Les enseignants contractuels accusent : « ils ont décidé de nous soumettre à un concours pour endormir nos consciences »

La décision des autorités éducatives de soumettre les enseignants contractuels communaux de Guinée à un concours au niveau préfectoral pour leur engagement à la fonction publique est mal perçue par les principaux concernés. Dans la préfecture de N’zérékoré, les contractuels, vent debout contre cette mesure, ont décidé de se retirer des négociations entamées il y a quelques temps. Ils l’ont fait savoir ce mardi, 29 août 2023, par la voie de leurs responsables régionaux et préfectoraux, rapporte l’équipe de Guineematin.com basée dans la capitale de la région forestière.

Les enseignants contractuels ont décidé de se retirer des négociations en cours avec le gouvernement et promettent de ne plus prendre le chemin de l’école si rien n’est fait.

Moriba DOUALAMOU, coordinateur régional des enseignants contractuels de la région de N’Zérékoré, est revenu sur cette affaire. « Il y a de cela plus de 3 semaines, une négociation avait débuté entre le gouvernement guinéen et les syndicats par rapport à l’engagement des enseignants contractuels à la fonction publique. Après 2 semaines d’échanges, il n’y a pas eu un terrain d’entente, parce que l’Etat guinéen qui devrait nous engager selon nos efforts antérieurs, et surtout le syndicat sur qui nous comptions, n’ont pas pu satisfaire nos revendications les plus légitimes. Et cette revendication n’était rien d’autre que de nous engager à la fonction publique sans conditions », a dit Moriba DOUALAMOU.

L’enseignant dénonce la volonté des autorités de les soumettre à un test pour intégrer la fonction publique. « Ils ont décidé de nous soumettre à un concours formel préfectoral, c’est juste une manière d’endormir nos consciences. Nous avons été dans les écoles, nous avons servi sans salaires ni primes. Alors face à cette situation, nous n’allons plus retourner dans les écoles de la République tant que nos six (6) mois d’arriérés de salaire, trois (3) mois de salaire de vacances et douze (12) mois de primes d’incitation ne sont pas payés. Ils nous ont exploités et nous avons servi sans salaire. Je dirai qu’il n’y a pas de patriotes en Guinée plus que les enseignants. Ce sont les seuls qui acceptent de travailler sans avoir de primes ni de salaire. S’ils savent que nous sommes un mauvais produit, pourquoi nous utiliser plus de 5 ans ? C’est incompréhensible et inadmissible de leur part. Certains d’entre nous ont commencé à enseigner avant même 2018. S’ils nous considèrent ainsi, pourquoi ne refusent-ils pas les pourcentages ou les taux d’admission qui sont appréciés après les examens en Guinée ? Nous formons des élèves très compétents qu’ils apprécient. Alors, comment peuvent-ils dire que nous n’avons pas de niveau ? Moi, je qualifie cela comme un non-évènement. Si nous avons bien remarqué, avant l’arrivée des contractuels sur le terrain, il y avait une corruption totale au sein de l’éducation. Mais aujourd’hui, on peut dire qu’il y a une diminution », soutient Moriba DOUALAMOU.

Moriba DOUALAMOU, coordinateur régional des enseignants contractuels de la région de N’Zérékoré

En outre, le coordinateur a expliqué les conditions de vie dans laquelle se trouvent les enseignants contractuels actuellement. « Nous préparons l’avenir de ces enfants, et maintenant et nous, et notre devenir ? Ici à N’Zérékoré, nous souffrons énormément pendant que ceux qui sont engagés ne manquent jamais de salaire, même s’ils sont en vacances. Regardez certains d’entre nous, à longueur de journée, ils sont en quête de petits contrats, d’autres ont des machettes à la main, nuit et jour, comme des paysans. La plupart de nos amis font le taxi moto malgré eux.  Nous sommes en train de souffrir le martyr. Parfois, il y a des divorces dans certaines familles. La mort pour certains, due à des maladies qu’on n’a pas pu supporter parce qu’incapables d’acheter les médicaments… ».

Pour sa part, Innocent THEA, secrétaire de la cellule de communication, s’est prononcé sur l’identification biométrique proposée par l’Etat. « Ils sont en train de mener une idée d’identification biométrique, et cela doit être sur des bases claires. D’abord, nous ne sommes même pas au compte de l’Etat pour le moment, et ils nous parlent d’identification biométrique. Nous, nous voulons d’abord être dans une situation stable ; car au début, ils nous ont parlé de fonction publique locale, et après nous avons vu que c’est juste pour nous berner. Aujourd’hui, ils nous parlent encore de concours, mais le gouvernement a été incapable de donner une date précise pour ce concours. Et cela veut dire vraiment que c’est juste un plan pour nous ramener dans les classes et nous tromper au cours de la nouvelle année 2023-2024 », accuse Innocent THEA.

De son côté, Blaise FANGAMOU, chargé à la mobilisation de la coordination régionale des enseignants contractuels de N’Zérékoré, lance un appel à l’Etat. « Depuis plusieurs années, nous sommes en situation de classe, nous avons été supervisés plusieurs fois et les rapports se trouvent dans les structures déconcentrées de l’éducation. Alors, nous demandons à l’État d’oublier cette idée de concours et de nous engager à la fonction publique. Aussi de nous payer nos arriérés de salaire et de primes », a plaidé Blaise FANGAMOU.

De N’Zérékoré, Foromo Gbouo LAMAH, Jean David LOUA et Joseph GOUMOU pour Guineematin.com

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