SEM Alexey V. Popov à Guineematin.com : « de nombreuses entreprises russes manifestent un intérêt pour travailler avec la Guinée »

« Au total, l’URSS a construit plus de 40 sites d’infrastructure en Guinée, ainsi qu’un réseau de routes et de voies ferrées. Par exemple, saviez-vous que l’Université Gamal Abdel Nasser de Conakry, a été construite par l’Union Soviétique ? Vous pouviez le deviner en regardant son architecture, ainsi que la mosaïque sur sa façade ; c’est un exemple frappant d’un style artistique appelé « réalisme soviétique ». En outre, avec l’aide de l’URSS, le stade central de Conakry a été érigé. Ce n’est un secret pour personne que le football est une vraie passion pour le peuple guinéen et pour l’Afrique en général. Nous sommes heureux que ce stade reste aujourd’hui un endroit préféré pour faire du sport chez les guinéens. Aussi, la partie soviétique a construit à Conakry le bâtiment de l’hôtel qui s’appelle aujourd’hui « Palm Camayenne », la station de radio et plusieurs autres sites », a notamment expliqué à Guineematin.com Son Excellence Alexey V. Popov, l’Ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire de la Fédération de Russie en République de Guinée.

Ci-dessous, Guineematin.com vous propose l’essentiel de cet entretien :

 

Bonjour votre Excellence. Merci d’avoir accepté de recevoir Guineematin.com chez vous. Tout d’abord, la Russie et la Guinée sont liées par de longues années de coopération. Mais, comment décririez-vous les relations bilatérales entre nos deux pays de nos jours ?

Vous avez raison, nos deux pays sont liés par une longue histoire d’amitié. Tout d’abord, il faut souligner que notre pays, qu’il s’agisse de l’Empire Russe avant 1917, puis de l’Union Soviétique avant 1991 ou de l’actuelle Fédération de Russie, n’a jamais eu de colonies, y compris en Afrique. Au contraire, la Révolution russe d’octobre de 1917 et puis la victoire de notre pays dans la Seconde guerre mondiale ont conduit à l’effondrement du système colonial mondial, à l’émergence de mouvements de libération nationale dans de nombreuses colonies en Asie, en Afrique et en Amérique latine et à leur indépendance. C’était l’URSS qui les a aidés à construire une base logistique et technique pour un développement indépendant ultérieur, à créer leurs propres économies, à développer la science et la culture.

L’URSS et la République de Guinée ont établi leurs relations diplomatiques en 1958, deux jours seulement après l’acquisition de l’indépendance de la Guinée de ses colonisateurs. Ainsi, notre pays a été à vos côtés dès les premiers pas de la Guinée en tant qu’état souverain indépendant. Il n’est pas exagéré de dire que la République de Guinée est un partenaire éprouvé de la Russie en Afrique. Les traditions d’amitié et d’assistance mutuelle établies dans les premières décennies qui ont suivi l’indépendance de la Guinée continuent de guider nos relations aujourd’hui.

— Dites-nous plus en détail, quelle a été l’aide de votre pays au début de l’indépendance de la Guinée ?

Comme vous le savez, la Guinée est devenue l’un des premiers pays d’Afrique à accéder à l’indépendance de la France. En représailles, avant de partir, les colonisateurs ont détruit les infrastructures qu’ils avaient construites et établi un blocus économique du pays. En plus, en 1959, les services de renseignement extérieur français ont tenté de mener une opération visant à déstabiliser le jeune état africain et à renverser son premier président, Ahmed Sékou Touré.

Dans le contexte de la politique destructrice de l’ancienne métropole, Ahmed Sékou Touré a demandé l’aide de l’Union Soviétique. Avec l’appui de notre pays, des infrastructures civiles essentielles ont été reconstruites en Guinée. Les experts soviétiques et russes ont réalisé des travaux topographiques à grande échelle et plus de 2 400 hectares de terres agricoles ont été cultivés.

Il est particulièrement agréable de savoir que cette base importante, qui a été créé ici à l’époque de l’URSS, n’a pas été seulement préservée, mais continue de servir aujourd’hui les intérêts des guinéens.


— De quoi parlez-vous précisément ?

Au total, l’URSS a construit plus de 40 sites d’infrastructure en Guinée, ainsi qu’un réseau de routes et de voies ferrées.

Par exemple, saviez-vous que l’Université Gamal Abdel Nasser de Conakry, a été construite par l’Union Soviétique ? Vous pouviez le deviner en regardant son architecture, ainsi que la mosaïque sur sa façade ; c’est un exemple frappant d’un style artistique appelé « réalisme soviétique ».

En outre, avec l’aide de l’URSS, le stade central de Conakry a été érigé. Ce n’est un secret pour personne que le football est une vraie passion pour le peuple guinéen et pour l’Afrique en général. Nous sommes heureux que ce stade reste aujourd’hui un endroit préféré pour faire du sport chez les guinéens.

Aussi, la partie soviétique a construit à Conakry le bâtiment de l’hôtel qui s’appelle aujourd’hui « Palm Camayenne », la station de radio et plusieurs autres sites.

— Et aujourd’hui, on en est où en termes de la coopération économique ?

Le domaine clé de la coopération économique entre la Russie et la Guinée est l’exploitation minière. La plus grande société russe représentée ici est RUSAL, qui possède trois entreprises dans différentes parties du pays. Depuis plus de 20 ans de travail en Guinée, RUSAL a investi plusieurs millions de dollars dans l’économie locale, notamment en modernisant une usine unique de bauxite à Fria. La société russe « Nordgold » qui travaille dans le secteur de l’extraction de l’or est également représentée en Guinée. Ces entreprises contribuent au développement du pays par des déductions fiscales au budget national, la création d’emplois et d’infrastructure sociale — maisons, écoles, hôpitaux — dans les régions.

En plus, les entreprises russes ne restent pas à l’écart en période de crise, comme ce fut le cas, par exemple, après l’explosion et l’incendie du dépôt de pétrole de Kaloum.

— De quoi s’agit-il ?

RUSAL a été parmi des premiers à répondre à l’appel des autorités guinéennes pour apporter une assistance médicale aux blessés lors de l’explosion du terminal pétrolier de Conakry. Le jour de l’incident, la société a rapidement acheminé du matériel médical d’une valeur de 10 millions de francs guinéens à l’hôpital situé dans le quartier Donka de Conakry et les médicaments pour un montant de 80 millions à l’hôpital Ignace Deen. En plus, RUSAL a préparé un don de 25 mille dollars au Gouvernement de la République de Guinée composé de kits de vêtements de travail pour les pompiers guinéens qui s’occupaient directement de l’extinction de l’incendie.

 

— Ce n’est pas la première fois que la Russie soutient la Guinée pendant des temps difficiles ?

Oui, c’est vrai. Ce n’est pas la première fois que la Guinée est confrontée à de graves crises humanitaires et ce n’est pas la première fois que la Russie vient en aide à un peuple ami.

RUSAL a été l’une des premières entreprises privées à aider l’Afrique en matière de la lutte contre les maladies infectieuses de masse. Ainsi, en 2015, lors de l’épidémie d’Ebola cette société a construit dans la région de Kindia un Centre de recherche en épidémiologie-microbiologie et des soins médicaux (CREMS), qui pendant la pandémie de COVID-19 recevait des patients avec un diagnostic confirmé de coronavirus. Également, en juin 2020, RUSAL a réalisé en 21 jours un nouveau Centre multifonction à Fria en vue de renforcer le système sanitaire guinéen.

De plus, en juillet 2020, RUSAL a affrété un avion-cargo humanitaire médical pour livrer en Guinée une cargaison médicale dans le cadre de son action contre la propagation de la pandémie de COVID19 en Guinée. La cargaison comprenait des dizaines de types de médicaments, ainsi que du matériel médical de pointe et des consommables pour le traitement des patients atteints d’infection de coronavirus. En novembre 2020, RUSAL a remis à la Guinée deux nouvelles ambulances dotées d’équipements de pointe, y compris des ventilateurs destinés à fournir des soins médicaux d’urgence et à assurer la réanimation des patients et en mars 2021, cette société a organisé la livraison de 10 000 doses du vaccin russe contre le COVID-19 « Spoutnik V ».

La coopération humanitaire entre les pays est vraiment importante à préserver et à multiplier, car derrière chacun de ces chiffres se trouvent la santé et les vies des personnes sauvées des maladies les plus graves.

— Y a-t-il d’autres domaines de coopération entre la Russie et la Guinée qui ont été lancés dans les années soviétiques, mais qui restent toujours pertinents ?

Oui, bien sûr. Outre l’aide économique, notre pays est toujours prêt à contribuer au développement de la Guinée par la formation professionnelle.

Depuis plusieurs décennies, des générations de professeurs russes de médecine, de mathématiciens, d’ingénierie et de beaux-arts dispensent des formations dans les universités guinéennes. Leurs étudiants reçoivent des connaissances de qualité qui les aident à construire de brillantes carrières et à travailler pour le développement de leur Patrie.

Pendant plus de 65 ans de nos relations de coopération, des milliers de guinéens ont été formés dans des universités soviétiques et russes. La coopération dans ce domaine reste une priorité permanente pour nous. Des bourses d’études russes ont été reprises en 1996 ; et, à partir de là, nous augmentons leurs nombre chaque année afin que plus de guinéens puissent suivre des formations dans notre pays.

Il est particulièrement agréable de noter que les liens entre les guinéens et les russes ne sont pas interrompus après la fin d’études. De nombreux diplômés guinéens apprennent à leurs enfants à parler en russe et aspirent à leur donner l’opportunité d’obtenir également l’éducation en Russie. Et, nous apprécions ces liens. Par exemple, en mois de février dernier, on a organisé au sein de l’Ambassade des compétitions sportives avec la participation de diplomates russes, d’employés de RUSAL et de diplômés guinéens des universités soviétiques et russes, et c’est l’équipe guinéenne qui a remporté une brillante victoire dans le tournoi de football, montrant l’exemple d’une véritable fraternité sportive.

 

— On sait que la Russie possède l’une des armées les plus puissantes du monde. Votre Excellence, existe-t-il une coopération entre nos pays dans le domaine militaire ?

Depuis les premiers jours de l’indépendance de la Guinée, notre pays a aidé ce peuple ami à mettre en place une armée et des forces de sécurité capables d’assurer en plaine forme son indépendance et sa souveraineté, et a fourni des armes et du matériel militaires modernes.

En Russie, nous savons bien que sans une armée forte, il est impossible d’assurer la liberté, l’indépendance et le développement progressif pacifique du pays.

— Y a-t-il des options supplémentaires pour développer la coopération entre nos pays ?

Bien sûr, en plus des investissements financiers directs par le biais de structures commerciales, la Russie utilise d’autres canaux pour soutenir le développement durable de la société guinéenne.

L’une de ces options est la coopération par l’intermédiaire d’organisations internationales. Ainsi, en 2022, par l’intermédiaire du PNUD, la Fédération de Russie a continué de financer le « Projet d’appui au développement de l’aquaculture en Haute et en Moyenne Guinée » en y versant 1,5 million de dollars et le projet «YouthConnekt for Women » d’une valeur de 1,2 million de dollars qui visait à promouvoir l’entreprenariat féminin en Guinée.

En 2023, la Russie a fait un don en faveur de la Guinée sous forme d’aide alimentaire d’un montant de 2 millions de dollars. Nous prévoyons la livraison de ces produits cette année.

En outre, les ONG russes ne restent pas indifférentes au peuple ami de la Guinée. Il n’y a pas si longtemps la délégation de l’ONG russe « Al-Mansour » a visité la Guinée pour mettre en œuvre le projet « Les enfants de Tchétchénie aux enfants d’Afrique ». Ils ont acheté des médicaments, de la nourriture, des vêtements et des fournitures scolaires pour un montant total de presque 150 mille dollars et les ont ensuite transférés à l’école pour enfants aveugles, au refuge pour enfants albinos et à cinq établissements d’enseignement général.

— Comment voyez-vous les perspectives de développement de la coopération entre nos deux pays ?

Nous prévoyons de maintenir et de développer les domaines de coopération déjà traditionnels entre nos deux pays, mais nous n’allons pas nous arrêter là. De nombreuses entreprises russes manifestent un intérêt pour travailler avec la Guinée. Nous sommes toujours ouverts aux propositions et sommes prêts à faire tout ce qui est possible pour élargir la coopération dans divers domaines.

Entretien réalisé par Ibrahima Baldé pour Guineematin.com

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