dombiadji où un grand baobab répand son ombre sur sa tombe et qu’à quelques mètres de là, un fils de la localité Elhadj Karo Dombiadji, a construit une mosquée comme pour immortaliser ce lieu, en attendant peut-être que la famille de Almamy Oumar (Soriya et Alphaya), le Fouta, l’État Guinéen pourquoi pas, ne pensent à y construire un. Mausolée digne de la grandeur de l’homme. 

Voilà pour ce qui est du père qui repose donc à Gaoual. A sa mort, une rude bataille de succession s’engagea entre ses fils Mamadou Pathe, Abdoulaye Dokiri ( de même mère) et Boubacar Biro ( fils de la servante Diariou). Les intrigues de palais à Timbo, à Bhouria et à Fougoumba déchirèrent la famille et Bocar Biro puissant et craint, s’imposa par la force et remit3 en cause le droit d’aînesse. « C’est la peau de commandement de notre père à nous tous, c’est le plus fort qui va s’asseoir dessus », dira-il. La suite on la connait. 

L’Almamy Bocar Biro sera chassé de Timbo et sera contraint à la fuite pour sauver sa vie. Il prend le chemin de Bantignel, se retrouve entre Popodara et Diountou au niveau de la rivière   Kassa qu’il va longer jusqu’où elle se jette dans la Kakrima.

En bon géographe, il sait que s’il gagne l’autre rive, il se retrouvera dans le Telimele à travers le Monoma et le Kebou. Ces derniers ont la réputation d’être de grands guerriers dont la bravoure et la ténacité n’ont d’égal au Fouta, que ceux de Koin. 

Ensemble ils constituent les unités d’élites des armées foutaniennes. Et, ils vont le prouver à L’Almamy Bocar Biro en le ramenant de force à Timbo au prix d’une bataille sanglante, celle de Petel Djiga (Mamou) du 2 février 1896. Seule l’artillerie des troupes coloniales aura raison du fils de Nen Diariou, le samedi 14. Novembre 1896 dans la plaine de Bombey à Porédaka. 

Almamy Oumar, le père pour Gaoual et Almamy Bocar Biro, le fils pour Télimélé, c’est une fascinante histoire du Fouta qui est ainsi gravée dans la pierre, et que la déesse de la chanson pastorale peule Binta Laly Sow s’enrichit pour exhumer et valoriser ce passé glorieux de cette aire géographique et sociologique de la Guinée.

Amadou Dioulde Diallo, journaliste-historien

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