Abdoulaye 3 Bah au procès du 28 septembre : « c’est le Colonel Tiégboro et ses hommes qui nous ont tabassés »

Abdoulaye 3 Bah, garde rapprochée de Cellou Dalein Diallo

C’est la troisième partie civile depuis le 3 mai dernier qui dépose à charge contre le Colonel Moussa Tiegboro Camara devant le tribunal criminel de Dixinn (délocalisé à la cour d’appel de Conakry). Abdoulaye 3 Bah, un des gardes rapprochés de Cellou Dalein Diallo, était à la barre hier, lundi 8 mai 2023, pour relater les faits qu’il a vécus et les violences dont il a été victime au stade du 28 septembre, le 28 septembre 2009. Et, dans son récit devant cette juridiction de première instance, il a martelé que c’est le colonel Moussa Tiegboro Camara et ses hommes qui les ont tabassés au stade du 28 septembre. Il jure que cet officier de la gendarmerie nationale est en amont et en aval des atrocités qu’ils ont subis, lui, Cellou Dalein Diallo et Bah Oury.

« Lorsqu’on rentrait, on a croisé le colonel Thiegboro sur la pelouse. Il a dit : Cellou c’est toi ça, je ne t’avais pas dit de ne pas venir ? C’est là que quelqu’un est le venu le terrasser, il est tombé. Mamadou Diouma est venu le soulever. Lorsqu’on rentrait, on a croisé le colonel Thiegboro sur la pelouse. Il a dit : Cellou c’est toi ça, je ne t’avais dit de ne pas venir ? C’est là que quelqu’un est le venu le terrasser, il est tombé. Mamadou Diouma est venu le soulever. A quelques mètres de là, ils ont administré un à Diouma, il est tombé d’un coup. Je l’ai dépassé pour venir vers Elhadj Cellou lui porter secours. A mon arrivée, un autre l’a assommé d’un coup de matraque sur sa tête. Le sang qui a giclé de sa tête m’a touché. Quand j’ai vu qu’il perdait conscience, je l’ai attrapé. On m’a roué d’un coup sur la tête, le sang a jailli. Bah Oury qui était derrière moi a eu le même sort.  Malgré tout, je n’ai pas cédé. J’ai tenu fermement Elhadj Cellou… Toujours dans notre marche difficile, je voyais ces individus poignarder des personnes. Il fallait voir pour croire. Là où on a subi tous ces sévices dans ce trajet, c’est le groupe du Colonel Thiegboro. Il n’a dit à personne d’arrêter. Il répétait sans cesse : Cellou je t’avais dit de ne pas venir ici, mais tu vas récolter le pot cassé. Je l’ai entendu répéter ça trois fois.

Dans son groupe, il y avait des bérets rouges, des bérets verts. C’est ce groupe-là qui nous a fait subir toutes ces atrocités jusqu’à notre sortie », a expliqué Abdoulaye 3 Bah.

Guineematin.com vous propose ci-dessous un extrait de cette déposition de Abdoulaye 3 Bah devant le tribunal criminel de Dixinn.

« Le matin du 28 septembre, nous sommes allés avec Elhadj Cellou chez honorable Jean Marie Doré. Tous les leaders se sont retrouvés là-bas. Et, quand nous avons pris le départ pour le stade du 28 septembre, nous sommes venus jusqu’à la fondis, on s’est rencontré là-bas avec le colonel Moussa Tiegboro Camara. Il a demandé où vont les leaders, ils lui ont dit que c’est au terrain. Il leur a dit : ne partez pas là-bas aujourd’hui, sinon ça ne sera pas bon. Il leur a aussi dit de rentrer et de reporter la marche. Mais, les leaders avaient déjà eu l’information selon laquelle deux personnes avaient été fusillées vers le pont de Madina. Mais, Elhadj Cellou a dit : comme les gens sont sortis, il faut qu’on laisse les leaders aller leur dire ce pourquoi ils leur ont fait appel. Tiegboro n’a pas accepté. C’est là qu’il s’est disputé avec Mouctar Diallo… Quand Tiegboro et ses hommes ont su qu’une grande foule de militants se dirigeait vers nous, ils ont pris leurs pick-up pour s’en aller vers la corniche. C’est ainsi que nous avons continué notre route. Mais, dans le tas, il y avait des policiers qui tiraient du gaz lacrymogènes. C’est comme ça que nous sommes allés jusqu’au stade… A l’intérieur du stade, il y avait des gens qui priaient, d’autres qui faisaient la fête. Mais, dès que le porte-parole a commencé son discours, nous avons entendu les crépitements d’armes. Il y a eu une débandade. Soudain, j’ai aperçu un groupe de bérets rouges surgir, il y avait des policiers derrière eux. Dans ce groupe de bérets rouges, il y en a un qui a indexé la tribune, en demandant qui étaient les gens massés là-bas. C’était le commandant Toumba. Il a hélé les leaders leur demandant de descendre et venir vers lui. Il avait demandé à ne pas les frapper. Il a insisté que c’est seulement les leaders, mais on ne pouvait rester parce que nous étions venus pour assurer leur sécurité.

Lorsqu’on descendait des tribunes, on a croisé un policier qui a pris Elhadj Cellou au collet et l’a giflé. Elhadj Cellou a répliqué en disant : ah bon ? C’est en ce moment que les amis de ce policier ont tiré sur un de nos collègues, Abdoulaye Sylla, au bras. Aussitôt, Elhadj Cellou nous a intimés de nous disperser de là. Mais, je n’ai pas pu quitter. C’est là où les leaders se sont séparés. Sur place, il restait Cellou, Bah Oury, moi et Mamdou Diouma Diallo et d’autres. Toumba avait amené les autres. On est venu jusqu’au portium. Je me suis incliné pour qu’Elhadj Cellou passe, Bah Oury est passé.

Lorsqu’on entrait, on a croisé le colonel Thiegboro sur la pelouse. Il a dit : Cellou c’est toi ça, je ne t’avais pas dit de ne pas venir ? C’est là que quelqu’un l’a terrassé, il est tombé. Mamadou Diouma est venu le soulever. A quelques mètres de là, ils ont administré un à Diouma, il est tombé d’un coup. Je l’ai dépassé pour venir vers Elhadj Cellou lui porter secours. A mon arrivée, un autre l’a assommé d’un coup de matraque sur sa tête. Le sang qui a giclé de sa tête m’a touché. Quand j’ai vu qu’il perdait conscience, je l’ai attrapé. On m’a roué d’un coup sur la tête, le sang a jailli. Bah Oury qui était derrière moi a eu le même sort. Malgré tout, je n’ai pas cédé. J’ai tenu fermement Elhadj Cellou. Ils sont venus lui donner un nouveau à la tête. Un autre a pris la crosse de son arme pour le frapper aux pieds.

Heureusement que ses pieds ne sont pas fracturés. Quand j’ai vu qu’il ne tenait plus, je l’ai pris pour le mettre sur mon bras. Pendant que je me débattais pour le faire sortir, un autre est venu avec son fusil pour viser sa tête, je l’ai stoppé de ma main qui s’est fracturée. C’est là où Bah Oury est venu m’aider. Il a tenu la main droite d’Elhadj Cellou. Pendant qu’on titubait pour sortir, Bah Oury disait : c’est un ancien Premier ministre, ne le bastonnez pas. Mais les coups tombaient sur nous… À un moment de notre marche, j’étais fatigué. Bah Oury m’a suggéré de le porter au dos. Il m’a aidé. Pendant qu’on cheminait pour la sortie, un autre est venu et a lancé : on t’a dit de nous laisser tuer ce monsieur, tu refuses mais on va te tuer avant de le tuer.

Toujours dans notre marche difficile, je voyais ces individus poignarder des personnes. Il fallait voir pour croire. Là où on a subi tous ces sévices dans ce trajet, c’est le groupe du Colonel Thiegboro. Il n’a dit à personne d’arrêter. Il répétait sans cesse : Cellou je t’avais dit de ne pas venir ici, mais tu vas récolter les conséquences. Je l’ai entendu répéter ça trois fois.

Dans son groupe, il y avait des bérets rouges, des bérets verts. C’est ce groupe-là qui nous a fait subir toutes ces atrocités jusqu’à notre sortie. Mais là aussi, on a croisé un autre policier qui m’a cogné avec son fusil, il m’a terrassé alors que je portais Elhadj Cellou. Le coup était si violent qu’on est tous (Moi, lui, Elhadj Cellou, Bah Oury) tombé… Alors qu’Elhadj Cellou était couché inconscient, un gendarme s’est jeté sur lui de toutes ses forces. C’est là qu’il a eu quatre de ses côtes cassées. Il a pris un bois de palétuvier rouge pour l’assommer. Bah Oury s’est interposé, en disant ne le tuez pas. Il s’est courbé sur Elhadj Cellou, il recevait les coups, Elhadj Cellou était couché inconscient. Ensuite, quelqu’un est venu avec son fusil, il a sorti sa baïonnette et m’a demandé de l’approcher. Il m’a fouillé et a pris mon téléphone, mon argent (130 000), ma montre, la clé de ma moto. Après, il nous a dit de sortir. Nous sommes venus jusqu’à la terrasse, nous avons trouvé un pick-up. Bah Oury a demandé de l’aide pour transporter Elhadj Cellou à l’hôpital. Dès que le gendarme a démarré, nous avons vu le colonel Tiegboro monter dans le pick-up. Je me suis dit : ah, on n’est pas encore sauvé. Quand on a bougé, j’ai pensé qu’on allait nous envoyer chez Elhadj Cellou. Mais, on est allé vers Donka. En cours de route, le téléphone de Tiegboro a sonné, je ne sais pas qui l’a appelé, mais j’ai entendu Tiegboro lui dire : je suis avec lui, pour lui c’est fini. Immédiatement, Bah Oury a dit : je vous avais dit de ne pas le battre, c’est un Premier ministre. Tiegboro a répliqué : si tu répètes ça je vais te mettre une balle dans la bouche. Nous sommes venus jusqu’au camp Camayenne, nous avons pris la corniche et nous sommes venus jusqu’à la clinique. Ils nous ont fait descendre là-bas… Mais, les médecins nous ont dit de sortir Elhadj Cellou parce que les militaires menacent de jeter des grenades sur la clinique. Alors, on a fait sortir Elhadj Cellou, il y avait des bérets rouges, Tiegboro nous a dit de le faire monter rapidement dans son véhicule. On l’a embarqué et Tiegboro nous a conduits au camp Samory ».

Propos décryptés par Mamadou Baïlo Keïta pour Guineematin.com

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