Alpha Condé, 3ème mandat, alternance politique… un député du parlement de la CEDEAO s’exprime

Sâni Malan Boukary, 2ème Vice président du Parlement de la CEDEAO

Le Conseil national de la transition (CNT) a célébré son premier anniversaire, le lundi 5 février 2023. De nombreux invités venus des pays de la CEDEAO et d’ailleurs ont pris part à la cérémonie, présidée du Dr Dansa Kourouma. C’est le cas du Nigérien, Sâni Malan Boukary Chaibou dit Zilly, député au parlement de la CEDEAO, qui a pris la parole lors d’un débat qui a marqué l’événement. Dans son intervention, il a évoqué questions qui constituent encore des préoccupations dans la sous-région ouest-africaine, a constaté Guineematin.com à travers un de ses journalistes.

En marge de la célébration de son premier anniversaire, le CNT a organisé une plénière spéciale sur le thème : « Le parlement et la refondation de l’Etat ». A cette occasion, plusieurs différentes personnalités présentes à Conakry ont pris la parole pour apporter leur contribution. L’Honorable Sâni Malan Boukary Chaibou dit Zilly, 2ème Vice-président du parlement de la CEDEAO, en a profité pour déplorer le comportement de certains Chefs d’Etat des pays membres de la  CEDEAO.

C’est le cas de l’ancien président guinéen, Alpha Condé, qui fut un opposant historique, avant d’accéder au pouvoir en 2010. Considéré comme étant le premier président démocratiquement élu de la Guinée, il a été renversé par un coup d’État militaire, une année après avoir modifié la constitution pour s’octroyer un troisième mandat. Pour lui, les dirigeants doivent respecter la constitution de leur pays pour éviter des coups d’Etat ou des soulèvements populaires.

« Au Niger et en Guinée entre 2008 et 2009, nous avons connu des situations similaires. Alpha Condé en Guinée et nous au Niger, on cherchait le pouvoir. Nous étions de l’opposition…Lorsque le sommet de la CEDEAO a décidé de sanctionner les deux pays, les drapeaux des deux pays ont été retirés, nous étions contents. Et après, nous sommes arrivés aux affaires. Mais dix ans après, on commence à se tourner la tête, en se disant : nous, on ne peut pas mourir, on ne peut pas partir.

L’homme que vous voyez là, dès qu’il change de situation, devient incorrigible. Si ce n’est pas moi, il faut appliquer les textes. Vous voyez ce qui s’est passé au Burkina Faso. Le peuple se soulève et le Chef de l’Etat qui est renversé est le plus sécurisé. C’est ce qu’il faut éviter…Le peuple qui se soulève, c’est plus dangereux qu’un coup d’Etat. C’est le soulèvement du peuple qu’il faut éviter… La CEDEAO n’est pas sortie pour dire non. Mais elle a pris note pour dire qu’il faut organiser les élections », a-t-il expliqué.

Le parlementaire a aussi évoqué la question du Sénégal, où Macky Sall est soupçonné de vouloir briguer également un troisième mandat. Une question sur laquelle la CEDEAO ne s’est pas encore prononcée. « Au Sénégal, ce n’est pas parce qu’on ferme les yeux. Mais que dit la constitution du Sénégal ? La CEDEAO ne peut pas se lever d’abord pour dire non, il faut modérer vos interventions. Vous savez, lorsque le peuple refuse, cela s’est passé au Nigeria avec Good Luck Jonathan. Au Ghana aussi, le Président John Mahama était également à son premier mandat, ils sont tous partis.

En Sierra Léone, le Président sortant voulait passer la main à son parti, mais le peuple a décidé autrement. Souvent, il y a plein de contradictions, c’est le peuple qui s’est exprimé. La CEDEAO ne vous impose pas une constitution. Mais six mois avant les élections, vous ne pouvez pas la modifier, quelle que soit sa forme. Ça, la CEDEAO ne l’acceptera pas. Au Parlement (de la CEDEAO), les opposants togolais disent que le peuple ne veut plus de ce régime. Mais ce qu’on peut leur dire, c’est d’aller aux élections. Quand vous allez gagner et que le Président en place refuse de partir, il y a les moyens de le faire partir.

Quand le peuple guinéen décide de faire sa propre constitution, la CEDEAO prend note. Si vous décidez que celui qui est élu va rester mille ans, libre à lui dans ces conditions. Maintenant au Sénégal, Maître Abdoulaye Wade a tenté un 3ème mandat, il a été battu par Macky Sall, il est parti. Quand Macky Sall est venu, il les a piégés. Il a dit que le mandat c’est 7 ans, moi je veux le ramener à 5 ans. Nous, on le voyait venir mais personne n’a levé le petit doigt…Mais moi, je vous dire très sincèrement, c’est l’homme politique qui me fait peur », a laissé comprendre cet homme politique qui ne cache pas son soutien aux pays en transition.

Concernant l’économie, Sâni Malan Boukary Chaibou déplore la non application des règles d’intégration et la persistance de la corruption dans les pays de la sous-région. « Le Nigeria représente 60% de l’économie de la CEDEAO. Mais on nous empêche d’utiliser les instruments d’intégration à cause de la persistance de la corruption. Il n’y a pas de suivi. On voit un policier sur les frontières en train de faire du racket, personne ne lui parle. Nous avons une mission sur les frontières avec caméras cachées, on montre les images mais au lieu de le sanctionner, on le fait changer de lieu de travail…

Moi, je suis allé dans trois à quatre frontières. Je suis allé avec deux passeports. L’un est diplomatique et l’autre est ordinaire. Avec le passeport diplomatique, j’ai fait plus de 30 minutes d’attente. Je passe et je reviens avec le passeport ordinaire en y mettant 10 mille francs CFA à l’intérieur. Là, ne n’ai fait que 3 minutes. Le passeport a été cacheté et vite rendu. Voilà ce qu’il faut corriger. Un citoyen de la CEDEAO devrait se déplacer d’un pays à l’autre sans même se rendre compte qu’il a traversé la frontière », a souligné le 2ème Vice-président du parlement de la CEDEAO.

Abdallah BALDE pour Guineematin.com

Tél : 628 08 98 45  

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