Meurtre de Mohamed Camara lors d’un conflit domanial à Coyah : les 3 accusés risquent la prison à perpétuité

Le procès qui oppose la famille Sacko de Manéah aux coutumiers de Friguiadi, dans la préfecture de Coyah, s’est poursuivi hier, lundi 27 février 2023, au tribunal de première instance de Coyah. Trois frères sont jugés dans cette affaire après l’assassinat de Mohamed Camara autour d’un bas-fond cultivable. Après les débats, le procureur a demandé la condamnation des 3 accusés à la réclusion criminelle à perpétuité, a constaté un reporter que Guineematin.com avait dépêché à Coyah.

Abdoulaye Idrissa Sacko, alias Razack ; Mohamed Langan Sacko, alias Ortega ; et Abdoulaye Babou Sacko, tous des frères d’une même famille, sont jugés assassinat, coups et blessures, violences et destructions. Ses deux jeunes frères étant en cavale, c’est Abdoulaye Idrissa Sacko, alias Razack, qui répond de ces faits.

À l’entame de l’audience, le tribunal a ordonné la déposition de trois témoins, malgré l’exception soulevée par l’avocat de la défense qui a dénoncé un vice de procédure

Djibril Sylla, chef du secteur Friguiadi Gare Kakoulima, dira ne pas savoir grand-chose de cette affaire. « Ce jour, j’étais chez moi avec la jeunesse de mon secteur. Entretemps, j’ai reçu un coup de fil de mon président de district de Friguiadi qui m’a demandé d’aller le représenter à une réunion à la préfecture. J’étais en cours de route quand j’ai été appelé par la gendarmerie, me disant qu’il y a un blessé avec eux qui serait lié à moi. C’est ainsi que je me suis rendu à la gendarmerie. Arrivé, j’ai aperçu Aboubacar Camara qui était grièvement blessé au niveau de ses pieds, il ne pouvait même pas s’arrêter sur ses pieds. Du coup, je l’ai pris dans ma voiture pour l’amener d’abord chez le président du district, puis dans une clinique pour son traitement. La descente de la famille Sacko à Friguiadi ne m’a pas trouvé là-bas. Ce sont les jeunes qui m’ont raconté ce qui s’est passé. C’est pourquoi, je ne peux pas dire qui a fait quoi au juste », a témoigné cet administrateur civil.

Kanké Touré quant à elle a juré avoir vu et reconnu l’accusé Abdoulaye Razack Sacko chez le chef secteur où le plaignant Naby Laye Soumaoro a été battu à sang. « Ce que je sais, c’est le cas de Naby Laye Soumaoro (plaignant). Ce jour, nous avons entendu ce problème entre Tafori (Manéah) et Friguiadi. Étant à la maison, on nous a appris que le jeune Soumaoro serait dans les mains des agresseurs. Connaissant l’homme, j’ai informé mon époux, il m’a dit d’aller voir si c’est bien lui puisqu’il est lié à ce dernier. C’est comme ça que je suis allé voir Soumaoro chez le chef de secteur Naby Sacko (dans la famille Sacko). J’ai trouvé que le vieux Lansana Sacko lui demandait où il habite et est-ce qu’il peut y aller. J’ai dit au vieux de me le remettre, moi je peux le conduire chez lui. C’est ainsi que j’ai pris Soumaoro. Il marchait difficilement, il a fallu que je mette sa main sur mes épaules pour qu’il puisse marcher. En cours de route, deux autres jeunes que je ne connaissais pas sont venus derrière nous avec des cailloux pour en finir avec lui. Je les ai menacés, ils ont rebroussé chemin. Je ne connais pas ceux qui l’ont bastonné, moi je suis venu le trouver en train de saigner partout sur le corps, dans la famille Sacko », a-t-il témoigné.

Enfin, Yamoussa Camara qui dit être lié aux accusés du côté maternel, a été à son tour entendu par le tribunal à titre de simple renseignement. « Ce jour, nous étions en réunion chez le chef du secteur. Au cours de la réunion, on a été attaqué, ils ont assiégé tout le secteur Kakoulima gare, ils ont arrêté certains d’entre nous. Quand ils ont pris Soumaoro, étant à distance, j’ai interpellé mon cousin Razack en lui disant que celui-ci ne faisait pas partie. J’ai bel et bien vu Abdoulaye Idrissa Sacko alias Razack, Babou, Mohamed Langan Sacko alias Ortega et Babou sur le terrain. Ils étaient armés de machettes, de gourdins, de couteaux… ».

Après la déposition des témoins de ce crime horrible qui a coûté la vie à Mohamed Camara, le tribunal a déclaré les débats clos pour donner place aux réquisitions et plaidoiries.

En prenant la parole pour ses plaidoiries, maître Abdoulaye Keita, l’avocat de la partie civile, a indexé l’accusé à la barre comme le véritable coupable des crimes commis ce jour et l’auteur principal de l’assassinat de feu Mohamed Camara. Pour la réparation, l’avocat dit n’avoir pas besoin du dédommagement pour ses clients, mais demande en lieu et placé l’application stricte de la loi.

Maître Abdoulaye Keita, avocat de la partie civile

« Les témoins sont venus dire à ici à la barre que Abdoulaye Razack était sur les lieux, les témoins ont dit avoir vu Razack avec les coupe-coupe et les machettes. Et une des parties civiles avait dit également à l’audience précédente que Razack était sur le terrain avec le coupe-coupe, que c’est le groupe de Razack qui l’a même frappé. Et, je pense que la décision du tribunal sera de mon côté parce que nous avons tous les éléments de preuve versés dans le dossier… ».

Dans ses réquisitions, le représentant du ministère public, en se focalisant sur la déposition des témoins qui se sont succédé à la barre ce lundi, a estimé qu’il n’y a pas de doute sur la culpabilité des accusés dans cette affaire. C’est la raison pour laquelle il va demander au tribunal de retenir les 3 accusés dans les liens de la culpabilité. Pour la répression, le procureur va requérir leur condamnation à perpétuité.

Pour l’avocat de la défense, il y a eu mort d’homme certes, mais à qui faut-il imputer la responsabilité ? En tout cas, selon Me Aboubacar Camara, ce n’est pas son client le coupable. C’est pourquoi il va demander son acquittement, non sans s’attaquer aux réquisitions du procureur.

Maître Aboubacar Camara, avocat de la défense

« Ce sont des réquisitions purement bancales, et ça ne me surprend pas, dans la mesure où elles s’appuient sur les plaidoiries de l’avocat de la partie civile. Lesquelles d’ailleurs n’ont pas contribué à faire asseoir la conviction du tribunal dans cette affaire. À la lumière des débats et des pièces versées au dossier, vous verrez qu’il n’y a aucun acte médico-légal qui atteste de la culpabilité de mon client concernant les faits de coups et blessures volontaires. Par rapport au fait d’assassinat, on confond mon client à Abdoulaye Sacko dit Rambo qui serait un de ses jeunes frères et qui a été interpellé à partir de Kindia par le canal de la gendarmerie. Toutefois, je reste confiant quant à l’issue de ce procès. Parce qu’il n’y a aucune preuve tant sur le cas d’assassinat que des coups et blessures contre lui », a laissé entendre l’avocat de Abdoulaye Razack Sacko à la sortie de l’audience.

Au terme des réquisitions et plaidoiries, le juge audiencier, Mohamed Kaba a mis le dossier en délibéré. La décision sera rendue le 13 mars 2023.

Malick DIAKITE pour Guineematin.com

Tél. : 626-66-29-27

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