Dixinn (Conakry) : bataille rangée entre jeunes et forces de l’ordre, plusieurs arrestations

Plusieurs centaines de jeunes de Dixinn port 3 (Dixinn OASIS), dans la commune de Dixinn, ont battu le pavé ce samedi, 25 février 2023. La démarche visait à protester contre la vente présumée de la maison des jeunes locale à un particulier. Après un face-à-face tendu entre jeunes et forces de l’ordre, plusieurs arrestations ont été enregistrées a appris sur place Guineematin.com à travers un de ses reporters.

De nombreux jeunes gens mais aussi des femmes de Dixinn Port 3 ont érigé des barricades sur les artères principales du quartier ce samedi matin. Ils exprimaient ainsi leur colère pour demander la libération de 5 jeunes interpellés mais aussi leur opposition à la vente présumée de la maison des jeunes de Dixinn par le maire à un particulier.

Repoussés dans le quartier à coup de gaz lacrymogènes par les agents de la police et de la gendarmerie pour rétablir la circulation, ces jeunes manifestants s’y sont retranchés où des échanges de pierres contre du gaz lacrymogène ont ponctué la matinée.

Mohamed Sylla, manifestant

Mohamed Sylla, manifestant et témoin de la descente musclée des gendarmes à 4 heures du matin, accuse le maire de Dixinn d’être à la base de la vente. « C’est à 4 heures 30 que les gendarmes sont arrivés ici. Il y avait un petit qui était couché à l’entrée de la maison des jeunes. Ils l’ont frappé, lui disant de sortir. Il y avait quatre autres personnes couchées à l’intérieur du bâtiment, qui ont été réveillées de leur sommeil pour être embarquées, y compris le petit là. A 5 heures, les gens se sont mobilisés pour demander la libération des 5 jeunes arrêtés. Mais tout cela est parti de la vente de notre maison des jeunes. Si vous nous voyez manifester aujourd’hui, c’est pour non seulement s’opposer à la vente de notre maison des maisons mais aussi réclamer la libération de nos amis arrêtés. Tous ceux qui sont interpellés là sont des innocents, ils n’ont pas été arrêtés en train de se battre. Et tant qu’ils ne seront pas libérés, nous allons continuer à occuper la rue », a-t-il expliqué.

Poursuivant, Mohamed Sylla est revenu sur la genèse de ce problème. « Au temps d’Alpha Condé, le président était venu ici en personne pour dire qu’il était prêt à rembourser celui qui a acheté cette maison pour qu’elle puisse revenir aux jeunes. Le maire Samba (maire de la commune de Dixinn, ndlr) était aussi venu avec l’actuel ministre de la Justice Charles Wright pour dire qu’ils ne sont pas au courant de la vente de cette maison. C’est le même maire qui est allé voir le ministre de l’Habitat, le Colonel Ibrahima Sory Bangoura, pour lui dire que la maison des jeunes n’est plus au compte de l’État. Ils ont emprisonné notre chef de quartier à plusieurs reprises pour le même problème. Depuis 1994, nous, on ne connaît pas de manifestation ici à Dixinn ; mais cette fois-ci, nous sommes déterminés », a-t-il martelé.

Hadja Mariama Camara, victime collatérale de la manifestation

Trouvée devant sa porte, Mamadie Camara, une vieille femme, s’insurge contre le fait que leur quartier soit assiégé par les agents des forces de l’ordre. Elle déconseille l’acheteur présumé de la maison des jeunes de laisser tomber l’affaire. « Ce bailleur doit laisser tomber cette affaire ; il n’a qu’à aller au Fouta pour acheter des domaines. Cette maison appartient aux jeunes. Un quartier ne peut pas rester sans lieu de loisir pour les jeunes. Dites au président Mamadi Doumbouya de nous aider. Depuis le matin, les agents ne font que gazer nos enfants dans les maisons, beaucoup de personnes se sont évanouies dans les concessions. Nous les vieilles personnes, nous ne savons plus à quel saint se vouer. Nous sommes assiégés et traumatisés par les forces de l’ordre », a-t-elle lancé.

Mme Mamadie Camara, citoyenne de Dixinn

Pour sa part, Hadja Mariama Camara, retraitée de son état, déplore la casse du portail de sa clôture à Dixinn port 2 par un pick-up de la gendarmerie qui pourchassait les manifestants dans le quartier. « J’étais avec mes enfants dans la cour. Quand ça a commencé à manifester dehors, moi je suis rentrée me coucher puisque j’avais le vertige. 5 minutes plus tard, j’ai entendu un bruit. Quand je suis sortie pour voir qu’est-ce qui ne va pas, j’ai vu qu’un pick-up de la gendarmerie est venu percuter le portail de ma clôture. Ils ont endommagé le climatiseur qui était fixé sur le mur, le portail et une partie de la clôture. En plus, ils nous ont traumatisés avec du gaz lacrymogène. Mon mari est décédé ainsi que 3 de mes enfants, je ne sais pas quoi faire. Je demande à l’État de réparer les dégâts causés. Je ne vais pas leur pardonner pour ça. Je suis à la retraite et mes enfants qui s’occupaient de moi sont décédés, je n’ai aucun moyen pour réparer ça », a déploré la bonne dame.

Au moment où nous quittions les lieux, aux environs de 13 heures, le calme était revenu et la circulation quant à elle avait repris peu à peu dans le quartier.

Malick DIAKITE pour Guineematin.com

Tel : 626-66-29-27

Facebook Comments Box