Allocution du colonel Mamadi Doumbouya aux Nations Unies : « il a tenu un discours qui va frustrer ses parrains [les occidentaux] »

Abdoulaye Kourouma, président du RRD (Rassemblement pour la Renaissance et le Développement)

Le président de la Transition guinéenne a fait son grand oral ce jeudi, 21 septembre 2023, à l’assemblée générale des Nations Unies à New York. Et, du haut de cette tribune, le colonel Mamadi Doumbouya a dénoncé le paternalisme et la condescendance avec lesquels les puissances occidentales s’adressent à l’Afrique. Mais, il s’est aussi employé à justifier les motivations des coups d’Etats sur le continent.

« Nous africains sommes fatigués, épuisés des catégorisations dans lesquelles les uns et les autres veulent nous cantonner… Nous mettre sous la coupe de telle ou telle puissance est une insulte, du mépris, du racisme vis-à-vis d’un continent de plus d’un milliard trois cent millions de personnes. Il est important dans cette prestigieuse et influente assemblée que l’on comprenne clairement, définitivement que l’Afrique de papa, la vieille Afrique, c’est terminé… C’est le moment de prendre en compte nos droits, de nous donner notre place, mais aussi et surtout le moment d’arrêter de nous faire la leçon, d’arrêter de nous traiter comme des enfants », a martelé le colonel Mamadi Doumbouya.

Cependant, pour Abdoulaye Kourouma, le leader du parti RRD et secrétaire exécutif de l’Union pour la refondation de l’Afrique, c’est le côté panafricaniste de cette allocution qui est séduisant. Mais, pour ce qui est des raisons des putschs militaires, cet ancien député guinéen assure que le cas de la Guinée est loin d’être alléchant aujourd’hui.

« Il a tenu un discours que nous les panafricains on aime entendre, il a dit ce qu’on rêve pour l’Afrique. C’est ce type de discours que moi, en tant que panafricain, je voudrais entendre de tous les chefs d’Etat africains pour que l’Afrique se donne la main dans un partenariat gagnant-gagnant. On souhaite que l’Afrique soit libre et autonome dans la gestion de ses ressources, qu’elle ait la liberté de discuter de la valeur de ses ressources avec n’importe quel partenaire. Mais, dans la situation où nous sommes actuellement, est-ce qu’un tel discours lui est favorable et favorable à la Guinée ? A partir du moment où il a perdu plus de 80% de ceux qui l’ont applaudi hier quand il venait au pouvoir, je dis : non. Et quand il parle des erreurs du passé, mais aujourd’hui nous observons les mêmes erreurs. Il y a l’interpellation des leaders d’opinion, l’incarcération des innocents… La justice même est en train de dénoncer la justice dans notre pays. Donc, il a tenu un discours qui va frustrer ses parrains, parce qu’on sait que le coup d’Etat de la Guinée est soutenu par une puissance, même si elle ne le dit pas officiellement… C’est un discours qui n’apaise pas le cœur et l’esprit des occidentaux. Moi je salue le discours en tant que panafricain, mais si son entourage était visionnaire et avait de vraies analyses sur la situation sociopolitique de notre pays, ils allaient préparer un discours qui allait charmer les parrains et leurs collaborateurs… Il a un engagement face à la communauté internationale avec un programme de 24 mois. Si le coup d’Etat a été motivé parce qu’il y avait des détournements ou parce que la justice ne tenait plus la route, aujourd’hui c’est la justice qui dénonce la justice, puisque les magistrats dénoncent actuellement la justice. Si le coup d’Etat a été motivé par la répression dans les manifestations, les derniers cas [de répression de manifestants en Guinée] datent de 72 heures à Boffa. Et, depuis la prise du pouvoir [par le CNRD], on est à plus de 10 morts. Si le coup d’Etat a été motivé par le climat sociopolitique entre les acteurs politiques et le gouvernement ou entre les acteurs sociaux et le gouvernement, c’est la même situation aujourd’hui. Donc, est-ce que le coup d’Etat a sa raison d’être ? Je dis tout de suite : non. Je pense que le colonel [Mamadi Doumbouya] ne sait pas ce qui se passe sur le terrain. Parce que tout ce qu’il a dénoncé, c’est la même chose qu’on observe aujourd’hui dans le pays. Donc, c’est le côté panafricain de son discours que j’apprécie », a indiqué Abdoulaye Kourouma.

Mamadou Baïlo Keïta pour Guineematin.com

Tel : 622 97 27 22

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