Alpha Condé danse avec Koffi Olomidé : la colère de Fodé Oussou

« Le président Alpha Condé a une occasion à jamais, au début de cette année, d’essayer de faire un peu comme Cellou Dalein Diallo. Essayer d’inviter la presse autour de la table, régler les problèmes avec la presse… », a notamment Fodé Oussou Fofana, lors d’un entretien avec Guineematin.com hier.

Le Président de la République, Alpha Condé, son Premier ministre, Mamady Youla, le président de l’Assemblée nationale, Claude Kory Kondiano, ainsi que plusieurs autres personnalités guinéennes auraient participé au concert de l’artiste congolais, Koffi Olomidé. Et le chef de l’Etat aurait exécuté des pas de danse dans ce concert. Ce qui n’a pas laissé indifférent le vice-président de l’UFDG. Hier, mardi 02 janvier 2018, au sortir du déjeuner de presse offert par le chef de file de l’opposition, Dr. Fodé Oussou Fofana a dénoncé cette sortie et appelé le président guinéen à faire la promotion des artistes locaux…

Guineematin.com : nous sortons d’un déjeuner de presse pour le souhait des meilleurs vœux 2018. C’est une première chez l’UFDG ?

Dr. Fodé Oussou Fofana : je pense que ce déjeuner de presse est à l’initiative du président Cellou Dalein et de son épouse qui ont bien voulu inviter les journalistes de notre pays…

La première où la deuxième épouse parce qu’il a deux maintenant ?

Dr Fodé Oussou Fofana : Son épouse Hadja Halimatou Dalein Diallo. Il a eu l’occasion de présenter non seulement ses vœux ; mais, il a aussi dit, au nom de l’UFDG, notre détermination d’accompagner la presse. Notre détermination d’être du côté de la presse dans le combat pour l’instauration de la démocratie dans notre pays. Quand on a envie de tuer la liberté, la démocratie, il faut s’attaquer à la presse. Je pense que c’est une occasion aujourd’hui encore de dire à la presse que nous sommes vraiment déterminés à l’accompagner en disant à monsieur Alpha Condé et à son régime que ce n’est pas la peine d’essayer de museler la presse. S’ils essayent, ils trouveront l’UFDG sur leur chemin.

Deuxièmement, c’est de féliciter cette presse. Quoi qu’on dise, sur le plan africain, nous pouvons être fiers de notre presse. Nous avons des journalistes de qualité qui sont reconnus au-delà de notre pays, même sur le plan international par la qualité du travail qu’ils font. C’est une fierté. Mais, c’est aussi une occasion, comme l’a dit le président Cellou, de mettre une image à chaque nom. Il y a certains journalistes qu’on connaissait de nom mais pas physiquement. On a eu l’occasion d’échanger en frères, parler de la Guinée, de notre pays. Et, le président Cellou a pris aussi l’engagement que cela va être maintenant une tradition. Chaque année, il aura l’occasion d’inviter la presse. Et, j’ai ajouté qu’en 2020, ce ne sera peut-être pas à la maison ; mais, à Sékoutouréya. Cela va continuer comme ça. Donc, pour nous, il fallait vous féliciter, vous encourager et vous dire que nous sommes à vos côtés.

Un mot au gouvernement…

Ce que je veux par contre dire au gouvernement, au Président Alpha Condé, ce n’est pas la peine de continuer à intimider, à menacer, à traduire les journalistes devant les tribunaux comme on a vu pour le cas de Moussa Moïse Sylla de Espace FM. On s’est rendu compte que le dossier était presque vide, c’était une intimidation. Cette presse se bat. Il y a eu de sérieux problèmes au niveau de cette presse. Je pense à Chérif Diallo qui n’est pas là et on ne sait même pas où il est. Sa famille ne peut même pas faire le deuil parce que pour faire le deuil, il faut se rassurer que la personne est morte. On ne sait pas où est Chérif, il a disparu. On a vu des journalistes qui ont été bastonnés par les forces de l’ordre. Monsieur Alpha Condé doit donner un signal fort en expliquant à tout le monde que notre pays ne peut plus reculer, c’est-à-dire qu’on ne peut plus faire de ce pays ce que l’on veut. On a amorcé la démocratie et personne ne peut empêcher que cette démocratie s’exerce. Je pense qu’il a une occasion à jamais, au début de cette année, d’essayer de faire un peu comme Cellou Dalein Diallo. Essayer d’inviter la presse autour de la table, régler les problèmes avec la presse. Ce n’est pas gênant de faire son mea-culpa. Quand on n’a pas raison, il faut reconnaître ; rassurer la presse, créer les conditions pour que cette presse soit au même niveau que la presse au Sénégal. Je prends pour image la maison de la presse guinéenne. Je suis allé à Dakar et j’ai eu l’occasion de visiter la maison de la presse. Ça n’a rien à voir avec ce qu’on a ici. On a vu des journalistes ici mourir dans des conditions difficiles. Je pense à notre ami de bonheur FM, Rafiou Diallo qui a fait un accident sur la moto. J’ai vu des propriétaires de presse acheter du carburant pour allumer des groupes électrogènes, acheter des unités pour les sites internet, travailler dur jusqu’à tard pour répondre aux attendes des citoyens, des lecteurs, auditeurs ou téléspectateurs. Aucune condition n’est réunie pour les aider. Ce n’est pas parce qu’on donne des subventions qui ne correspondent à rien qu’on doit continuer à dire qu’on est en train d’aider la presse. La presse doit être responsable, jouer son rôle ; mais, le gouvernement doit être là. On ne peut pas faire une démocratie sans une presse libre. C’est le message que je voulais lancer au Président Alpha Condé. Il a l’occasion à jamais et il ne faut pas qu’il se gêne. Le Président peut inviter la presse à Sékoutouréya, discuter avec elle, mettre la balle à terre et faire son mea culpa. De toutes les façons, au niveau de l’UFDG, nous nous battrons pour la démocratie dans notre pays. Nous serons du côté de la presse. Nous ne disons pas que la presse doit nous soutenir. Elle joue son rôle et ne soutien personne. Moi, j’admire que je sois critiqué parce que la presse permet au moins de t’améliorer. Les gens qui te critiquent sont des gens qui t’aiment et qui veulent que tu avances. Tu ne peux pas dire que, je suis homme politique ; mais, je ne veux pas qu’on me critique, qu’on me dise ce que je n’aime pas. La presse est là pour ça. Elle est là pour défendre la liberté. Quand tu faillis, quelle que soit la position que tu occupes, la presse doit pouvoir te dénoncer. A ce niveau, je suis très fier. Chaque fois que je suis critiqué, je me dis que ça me permet de me remettre en cause et d’avancer. Je sais qu’au début, je n’étais pas comme ça ; mais, les gens m’ont critiqué plusieurs fois et j’ai tiré profit de ces critiques. Monsieur Alpha Condé doit accepter cela, c’est-à-dire accepter les critiques quand il y a la corruption, la mal gouvernance, l’impunité, les crimes, des projets comme Kaleta qui est un faux projet. Kaleta est saisonnier et tout le monde sait que c’est du mois d’octobre jusqu’au mois de novembre seulement. Ils ont fait un tapage là-dessus. C’est quand il y a l’eau que ça marche. Garafiri qu’on a voulu saboter, l’eau vient de Garafiri pour Kaléta. Aujourd’hui, après les deux jours pour les fêtes de fin d’année, on va encore tomber dans l’obscurité totale. Les fêtes sont terminées, ils n’ont pas les moyens. Kaleta, c’est la publicité pour monsieur Alpha Condé et chaque fois qu’il y a des élections, on nous chante quelque chose comme Kaléta. Bravo à la presse, nous disons que vous devez critiquer, être objectifs. On sait que vous faites correctement votre travail. Qu’on vous aime ou pas, il y a des relations que nous avons entre nous ; mais, il y a aussi des relations en tant que journaliste, vous devez critiquer le Président de la République.

Alpha Condé au concert de Koffi Olomidé…

Vous avez le droit de critiquer le Président de la République quand il va danser avec Koffi Olomidé. Moi, je dis que je ne suis pas d’accord, ce n’est pas sa place là-bas. Il ne doit pas aller danser avec Koffi Olomidé qui est aujourd’hui un artiste qui n’est même pas bien aimé dans son propre pays. Le Président de la République a beaucoup d’autres choses à faire que d’aller danser. Ça ne nous avance en rien. Quand on me dit que dans ce pays où il n’y a pas d’eau, pas d’électricité, le Premier ministre, le Président de la République et le Président de l’Assemblée nationale étaient tous en train de danser au moment où il y a des familles qui n’ont rien à manger. La mission présidentielle est importante. Nous ne pouvons pas accepter que notre Président continue d’aller dans les soirées pour rencontrer Koffi Olomidé. J’aurais souhaité qu’il aille peut-être organiser quelque chose chez lui pour appeler Kadé Diawara, et autres. Nous avons des gloires dans notre pays qui ont été abandonnées. Quand je pense au problème de ces anciens joueurs de Hafia ; par exemple, Papa Camara est entre la vie et la mort aujourd’hui. Personne ne s’en occupe. Kadé Diawara qui a été une grande dame sur le plan africain, aujourd’hui elle va dans les mariages pour demander de l’aumône. Pourquoi ne pas organiser des concerts et que le Président mette un budget important à la disposition de ces gens-là ? Pourquoi on va prendre des milliards pour faire la promotion de Koffi Olomidé ? Je ne suis pas d’accord et je suis très en colère. Je pense qu’on doit faire la promotion des guinéens et des artistes guinéens. On doit reconnaître les gens qui se sont battus pour ce pays. Je ne veux pas voir notre Président se photographier avec Koffi Olomidé. Je veux voir sa photo avec Kadé Diawara, Papa Camara, Petit Sory, Sékouba Bambino, je ne sais même pas là où il est ; mais, tous ces artistes qui chantent comme Brévété, Lama Sidibé, Binta Laaly Sow. Je veux que le Président de la République organise un concert avec ceux-ci. Ça nous coûte moins cher que de nous amener Koffi Olomidé qui ne peut même pas remplir une salle dans son pays. Voilà ce que je voulais dire.

Je dis encore une fois félicitation à la presse, nous sommes avec vous et nous serons des sentinelles pour la défense de la démocratie dans ce pays.

Propos recueillis et décryptés par Alpha Assia Baldé pour Guineematin.com

Tél. : 622 68 00 41

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