Quel sélectionneur pour le Syli A ? « Il faut voir du côté des expatriés… » (Thierno Saidou Diakité)

Thierno Saïdou Diakité, consultant sportif,

La Fédération guinéenne de football a procédé au lancement d’un appel à candidature pour le recrutement du prochain sélectionneur l’équipe nationale A. L’instance dirigeante du football guinéen précise que ce sont des candidats nationaux qui pourront postuler. Une mesure qui ne fait pas l’unanimité, notamment chez les observateurs avertis du football. C’est le cas du Consultant sportif Thierno Saidou Diakité qui aurait choisi un sélectionneur expatrié pour plus d’efficacité. Il l’a dit dans un entretien accordé à un reporter de Guineematin.com ce jeudi, 07 avril 2022.

Guineematin.com : dans l’appel à candidature récemment publié par la Fédération guinéenne du football, il est précisé que les candidats au poste de sélectionneur de l’équipe A doivent être de nationalité guinéenne. En tant qu’analyste sportif, quelle lecture faites-vous de cette exigence ?

Thierno Saidou Diakité : c’est vrai qu’il faut se réjouir du fait que dans quelques jours le Syli national va avoir une stabilité au niveau de l’encadrement technique. J’ai pris connaissance de l’appel à candidature lancé par le CONOR en relation avec le ministère des Sports. Il faut dire que moi, j’ai quelques réserves pourtant sur certains points. Le premier point, on demande aux futurs sélectionneurs de présenter un projet sportif sur deux ans. Moi, je dis qu’on aurait pu avoir une approche pour une vision jusqu’à 2026. En 2026 c’est la prochaine édition de la coupe du monde, nous sommes en 2022, il y a la CAN 2023 prévue en Côte d’Ivoire et probablement celle de 2025 en Guinée. Si le nouveau sélectionneur doit présenter un projet sur deux ans, ça veut dire qu’on n’intègre pas la CAN prévue en Guinée en 2025, ni la coupe du monde 2026. Alors à mon avis, il faut qu’on soit beaucoup plus ambitieux. Donc, je pense que cet appel à candidature présente quelques lacunes. La dernière réserve que je vais porter, c’est qu’on veut promouvoir le contenu local, c’est-à-dire le Guinéen. Mais est-ce que dans le lot des Guinéens qui vont postuler, on a cet entraîneur de très haut niveau qu’il faut pour reconstruire le Syli national ? Si vous suivez l’actualité, le dernier classement publié le 31 mars par la FIFA, nous sommes 15ème en Afrique, ça veut dire qu’on ne fait pas partie du top 10 du continent. On n’est pas dans l’élite du football africain. Alors est-ce que parmi le lot d’entraîneurs guinéens qui vont postuler, est ce que cet entraîneur qui sera choisi dans deux ans va nous permettre de réintégrer le top 10 du football africain ? Donc, nous ne sommes pas dans l’élite du football africain. Voilà les réserves que je porte sur l’appel à candidature et on va souhaiter bonne chance à celui qui va être choisi dans le comité de sélection.

Guineematin.com : pensez-vous que c’est une bonne chose de changer l’entraîneur à cette phase ?

Thierno Saidou Diakité : on a même retardé ! Moi, j’ai dit que dès après la CAN, on aurait dû prendre une décision. Parce qu’au mois de juin, sont programmées les premières journées pour les éliminatoires de la CAN 2023. Du 1er au 14 juin, il y aura 4 matchs à disputer et en novembre les 2 derniers matchs pour la CAN 2023. On a retardé ! La finale s’est jouée en février, en mars déjà on aurait pu lancer l’appel à candidature pour recruter l’entraîneur afin qu’il y ait le temps de poster son groupe et de programmer des matchs avant le mois de juin.

Guineematin.com : selon vous, ce changement est-il une bonne chose pour le football guinéen ?

Thierno Saidou Diakité : c’est une bonne chose. Au moins pendant deux ans, on aura une idée du staff technique du Syli national. Jusqu’à présent, il y a une instabilité. Kaba Diawara assure l’intérim encore ; donc, ça pose problème. Maintenant que l’appel à la candidature est lancé on sera situé sur l’encadrement technique du Syli national et les entraîneurs choisis vont travailler en toute tranquillité, sans pression, dont les projets nous seront présentés.

Guineematin.com : dans le communiqué, il est précisé que les candidats doivent être de nationalité Guinéenne. Qu’en pensez-vous ?

Thierno Saïdou Diakité, consultant sportif,

Thierno Saidou Diakité : je ne veux pas être dans la tête de ceux qui ont conçu cet appel à la candidature. Je me dis que peut-être qu’on veut choisir exclusivement des compatriotes pour ne pas les payer très cher. C’est vrai, les bons entraîneurs, les entraîneurs de haut niveau, ils coûtent chers. C’est ça la réalité. Donc, s’il faut payer par exemple 15 mille euros ou 20 mille euros à un expatrié ! Peut-être qu’on ne payera que 5 mille euros ou 10 mille euros à un Guinéen. C’est ce que je me dis dans ma tête, peut-être que je me trompe. Mais moi à mon avis, on aurait dû ouvrir et négocier avec un entraîneur dont le profil correspond à notre ambition.

Guineematin.com : pensez-vous que nous avons des sélectionneurs qui pourront envoyer cette équipe nationale là où nous souhaitons qu’elle soit ?

Thierno Saidou Diakité : il y a une brochette de sélectionneurs guinéens, il y a Djan bobo Baldé, il y a Kaba Diawara, il y a Lappé Bangoura, il y a Pablo Thiam… Attendons de voir quels sont leurs cursus et tout pour se prononcer. Moi, je souhaite que la Guinée soit dans l’élite du football africain. Je souhaite le meilleur pour la Guinée. Mon avis n’a pas été pris en compte. Moi, j’aurais opté pour un entraîneur de très haut niveau, c’est un expatrié. Pour un entraîneur de très haut niveau, il faut voir du côté des expatriés.

Guineematin.com : nous avons constaté qu’à chaque défaite du Syli national on a toujours tendance à changer d’entraîneur. Est-ce-que cela ne pourrait pas avoir d’impact négatif sur le football guinéen ?

Thierno Saidou Diakité : c’est pourquoi moi j’ai prôné qu’on se fixe un objectif pour 2026… C’est vrai, vous l’avez dit, tous les deux ans on change d’entraîneur. Et l’instabilité ne peut pas produire les performances qu’on souhaite. Il faut une certaine stabilité, une certaine constance et pour ça, il faut avoir un projet sportif bien conçu. Regardez le Sénégal ; plus de 6 ans, Aliou Cissé est à la tête de l’équipe nationale. Il a pris d’abord les Cadets, les Juniors, l’équipe olympique. Puis, il a été l’entraîneur adjoint et après on lui a permis d’entraîner l’équipe A. Donc, pendant 6 ans, il était avec l’équipe et il a les diplômes requis pour ça.

Guineematin.com : quelle est la recette aujourd’hui pour que le Syli national rehausse son niveau pour enfin remporter le trophée de la CAN ?

Thierno Saidou Diakité : il n’y a pas de secret. C’est le travail et la compétence. C’est pourquoi je reviens encore dessus, j’aurais souhaité qu’on recrute un entraîneur de très haut niveau qui va être une locomotive pour impulser ce processus de performances. Parce que la performance, ce n’est pas le hasard, c’est le fruit d’un travail bien fait, rigoureux, du sérieux qu’on apporte. C’est pourquoi, je souhaite que l’entraîneur qui sera choisi travaille dans le sens de la rigueur, du sérieux, et qu’il n’y ait pas de laxisme dans la sélection des joueurs, que les plus méritants puissent être sociétaires du Syli national et surtout qu’on ait des résultats.

Guineematin.com : au-delà de l’entraîneur, est-ce que les joueurs aussi ne doivent pas se sacrifier davantage pour faire mieux ?

Thierno Saidou Diakité : il faut que les joueurs fassent preuve d’engagement. Moi, j’ai dit après la CAN que nos joueurs ont démissionné. Parce que l’équipe nationale comme, on le dit, fait partie du patrimoine national. Il y a l’hymne national qui retentit, il y a le drapeau qui flotte dans le ciel du pays hôte. Donc, ce n’est pas donné à n’importe qui d’arborer le tricolore national, il faut faire preuve d’engagement, d’une mentalité de concurrent. Malheureusement, nos joueurs ont quelques fois démissionné et c’est bien dommage. C’est pourquoi je dis qu’il faut reconstruire le Syli national avec des joueurs engagés qui sont prêts à mouiller le maillot et à mourir pour le drapeau national. C’est pourquoi j’ai proposé qu’il y ait règlement intérieur, un code de conduite, à l’instar du règlement des ivoiriens. Ils ont fait signer à ceux qui ont été sélectionnés pour la CAN un engagement de jouer, de mouiller le maillot. Quiconque faillit à ce règlement, il est sanctionné par des amendes, on diminue sa prime.

Propos recueillis par Fatoumata Diouldé Diallo pour Guineematin.com

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