CRIEF : les avocats de Dr Diané annoncent leur retrait de la procédure (les raisons)

Le procès de Dr Mohamed Diané, ancien ministre d’État, ministre de la défense et ancien ministre chargé des Affaires présidentielles sous Alpha Condé, s’est poursuivi ce lundi, 27 mars 2023, à la Cour de répression des infractions économiques et financières (CRIEF). Mais dès l’entame, les avocats de la défense ont demandé à la Cour de surseoir à l’examen du dossier en attendant que la Cour suprême statue sur le pourvoi en cassation exercé contre le renvoi de Mohamed Diané devant la CRIEF pour y être jugé.

Après avoir « débouté » les avocats, la Cour a ordonné l’ouverture des débats. N’étant pas satisfaits, les avocats vont se retirer de la procédure, poussant le prévenu à refuser de répondre aux questions de la Cour, a constaté sur place Guineematin.com à travers un de ses reporters.

Dr Mohamed Diané est poursuivi pour détournement de deniers publics, enrichissement illicite et blanchiment de capitaux. Sur l’exception soulevée la semaine dernière, la CRIEF a statué sur la question préjudicielle soulevée par les avocats du prévenu. « La cour constate que la question préjudicielle soulevée par M. Mohamed Diané, et par lui, qualifiée d’exception préjudicielle n’étant nullement à retirer aux faits servant de base à la poursuite initiée contre lui, le caractère d’infraction. Dit et juge que cette demande n’est pas constitutive d’exception préjudicielle au jugement prescrit par l’article 451 du code de procédure pénale. Déclare irrecevable cette demande comme non fondée », a fait savoir Francis Kova Zoumanigui, président de la Cour, qui a ensuite suspendu l’audience pour quelques minutes.

Me Sidiki Bérété, avocat de la défense

Mais aussitôt que la décision est tombée, les avocats de la défense ont annoncé leur retrait du procès, dénonçant une justice manipulée. « La défense se retire, on n’a pas la force morale de plaider devant une justice qui ne donne pas confiance, devant une justice qui a le courage de se substituer à la Cour suprême. Pour voir l’irrecevabilité fondée ou non fondée, l’appréciation dépend uniquement et exclusivement de la Cour suprême. Le juge, même si c’est une Cour spéciale, il n’a pas le pouvoir de s’ériger et de remplacer la Cour suprême pour décider. Donc à partir de l’instant T, la défense se retire et ils n’ont qu’à juger Dr Diané sous silence parce que nous, on ne va plus participer à ce débat de piège, inutile et ridicule. Si la justice n’est pas équitable, le droit ne triomphe pas, ce n’est pas la peine de fournir des efforts quand il n’y a pas d’assurance. Si les dés sont pipés, s’il n’y pas de confiance, vous allez venir devant une justice qui est manipulée ? À une justice qui prête le flanc à l’illégalité ? (…). C’est une honte, le droit a sombré ce soir. C’est extrêmement grave qu’un juge d’une cour spéciale, juridiction d’appréciation au second degré, puisse remplacer la juridiction suprême de cassation. C’est extrêmement grave, ce sont des manipulations, ça ne marchera pas. Alors il n’y aura pas un procès de spectacle comme ils veulent. La justice n’est pas indépendante, c’est une justice de transition, c’est un produit de la Crief. C’est une honte à l’Etat de droit. Nous, on ne viendra pas plaider et Dr Diané a le droit de se taire et de les regarder. L’histoire va les juger », a lancé maître Sidiki Bérété, un des avocats de M. Diané.

De leur côté, les avocats de la partie civile ont applaudi la décision prise par la chambre de jugement de la CRIEF. Mais, ils disent regretter la position adoptée par leurs confrères, qu’ils considèrent comme une fuite.

Me Pépé Antoine Lama, avocat de la partie civile

« C’est avec un ouf de soulagement que l’agent judiciaire que nous représentons dans cette affaire a accueilli ce jugement que la chambre de jugement de répression des infractions économiques et financières vient de prononcer (…). Nous sommes avocats, nous devons rester avocats. Nous ne pouvons pas nous transformer ou nous mettre à la place du juge. S’ils ne sont pas satisfaits de la décision qui a été rendue, ils savent bien le recours approprié. Mais, créer le vide, nous, nous considérons que c’est une manière de fuir le débat et nous n’allons pas nous prêter à ce jeu. Nous n’accepterons pas, nous serons dans la salle pour débattre de cette affaire. Nous sommes en matière correctionnelle, la constitution d’avocats n’est pas obligatoire. Si Dr Mohamed Diané décide de parler ou en tout cas de se prêter aux questions de la cour, nous allons continuer. S’il décide encore de garder le silence comme ses avocats ont dû le lui conseiller, on va également continuer mais nous ne trouvons pas de raison juridique valable qui peut expliquer le retrait de la défense de Dr Mohamed Diané », a fait savoir Me Pépé Antoine Lama, avocat de l’agence judiciaire de l’Etat.

À la reprise de l’audience, le président de la Cour a commencé à poser des questions à Dr Mohamed Diané. Mais, l’ex puissant ministre d’État a décidé d’opter pour le silence. « Avec le désistement de mes avocats, je n’ai plus rien à dire », s’est contenté de dire Dr Mohamed Diané.

Face à cette situation, les avocats de la partie civile ont demandé qu’un ou des avocats soient commis d’office pour assurer la défense de Dr Diané afin de lui garantir un procès équitable. En outre, ils ont sollicité la saisie des biens (immeubles, prête-noms) de Dr Mohamed Diané.

La cour a renvoyé l’affaire au 17 avril 2023 à 9 heures pour la commission d’office d’avocats de Mohamed Diané et joint la demande liée aux mesures conservatoires formulées par la partie civile et le ministère public.

Mamadou Yahya Pétel Diallo et Tanou Bah pour Guineematin.com

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