Abdoulaye Djibril Diallo au procès du 28 septembre 2009 : « un béret rouge m’a frappé sur la tête… je ne voyais plus rien »

Marchand né en 1974 à Labé, Abdoulaye Djibril Diallo est la dernière partie civile à faire sa déposition pour cette semaine à faire sa déposition au tribunal de première instance de Dixinn mercredi 11 octobre 2023. Il a été bastonné par un béret rouge et deux policiers sur l’esplanade du stade du 28 septembre en 2009. Treize ans après, il traîne toujours les séquelles de ses blessures, a appris Guineematin.com à travers son équipe dépêchée à Kaloum.

« Venez entrer, la démocratie c’est ici, ce n’est pas au camp Alpha Yaya ». C’est par ces mots que cette partie civile a été accueillie à la rentrée du stade éponyme par des gens qui portaient des complets Jean. Des gens qu’il dit avoir vu par après poignarder des personnes au stade lorsque les hostilités ont commencé.

Ils accusent les bérets rouges et les hommes de Moussa Tiegboro Camara d’avoir commis les atrocités ce jour dramatique.

« Les bérets rouges et le groupe de Tiegboro sont entrés, certains détenaient des armes et d’autres des bois. Les uns tiraient et les autres frappaient les gens avec les bois jusqu’à ce que les personnes arrêtent de bouger (…). J’ai pris mon téléphone pour appeler ma femme, je lui ai demandé si elle entendait les tirs ici, alors j’ai dit si je m’en sors, c’est ça, sinon tu t’occupes de nos deux enfants. Entre-temps, quatre jeunes filles dont l’âge varie entre 10 et 12 ans se sont accrochées à moi pour me demander de leur venir en aide. Je ne pouvais plus fuir. Je leur ai dit qu’elles sont des enfants, donc ils ne vont pas leur faire quelque chose, ils s’en prennent à nous les adultes. Et puis je leur ai dit de se coucher auprès des escaliers au niveau du Sahara, ils ne vont rien leur faire (…). J’ai regardé la pelouse, tous ceux qui n’étaient pas couchés avaient fui. Les bérets rouges qui étaient restés sur la pelouse tiraient de tous les côtés. J’ai couru pour sortir par la porte ouverte vers les rails. J’ai vu dehors une personne avec un pied fracturé. Alors j’ai voulu monter sur le poteau situé à côté des groupes électrogènes pour ressortir vers les rails, mais les bérets rouges étaient postés là. Ils tiraient et les gens qui étaient montés sont retombés sur ces groupes. J’ai continué pour aller vers l’université Gamal Abdel Nasser mais là aussi les bérets rouges avaient encerclé la cour. On nous a poussés vers le stade annexe, on a déambulé là-bas mais il n’y avait pas d’issues. J’ai vu un policier qui travaillait à belle-vue pistolet à la main et il tirait. Puisque ça a duré, j’ai oublié son nom. Les bérets rouges ont garé un véhicule au niveau d’une des portes du stade annexe. Ils étaient en deux rangs armés et détenaient des bois. Ils disaient aux gens de venir, mais toute personne qui y allait était frappée jusqu’à ce qu’elle cesse de bouger, après ils la jetaient dans le camion. Quand j’ai vu ça, je me suis dis qu’il valait mieux mourir dans le stade au lieu d’aller là-bas. Ils nous ont encerclés, il n’y avait plus où aller. Un béret rouge a pris le sac d’un jeune et il a répondu à notre demande de pardon pour qu’ils nous laissent sortir parce qu’ ils vont nous tuer tous là-bas. Ils ont commencé à bastonner l’étudiant auquel ils ont pris le sac. On a voulu forcer la situation pour sortir par la porte qui est vers le commissariat à la terrasse mais ce n’était pas possible. La foule a poussé la porte, elle s’est ouverte et on est tombés dehors », a relaté Abdoulaye Djibril Diallo.

Épargné jusque-là, sa situation va basculer car il sera frappé par deux agents des forces de défense et de sécurité.

« Dès que je me suis relevé, j’ai croisé un béret rouge armé qui m’a dit de lui donner mon téléphone. J’ai répondu que je l’avais perdu, alors il a demandé de l’argent. J’ai sorti les 5 000 GNF que j’avais pour lui donner, il a dit que c’était petit. Il a déchiré mon habit, il m’a fait signe de partir, c’est là qu’il m’a frappé sur la tête je ne sais pas avec quoi. Je ne voyais plus rien, j’ai cru que ma tête était fondue en deux parties. J’y ai mis la main, le sang coulait. Un policier est venu retirer mes 5 000 GNF. Il a utilisé le bois qu’il avait pour frapper mon pied droit à tel point que j’avais du mal à bouger », a-t-il fait savoir.

Sa mésaventure ne s’est pas arrêtée à ce niveau parce qu’en essayant de couvrir une dame complètement nue, un autre policier lui administre des coups de bois.

« J’étais sur le point de passer devant le commissariat de police à la terrasse là-bas, j’ai rencontré une femme en pleures qui en sortait sans aucun habit. Elle utilisait sa main pour cacher son entrejambe. D’autres femmes pleuraient dans le commissariat. J’ai pris mon habit déchiré pour la couvrir. Un policier est sorti du commissariat, il m’a frappé avec un bois sur mes jambes. Il a donné un coup de pied aux fesses à la femme avant de la ramener à l’intérieur du commissariat où ils étaient en train de la violer », a laissé entendre M. Diallo, qui va être recueilli par une femme dans sa maison où d’autres victimes étaient cachés.

Aujourd’hui, Abdoulaye Djibril Diallo dit connaître des pertes de mémoire et les blessures qu’il a subies, notamment à la cuisse droite, continuent de lui faire mal.

De retour du tribunal, Mamadou Yahya Petel Diallo et Thierno Hamidou Barry pour Guineematin.com 

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