Procès des crimes du 28 septembre : à la barre, Mamadi Condé charge le Colonel Pivi

Le procès du massacre du 28 septembre s’est poursuit ce lundi, 17 avril 2023, devant le tribunal criminel de Dixinn, délocalisé à la Cour d’Appel de Conakry. Une nouvelle victime vient d’être appelée à la barre pour dire sa part de vérité dans ce dossier. Il s’agit de Mamadi Condé, qui dit avoir été blessé par balle au niveau de la poitrine par des gendarmes à Dixinn Oasis. Dans sa déposition, le plaignant a également chargé le Colonel Claude Pivi (ministre de la sécurité présidentielle en 2009 sous le régime du CNDD) qui selon lui, s’était opposé à leur évacuation à l’hôpital Donka.

Guineematin.com vous propose l’intégralité de la déposition de Mamadi Condé, victime du massacre du 28 septembre, qui fait face à présent aux questions des avocats :

Mamadi Condé, victime du massacre du 28 septembre 2009

« Le matin du 28 septembre, à 7 heures, on était au travail, je suis parti au café avec mon ami à Kénien. Je lui ai dit que je vais partir au stade, mais que je vais à Hamdallaye à la maison, et quand je quitterai là-bas, j’irai au stade. Arrivé au niveau du carrefour Concasseur, j’ai vu une foule et j’ai suivi cette foule, on est allé au stade ensemble. Arrivé à Dixinn Terrasse, j’ai trouvé Tiégboro là-bas. Il était en train de sensibiliser les gens pour leur dire qu’aujourd’hui, c’est la fête de l’indépendance, de retourner chez eux à la maison. Il y a quelqu’un dans la foule qui a répondu Tiégboro en disant : il ment, allons-y. Tiégboro a insulté ce dernier. Je l’ai dépassé, je suis rentré au stade.

Nous sommes restés au stade. Vers les 11 heures, ma maman m’a appelé en me disant de quitter le stade, sinon elle va me maudire… Donc de là-bas, je suis retourné. En sortant de la cour du stade, j’ai entendu des cris. J’ai escaladé le mur, mais je n’ai pas pu atteindre le portail. Mais, j’ai réussi à sortir de la cour du stade. Je suis venu jusqu’au niveau de la petite station qui se situe vers Belle vue, à Oasis. Là-bas, on a rencontré des gendarmes. Eux, ils ont tiré sur nous là-bas. Ils ont tiré sur 4 personnes. Moi, j’ai été transpercé par la balle. La balle m’a atteint au niveau de la poitrine pour ressortir au dos. La population nous a pris là-bas pour nous envoyer dans une cour dans le quartier. L’ambulance est venue nous chercher.

On était à terre là-bas, il y avait un blessé que les gens avaient mis dans l’ambulance. Mais Pivi est venu tomber sur cette scène. En disant non, vous ne montez pas. Qui vous a dit de sortir ? Est-ce que ça n’a pas été dit de ne pas sortir ? Les populations et les travailleurs de la croix rouge l’ont supplié. On était là-bas, environ 15 minutes, couché à terre. Le Colonel Pivi a accepté le pardon et on a été transporté à l’hôpital Donka. Il y a un Docteur que je salue, Monsieur Kaba. Il s’est très bien occupé de moi. Il m’a dit que si tu n’arrivais pas ici dans 10 minutes tu allais mourir. Parce que là où on nous avait pris, j’avais perdu assez de sang, je ne voyais plus maintenant. Lui, il s’est occupé de moi jusqu’à une semaine.

Même le jour où Dadis est venu nous rendre visite, je n’ai pas tellement remarqué ça. Donc, ce qui m’est arrivé c’est ça.

Je dois préciser que quand je sortais du stade, j’ai reconnu Toumba, il rentrait au stade. J’ai également reconnu les Colonels Tiégboro et Pivi au stade. Toumba poussait les gens pour entrer au stade. Tiégboro, lui, sensibilisait les gens pour dire de ne pas entrer au stade, de se retourner à la maison. Pivi, lui, disait aux agents de la croix rouge de nous débarquer de l’ambulance, de ne pas nous envoyer. Lui et ses gardes corps, ils étaient 4 personnes, mais ce ne sont pas eux qui ont tiré. Ce sont les gendarmes qui ont tiré sur moi. Jusqu’à présent, je n’ai pas encore recouvré ma santé. Et, je suis là pour demander justice », a-t-il déclaré à la barre.

Propos décryptés par Mohamed Guéasso DORÉ pour Guineematin.com

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