Origine de la fortune, difficultés et succès d’Elhadj Ousmane Fatako Baldé, « Sans Loi » : « je parcourais 63 Km pour aller à Labé acheter… »

Originaire de la sous-préfecture de Fatako (dans la préfecture de Tougué, région administrative de Labé) et président de la Coordination nationale des Foulbhé et Haali Poular de Guinée depuis 2019, Elhadj Ousmane Fatako Baldé est décédé dans la nuit du dimanche au lundi 27 mars 2023, à Conakry. Il aurait succombé des suites d’un malaise à son domicile à Ratoma. Et, selon des sources proches de sa famille, Elhadj Ousmane Fatako Baldé a été accompagné à sa dernière demeure par une foule compacte vendredi dernier à Fatako, après la prière de 14 heures.

De son vivant, cet opérateur économique de renom avait accepté d’expliquer ses débuts et son parcours à Guineematin.com lors d’une grande interview. Ce qui nous a permis de vérifier certaines rumeurs sur sa personnalité, notamment ses succès, son surnom « Sans Loi » et tant d’autres.

On a donc appris que cet homme était parti de rien à l’âge de 7 ans pour aboutir sous le régime Lansana Conté à la tête de la Chambre nationale de commerce et d’industrie avec une immense fortune. Marchand ambulant d’une autre époque -qui parcourait 63 kilomètres à pied pour aller s’approvisionner en petites marchandises à Labé- est devenu au fil du temps un riche commerçant sollicité jusqu’au niveau des hautes sphères de l’Etat guinéen.

Il n’a pas hérité de fortune, mais son courage, sa foi et sa détermination à réussir ont fait de lui un richissime homme d’affaires. « C’est avec des patates que j’ai entamé ma royauté et la première somme d’argent que j’ai envoyée à Labé pour acheter de la marchandise m’a été offerte par ma mère », disait-il avec beaucoup d’humilité dans la grande interview qu’il avait accordée à Guineematin.com le 27 septembre 2021.

Guineematin.com vous propose ci-dessous un extrait du parcours de ce baobab qui vient de se coucher. Une histoire contée par Elhadj Ousmane Fatako Baldé lui-même il y a moins de 2 ans… 

« Je suis un des fils du Fouta Djallon, éduqué selon les vertus de l’islam. Je suis content de savoir que je suis le descendant de parents musulmans, je suis content d’être peul et digne. Ma mère est diakanké. J’ai étudié le Coran à Fatako auprès mon oncle paternel, le grand frère de mon père. J’ai fait deux ans dans le centre coranique de mon maître. Et, durant ces deux ans, j’ai souhaité qu’on me confié la tête de ce centre, en dépit du fait qu’il y avait des personnes plus âgées que moi dans ledit centre. Ils ont accepté, mais ils ont dit que je dois enlever trois patates pour cela.

Ainsi, je suis allé chez nous, j’ai trouvé trois patates, et je les ai envoyées. Ces patates ont été partagées et nous sommes allés chercher du bois mort qu’on utilisait pour éclairer la nuit pour lire le Coran. Donc, après ça, ils m’ont dit que désormais chaque mercredi je dois envoyer trois patates. J’ai accepté, mais c’est un seul mercredi que je me suis acquitté de ça. Parce que j’ai tout simplement ordonné à chaque apprenant qui était dans le centre d’envoyer chaque mercredi trois patates. Il y avait 65 personnes et chaque personne devait envoyer trois patates.

Quand ils m’ont envoyé ces patates, (…) je leur ai dit : allons y lire le Coran, et après, on viendra partager les patates. Donc, après la lecture du Coran, j’ai donné une patate à chacun d’eux. A ceux qui étaient plus âgés et qui avaient la bouche dure, j’en ai donné cinq patates à chacun. Et, ceux qui venaient après les plus âgés, j’en ai donné deux patates à chacun. Après tout le partage, il est resté vingt-une patates. Et, j’ai dit à tout le monde que ces patates me reviennent, elles sont à moi seul. Heureusement, par la grâce de Dieu, tout le monde a accepté cette proposition. Ainsi, chaque mercredi, chacun envoyait trois patates et on procède au partage habituel…

Donc, c’est avec des patates que j’ai entamé ma royauté, si je peux le dire ainsi… Entre Labé et Fatako, c’est 63 kilomètres. Et donc, je parcourais ces 63 kilomètres pour venir à Labé acheter trois boites de bonbons, de la sardine, du pain et des allumettes. C’est avec ça que je retourne à Fatako. Mais, je faisais une escale en cours de route pour y passer la nuit. Donc, c’est ce que je revendais à Fatako dans la semaine. Et, c’est dans les marchés hebdomadaires, au niveau des lieux de divertissement des jeunes, dans les lieux de baptêmes et de mariages. Ainsi, quand je finis la vente de ma marchandise, je repartais encore à pied à Labé pour m’approvisionner.

J’ai commencé ce commerce à l’âge de 7 ans, trois mois avant qu’on s’inscrive pour l’apprentissage du Coran. La première somme d’argent que j’ai envoyée à Labé pour acheter de la marchandise m’a été offerte par ma mère. Mais, j’avais déjà l’habitude d’aller dans les marchés hebdomadaires pour revendre du sel pour mon père… C’était en période coloniale et on utilisait le franc CFA.

Donc, quand mon petit commerce a un peu prospéré, je me suis marié. Mais, le reste de mon argent, des bandits sont venus le voler chez moi. Heureusement pour moi, j’avais gardé 20 000 francs CFA. Mais, cet argent ne pouvait plus me permettre de faire le commerce…

C’est en ce moment que je suis allé à Guéckédou. Mais, comme mon argent était insuffisant pour le commerce, je suis allé couper du bois mort en brousse. En dix jours, j’avais déjà eu trois chargements de fagots de bois. J’ai loué un véhicule pour transporter ces bois en ville où je les ai revendus pour un montant total de 120 000 francs CFA. C’est avec cet argent que j’ai repris mon commerce », avait raconté Elhadj Ousmane Fatako Baldé face aux journalistes Nouhou Baldé et Bachir Sylla.

Propos décryptés par Mamadou Baïlo Keïta pour Guineematin.com

Tel : 622 97 27 22

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