Ce que notre cher Abdoulaye Bah écrivait sur ses relations avec Nouhou Baldé

Depuis l’annonce de ce grave accident de la circulation, je n’ai pas eu le courage de faire mon boulot, ni d’ailleurs m’occuper de ma pauvre maman, venue de Télimélé pour se faire traiter…

Depuis que Moussa Moise Sylla m’a annoncé tôt dans la matinée d’hier au téléphone cette grave nouvelle : « le cas d’Abdoulaye Bah de Guineenews est très sérieux ! Il paraît qu’il est dans la salle de réanimation… », j’ai juste eu le temps d’annoncer la nouvelle avant de sortir du bureau, sans évidemment ajouter cette dernière précision pour ne pas affoler sa famille et autres proches. A l’hôpital sino-guinéen, toute la journée d’hier, à la morgue et à son domicile aujourd’hui, je revoyais des scènes partagées avec mon cher ami et frère en privé comme en public.

De retour ce lundi 18 juin 2018, j’ai été surpris de voir mon neveu, Ghadirou Baldé, absent du pays, republier (pour me présenter ses condoléances) un post de notre défunt ami qui relatait au grand public quelques souvenirs partagés que je vous propose ci-dessous, sans aucune modification, en reconduisant la même image :

« Dans la vie, chacun a son modèle. Le mien aussi, c’est celui-ci. Humain. Gentil. Disponible. On ne le sait qu’étant embêté. Ce jour-là, il sera là. Présent. Dépanneur. Actif. Natif de Télimélé, il est tel les fils de Pita. S’il dit oui, c’est oui. S’il dit non, c’est non.

Personnellement, je l’ai découvert dans les années 2000. A l’immeuble Baldé Zaïre. Le siège de L’Observateur. Je l’écoutais dans les radios. Je le lisais tous les lundis. J’aimais trop ses écrits. Depuis, il est devenu mon modèle. A l’époque, j’étais à la Fac.

Après mes études, je fis mes débuts à L’Observateur. Mais j’avais un problème les samedis. Jour du bouclage. Nouhou venait à 20h au bureau. Stagiaire, je n’avais pas le transport. Au lieu de bosser pour nous libérer tôt, il dormait d’abord. Il se réveillait. Il dormait encore. Or, je logeais loin. Et c’était imprudent de rentrer tard la nuit.

Au premier samedi, comme il se faisait tard, il nous acheta un poulet et des jus. Cela me motiva. Finalement, j’étais resté à ses côtés jusqu’à 7h. C’était son habitude. Quand il finissait, il me déposait à Hamdallaye. Là, il me donnait des billets pour faire mes courses le week-end. Grâce à lui, je n’ai pas connu la galère du reporter.

On se reprenait les lundis. J’étais pressé de le revoir. Quand on était ensemble, il nous invitait à manger. Il nous achetait à boire. Et quand il vous envoyait en reportage, il vous donnait le transport. Aller et retour. Il vous retournait chaque fois les jetons.

Mais il avait de ses attitudes, ça me donnait des vertiges. Un jour, j’ai couvert un dîner offert par des hollandais. Au retour à la rédaction, stagiaire, ne sachant pas quoi écrire, ni laisser, j’ai chuté en soulignant qu’on a mangé, bu des jus et pris des desserts.

Au bouclage, quand Nouhou lut mon compte-rendu, il ordonna d’écraser le papier. Avec un ton grave. J’ignorais si j’étais à terre ou au ciel. Mais en vérité, il blaguait. Je voulus lui dire la vérité mais j’eus peur. Lui aussi, vieux routier, comprit mon embarras.

Cherchant un coin isolé pour le lui parler, je le suivais comme un gendarme. Son pied, mon pied. Discrètement, il dit à Bakayoko de monter mon papier sans que je ne le sache. Le lundi, quand je vis mon papier, je ne savais quoi leur dire. J’étais aux anges.

Sept ans après, j’ai égratigné mon patron sur ma page Facebook. Quand il a lu mon post, il m’a invité au siège de son journal en ligne. A Kipé. Pour signer le cessez-le-feu et la trêve. Pour arroser ça, il m’a offert un Coca-Cola de 33 CL. Non glacé, je précise.

Merci patron. Que Dieu te bénisse, te protège et te grandisse. Mais je te préviens. Tu ne peux pas m’élever avec des poulets grillés et vouloir me faire taire avec un Coca-Cola. Non glacé aussi. Je rappelle tout ceci parce que je vais vous attaquer. A la guerre comme à la guerre. Donc, mobilise ta troupe. »

Après lecture de ce post, j’avais évidemment renoncé « à la guerre », complètement glacé par ce très gentil témoignage.

Dors en paix, cher ami et frère ! Que Dieu pardonne tes fautes, accepte tes prières et bénédictions ; qu’Il te réserve le paradis comme dernière demeure, amine !

Que le Tout Puissant Allah nous mette sur la bonne voie et nous pardonne avant de nous rappeler à Lui, amine !

Nouhou Baldé

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