La case de Myriam Makéba à l’abandon à Dalaba : « elle risque de tomber en ruines, si rien n’est fait »

Après avoir fui le régime de l’Apartheid en Afrique du Sud, Myriam Makéba, artiste chanteuse, a érigé domicile pendant plusieurs années à Dalaba, une préfecture de la Moyenne Guinée. Après son départ de la Guinée, l’artiste et symbole de la lutte anti-apartheid y a laissé une case bien meublée. Mais faute d’entretien, cette case est aujourd’hui presqu’en ruines, a constaté sur place Guineematin.com à travers un de ses reporters.

Implantée dans le quartier Tangama, à vue d’œil, la façade de cette case présente une image déshonorante. Oumar Tely Diallo, un septuagénaire et gardien des lieux, se souvient encore des moments glorieux de la Guinée qui ont favorisé l’hébergement de Myriam Makéba, voix légendaire du continent africain.

Oumar Tély Diallo, gardien de la case Myriam Makéba

« Je me souviens encore, comme si c’était hier ; le premier jour que Myriam Makéba a foulé la terre de Dalaba, elle était avec feu Ahmed Sékou Touré, Kwamé Nkrumah du Ghana, Modibo Keita du Mali, Léopold Sédar Senghor du Sénégal, et Félix Houphouët-Boigny de la Côte D’Ivoire. Quand ils sont venus, ils ont été bien accueillis par la population de Dalaba. Et Myriam Makéba portait ce jour, une robe de couleur rouge et un chapeau plumé multicolore. C’est ainsi, quand ils se sont retournés à Conakry, Sékou Touré a demandé à Myriam Makéba de faire son choix entre rester en Guinée et d’aller dans un autre pays. Son souhait a été celui de rester en Guinée. C’est ainsi que Sékou Touré a mis à sa disposition un véhicule et un chauffeur à sa disposition pour faire un tour de la Guinée afin de cibler l’endroit qui lui convient. Et finalement, elle a choisi la ville de Dalaba. C’est ainsi que cette case a été bâtie sur ces lieux et offerte à Myriam Makéba pour y demeurer. Myriam Makéba a duré à Dalaba. Parce que cette case a été construite depuis 1970. Et c’est lorsque Nelson Mandela a accédé au pouvoir en Afrique du Sud, elle a commencé à faire des va-et-vient entre la Guinée et l’Afrique du Sud. C’est à partir de 1986 qu’on a perdu ses traces à Dalaba, même si parfois, on apprenait qu’elle est à Conakry, jusqu’à ce qu’on a appris son décès en 2008 en Italie », a expliqué Oury Tely Diallo, le gardien de la case de Myriam Makéba.

 

Dans quel état se trouve la case laissée par Myriam Makéba et qu’est-ce qui est entrepris pour sa réfection ? C’est avec beaucoup de peine que Oury Tely Diallo explique : « la case comprend trois chambres. Et chaque chambre a sa douche interne. Il y a aussi un salon, une terrasse et un garage. Tous les meubles qui s’y trouvent, c’est Myriam Makéba qui les a amenés. Il y a, à l’intérieur, des armoires, des buffets, son lit, sa table et tous ses accessoires. Mais c’est avec beaucoup de regret que je vous dis, qu’il y a certains de ses objets qui ont été dévorés par des termites et d’autres sont dérobés par des personnes mal intentionnées, parce qu’il n’y a aucun moyen mis à ma disposition pour la sécurité des lieux. Tous les responsables administratifs de Dalaba qui se sont succédé, connaissent l’état dans lequel se trouve cette maison. Une fois, Alpha Condé a été accueilli à la maison des jeunes de Dalaba. Le maire de Dalaba a attiré son attention sur l’état dans lequel se trouve la case de Myriam Makéba. La seule réponse qu’Alpha Condé a eu à donner, c’est de dire que cet endroit ainsi que la case appartiennent à l’Afrique du Sud. Cette année, même des responsables de l’ambassade d’Afrique du Sud en Guinée sont venus visiter les lieux. Mais depuis, on n’a pas de retour sur ce qu’ils envisagent de faire. Et même tout récemment, c’est l’ambassade des États-Unis qui a fait une visite sur les lieux. En 2008, l’un des petits fils de Myriam Makéba était là. Mais depuis qu’il est reparti aux États-Unis, il n’a fait aucun signe. Au-delà, un particulier est venu pour rénover la maison pour des fins personnelles. Mais lorsque j’ai dit cela au responsable de l’hôtellerie et du tourisme de Dalaba, ce dernier m’a dit que si ce n’est pas l’Etat guinéen qui prend cette initiative, de ne pas se lancer dans un tel projet. Et pourtant aujourd’hui, la case risque de tomber en ruine si rien n’est fait. Mon souhait le plus ardent, c’est de voir la rénovation de cette maison pendant que je suis en vie, car c’est une case pleine d’histoire », a laissé entendre Oury Tely Diallo.

A rappeler qu’au-delà de ce désintéressement des autorités guinéennes sur cette case, il nous a été signalé que certaines personnes mal intentionnées ont presque morcelé une grande partie du domaine réservé à Myriam Makéba, situé dans le secteur Chargeur du quartier Tangama.

Il faut signaler que pour immortaliser cette icône, une rue porte son nom, la rue Myriam Makéba. Si rien n’est fait pour réhabiliter cette maison et sauver le peu d’objets laissés par Myriam Makéba, l’endroit risque de tomber en décrépitude.

De retour de Dalaba, Alpha Boubacar Diallo pour Guineematin.com

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