N’Zérékoré : des citoyens saluent les vertus du cousinage à plaisanterie, facteur de résolution de différends

Jean Löya GÖMOU, dessinateur industriel et animateur à la radio rurale de N'Zérékoré

Le cousinage à plaisanterie est l’une des multiples facettes des sociétés africaines qui contribue à renforcer les liens et à harmoniser les rapports sociaux. De nombreux citoyens reconnaissent les vertus du cousinage à plaisanterie même si la pratique n’a plus la même envergure que par le passé. Des citoyens de N’zérékoré, interrogés à ce sujet par l’équipe de Guineematin.com basé dans la préfecture, ont dit tout le bien qu’ils pensent du cousinage à plaisanterie et des abus qui peuvent parfois résulter de la pratique.

Des citoyens de la commune urbaine de N’Zérékoré apprécient l’ambiance créée par le cousinage à plaisanterie dans la société. Ils conseillent tout de même de ne pas en abuser car toute chose a des limites.

Mamy Mamady TRAORE, professeur de philosophie

Rencontré au quartier Bellevue, dans la commune urbaine, Mamy Mamady TRAORE, alias Héraclite d’Éphèse, professeur de Philosophie, parle du cousinage à plaisanterie et de ses contours. « Le cousinage à plaisanterie fait partie des moyens et méthodes qui permettaient autrefois aux africains de parvenir à résoudre très facilement les problèmes, sans avoir directement besoin de l’autorité. La vie du cousinage à plaisanterie est relative, parce qu’à chaque société, ses mœurs. Chez nous en forêt par exemple, chacun de nous connaît ce que Traoré et Condé se disent. Même si c’est un Traoré qui avait commis une faute lourde devant un Condé, il peut transformer cela en un simple jeu, et puis ça passe. Pour moi, cette vie est basée sur des principes, dont, entre-autres, le fait de ne pas se fâcher, de ne pas trahir son cousin. Si quelqu’un est ton cousin à plaisanterie, je pense qu’il ne faut pas le faire pleurer, ni refuser de satisfaire son besoin si tu en as les moyens. Avec le cousinage à plaisanterie, il y a certains conflits qui ne peuvent pas arriver devant même l’autorité judiciaire, et que des grands problèmes se résolvent à l’amiable. On sait qu’il n’y a pas de société sans justice. Quand on vit au sein d’une société où il y a une loi, il faut se dire que rien n’est à 100% bon. Donc, le cousinage à plaisanterie amène des gens à commettre expressément des maux à la société ou aux autres dès lors qu’ils savent qu’on ne va pas les envoyer loin. Alors en cela, c’est l’impunité », a laissé entendre Mamy Mamady TRAORE.

Jean Löya GÖMOU, dessinateur industriel et animateur à la radio rurale de N’Zérékoré

Même son de cloche chez Jean Löya GÖMOU, dessinateur industriel de formation et animateur à la radio rurale de N’Zérékoré. « Le cousinage à plaisanterie en pays Kpèlè date depuis les temps anciens où les hommes ont toujours cherché à s’unir et à se réconcilier. En cela, les hommes ont aussi cherché à reconnaître le bienfait des autres en créant une situation qui pouvait éterniser ou pérenniser leur amitié. Il y a des familles ou des noms de familles qui se disent cousins à plaisanterie parce qu’entre eux, ils peuvent se dire ou se faire tout sans s’énerver et se pardonner mutuellement sur le champ. Il y a des cousinages qui sont nés de la protection de l’un par rapport à l’autre comme le cas des Gbamou et Goumou. Dans le cousinage à plaisanterie, on ne se venge pas, on ne se fâche, on ne se ment pas, on ne se trahi pas. Son grand avantage est celui de nous permettre de résoudre des grands problèmes à l’amiable. Dans toute société, il y a toujours des mauvaises personnes. Certains, peuvent exprès se servir du cousinage à plaisanterie pour commettre du tort aux autres, et c’est très dangereux. Une chose que je déplore d’ailleurs. Je conseille ainsi à chacun et à tous que le cousinage à plaisanterie est un tissu social qu’il ne faut pas déchirer. C’est l’un des fondements et des facteurs de la cohésion sociale qu’il faut préserver. Le cousinage à plaisanterie peut résoudre facilement un problème brûlant ou difficile à gérer », soutient l’animateur radio Jean Löya GÖMOU.

Siaka KOLIÉ, chef de programme par intérim à la radio rurale de N’Zérékoré

Trouvé à son bureau, Siaka KOLIE, le chef par intérim des programmes à la radio rurale de N’Zérékoré, évoque les mêmes réalités. « Comme son nom l’indique, des cousins sont des gens qui peuvent s’amuser, plaisanter ou se dire beaucoup de choses, sans s’énerver. Alors pour moi, c’est une sorte d’alliance qui existe entre les gens qui peuvent se faire tout sauf le mal, et qui ne s’énervent pas. A mon avis, puisque je ne suis pas le plus âgé, je ne pense pas qu’il y ait des interdits pour le cousinage à plaisanterie. Tout ce que je sais dans ça, c’est de la plaisanterie, de l’amitié, de la bonne collaboration. Mais ça arrive des fois où des gens mal intentionnés se servent du droit du cousinage à plaisanterie pour abuser négativement des autres ; ce qui n’est pas du tout normal. Avoir quelqu’un comme cousin à plaisanterie ne veut pas dire qu’on a toute l’autorité sur la personne. Le cousinage à plaisanterie peut sauver une vie, résoudre facilement des situations de grande envergure. Dommage à celui qui ne connaît pas son cousin à plaisanterie ! La nouvelle génération doit comprendre que nos parents n’ont pas employé ce mot là pour rien. C’est en connaissance de cause », a indiqué Siaka KOLIE.

De N’Zérékoré, Foromo Gbouo LAMAH, Jean David LOUA et Joseph GOUMOU pour Guineematin.com

Tél. : 00224 620 166 816/666 890 877

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