Procès du 28 septembre : un face-à-face tendu entre le colonel Tiegboro et le journaliste Amadou Diallo

La phase des confrontations se poursuit ce mardi, 23 avril 2024, devant le tribunal criminel de Dixinn (délocalisé à la cour d’appel de Conakry) dans le cadre du procès du massacre du 28 septembre 2009. Et, c’est le colonel Moussa Tiegboro Camara (un des accusés dans ce dossier) qui est toujours à la barre pour faire face à ses accusateurs. Mais, le débat s’est avéré plutôt tendu entre lui et le journaliste Amadou Diallo, ancien correspondant de la BBC en Guinée, a constaté Guineematin.com à travers un de ses reporters.

Le face-à-face entre ces deux hommes a démarré par la tentative (ou non) du colonel Moussa Tiegboro Camara de « dissuader » les manifestants de tenir leur meeting au stade du 28 septembre. Le journaliste Amadou Diallo persiste à dire que c’est après un « geste de la tête » du colonel Tiegboro Camara que les tirs de gaz lacrymogènes ont commencé. Mais, le mis en cause réfute catégoriquement ces accusations. a avoué avoir assisté à cet échange téléphonique qui n’a pas permis de reporter le meeting.

« Mon colonel, vous avez tenté de dissuader et non de sensibiliser cette foule de ne pas tenir ce jour-là le meeting. Et lorsque vous n’avez pas réussi à les dissuader et que les gens commençaient à contester vos propos, ça vous a énervé et vous avez fait un geste de la tête. Peut-être que c’était un geste inconscient, mais dès que vous avez quitté, les policiers et les gendarmes qui étaient là ont lancé les gaz lacrymogènes », a réitéré Amadou Diallo.

Depuis le début de cette phase des confrontations, le colonel Tiegboro Camara s’est toujours abrité derrière la presse pour bâtir sa défense. « Heureusement la presse était là dans son entièreté, elle a tout enregistré », n’a-t-il cessé de dire pour botter en touche toutes les accusations de menace, d’injures et d’outrage que des parties civiles tentent de lui coller à la peau. Mais, il a visiblement du mal à cautionner les témoignages des journalistes dont il a pourtant reconnu la présence au stade au moment où il était présent sur les lieux. Il vient même de qualifier les propos du journaliste Amadou Diallo de « chimérique » devant le tribunal.

« Vous (Amadou Diallo) êtes journaliste et moi je suis gendarme. Mes faits et gestes sont comptés et analysés minutieusement. Mon frère, il faut qu’on soit là pour dire la vérité devant ce tribunal. C’est pour l’histoire. Un geste ne signifie rien en commandement militaire. Si les policiers et les gendarmes avaient lancé des gaz lacrymogènes après mon départ, il ne faut pas oublier qu’avant mon arrivée aussi lancé des gaz lacrymogènes contre les gens. Donc, vous êtes seul dans votre propos un peu chimérique », a martelé le colonel Tiegboro Camara.

L’autre point qui a marqué cette confrontation entre cet officier de gendarmerie et ce professionnel de média a été la présence (ou non) du colonel Moussa Tiegboro Camara aux côtés du capitaine Moussa Dadis Camara (ex-président de la Transition guinéenne) quand celui-ci appelait Sidya Touré (le leader de l’UFR) pour demander un report du meeting qui était prévu par les forces vives au stade du 28 septembre le 28 septembre 2009. Le journaliste Amadou Diallo persiste à dire que le colonel Tiegboro a avoué avoir assisté à cet échange téléphonique qui n’a pourtant pas permis de reporter le meeting. Ce professionnel de média assure que l’audio de cet aveu existe et que le colonel Tiegboro était en train d’échanger avec les leaders politiques qu’il a fait cet aveu qui ne signifiait quasiment rien au moment des faits. Mais, le mis en cause réfute en bloc ces accusations.

« Ça ne vient pas de moi. Si toi tu as entendu comme ça, ce n’était pas moi, je n’étais pas là. Et l’audio a été écouté ici, personne n’a entendu Tiegboro dire : oui, j’étais à côté de Dadis pendant que le grand frère Sidya appelait. Donc, battons-nous ici pour aller vers la réconciliation nationale après ce procès. Et cela ne peut pas être obtenu si on ne dit pas la vérité. Parce que pour moi, on a pris ce procès comme un procès de témoins. Parce qu’il y a eu trop de faits dans ce pays, mais aujourd’hui nous sommes dans un procès qui va nous amener vers la réconciliation », s’est défendu le colonel Tiegboro Camara.

Face à la négation persistante de l’accusé, le journaliste Amadou Diallo a demandé au tribunal de faire rejouer l’audio déjà à sa disposition pour rafraîchir la mémoire au colonel Tiegboro Camara.

« Je souhaite vraiment que ce procès nous conduise à la réconciliation nationale. Mais si vous contestez le fait que vous ayez dit que vous étiez aux côtés du capitaine Dadis lorsqu’il a appelé monsieur Sidya Touré, moi je demande seulement au tribunal de rejouer cet audio », a dit Amadou Diallo.

Mais, le colonel Tiegboro Camara ne désarme pas. Au contraire, il s’attaque au journaliste et lui demande où se trouve son problème dans cette affaire.

« On ne peut pas être plus royaliste que le roi. Tibou était là, il a parlé. Dadis était là, il a parlé. Je n’étais pas là. Mais admettons que j’avais même dit cela, dès lors que moi-même je ne reconnais pas et que ceux qui étaient en communication disent que je n’y étais pas, où est ton problème ? Ce qui m’étonne dans cette affaire, chaque élément qui vient ici à son propos qui est propre en lui. Donc il faut arrêter, allons à la paix », a-t-il indiqué.

Et Amadou Diallo de rétorquer : « Sans la vérité ? »

Mamadou Baïlo Keïta pour Guineematin.com

Tel : 622 97 27 22

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