Écoles Emaüs, ANAFIC, l’ingénieur et les 851 millions de la fille du Pasteur : Sékou Léno risque 2 ans de prison

Les faits d’escroquerie et complicité poursuivis contre Sékou Léno, Mohamed Sylla Djenabou Diallo et Cie portent sur la somme de 851 millions de francs guinéens. Ils sont accusés d’avoir escroqué cet argent à Mme Marie Sossouadouno. Et, l’audience d’hier, lundi 19 juin 2023, devant le tribunal correctionnel de Kaloum a porté sur les réquisitions et plaidoiries dans cette affaire. Et, au cours de cette phase, le ministère public a requis 2 ans de prison contre Sékou Léno qu’il présente comme le principal acteur de cette escroquerie, rapporte Guineematin.com à travers un de ses journalistes.

Dans cette affaire, c’est un projet de construction d’une école qui a foiré. Ce projet était confié à l’ingénieur Sékou Léno, mais les travaux ont enregistré un retard qui a fini par agacer la propriétaire, Mme Marie Sossouadouno. C’est cette femme qui a d’ailleurs trimballé Sékou Léno et Cie en justice pour exiger le remboursement intégral de son argent.

A l’audience de ce lundi, c’est la partie civile qui a eu droit à la parole pour ses plaidoiries. Et, l’avocat est revenu sur la chronologie des faits.

« Monsieur le président, madame Marie est la fille d’un Pasteur. Elle a grandi à l’église et c’est dans ces conditions qu’elle a épousé un Pasteur qui est décédé. Son défunt mari qui avait entrepris la construction des écoles Emaüs. Après le décès de son mari, madame Marie et son fils ont décidé de continuer les œuvres de son mari. C’est dans ces conditions qu’elle a voulu construire une école. Et naturellement, ces constructions se font souvent avec des prêts bancaires. Elle a pris des emprunts chez des connaissances, des patrons. Puisqu’elle avait des difficultés à rencontrer son ingénieur pour faire le travail, elle a demandé à son comptable pour l’aider à trouver un autre ingénieur. C’est ainsi que ce jeune, Sékou Leno, a été mis en contact avec madame Marie. Les premiers montants sollicités ont été payés par madame Marie. Sékou Leno, ayant constaté que la banque était lente à décaisser de l’argent pour donner à Marie. Voilà Monsieur Leno qui vient dire à Madame Marie de collaborer avec ANAFIC pour la finalisation rapide de ses projets. Il a dit à Madame Marie que l’ANAFIC finance ces genres de projets. Il a dit qu’il a des gens à l’ANAFIC. C’est dans ces causeries que Mme Marie a eu la confiance et a commencé à payer les montants pour la construction de l’école. Il soutirait frauduleusement l’argent dans les mains de Marie au nom de l’ANAFIC. C’est ainsi que Madame Marie lui a demandé à ce qu’elle soit mise en contact direct avec les cadres de l’ANAFIC. Acceptant la demande de Marie de rencontrer les cadres de l’ANAFIC, il est allé recruter une équipe, il les a préparés, il les a fait venir sur le site de l’école au compte de l’ANAFIC. En faisant passer ses amis pour les travailleurs de l’ANAFIC, Djenabou Diallo a été présentée à Marie comme étant la Directrice de l’ANAFIC. La présentation a été faite sur place. Ça a été une mise en scène bien préparée et structurée. C’est un travail d’escroquerie qu’il a fait. Monsieur le président, c’est des gens qui méritent des punitions sévères. Il a amené cette dame à payer des montants depuis 2016 jusqu’en 2022, à chaque fois qu’il avait besoin d’argent pour ses propres services. Il a récupéré l’argent au nom de l’ANAFIC à madame Marie pour pouvoir bénéficier du financement de l’ANAFIC avec des fausses qualités. Il disait à Madame Marie que l’ANAFIC avait besoin des montants pour respecter les procédures de financement. Monsieur le président, quant au préjudice, il est d’abord moral. Ma cliente a été frappé moralement par quelqu’un d’une région commune qui est censé la protéger. Elle est atteinte moralement, c’est un chagrin pour elle. Au-delà de la souffrance morale, il y a la souffrance pécuniaire. En faisant l’addition des différents montants, on se retrouve à la somme de plus de 800 millions en espèce. Je vous prie en prononçant la décision de l’assortir par contrainte par corps. Nous vous prions en conséquence de recevoir Madame Marie, condamné Sékou Léno au paiement de la somme de 851 027 500 francs guinéens à titre principal. De les condamner tous solidairement à titre dommage et intérêt au paiement de 300 millions. En le faisant, vous aurez rendu justice à la partie civile », a plaidé l’avocat.

De son côté, le ministère public a requis 2 ans d’emprisonnement ferme contre le prévenu Sékou Léno qui est déjà en détention à la maison centrale.

« Monsieur le président, ces charges ont été débattues largement devant vous. Ces prévenus présents ici à la barre sont tous plongés dans cette affaire. C’est pourquoi nous requérons qu’il vous plaise de retenir les prévenus présents à la barre dans les liens de la culpabilité, condamner Mme Djenabou Diallo à un an assorti de sursis et Sékou Leno à 2 ans d’emprisonnement ferme et au paiement intégral du montant escroqué », a-t-il requis.

C’est une réquisition qui passe mal chez l’avocat de la défense qui argue que le délit d’escroquerie est non constitué.

« On veut dire qu’il a mis en place une équipe en place au nom de l’ANAFIC, ce n’est pas vrai. Les ingénieurs travaillent toujours avec une équipe sur le terrain. Un ingénieur a toujours un superviseur sur le terrain. Djenabou Diallo a été présentée à madame Marie comme superviseure. Tous les montants qu’elle est en train de réclamer étaient dépensés dans le cadre de la clôture des travaux. Il n’y a aucun doute sur la qualité de Monsieur Sékou. Il est ingénieur, il n’a jamais changé de nom. Il n’a jamais dit qu’il a quelqu’un à l’ANAFIC. À chaque fois que Madame Marie parlait au téléphone avec Djenabou Diallo, elle se présentait auprès d’elle en tant que superviseure, mais pas en tant que directrice adjointe de l’ANAFIC. Quand ces gens se sont présentés à madame Marie, est-ce qu’elle a demandé les pièces d’identification pour se rassurer avant de commencer à payer l’argent ? Cette infraction, c’est juste un montage. Vous ne pouvez pas payer un montant sans avoir aucun document attestant que ces gens travaillent à l’ANAFIC. Mon client n’a jamais utilisé une fausse qualité et aucune manière frauduleuse n’a été utilisée pour soutirer de l’argent à Madame Marie. Nous estimons au terme de notre plaidoirie que l’infraction d’escroquerie n’a jamais existé. Nous demandons la relaxe de mon client Sékou Leno pour délit d’escroquerie non constitué », a-t-il martelé.

À son tour de prendre la parole pour son dernier mot dans cette affaire, Sekou Leno a plaidé pour sa libération, tout en demandant ‘’pardon’’ au tribunal.

« C’est de demander au tribunal de me pardonner. Depuis que j’ai commencé ce travail d’ingénieur, je n’ai jamais eu de problème. C’est avec elle que j’ai eu des problèmes. Et je vous donne ma parole que ça sera la dernière fois que je sois devant un tribunal », a-t-il rassuré.

Finalement, l’affaire a été mise en délibéré pour décision être rendue le 31 juillet prochain.

Mohamed Guéasso DORÉ pour Guineematin.com

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