Clôture des débats dans l’affaire Kassory à la CRIEF : « ce n’est qu’une simple promenade », dit Me Sampil

Ibrahima Kassory Fofana, ancien Premier ministre guinéen

Comme indiqué dans une de nos précédentes dépêches, procès de l’ancien Premier ministre, Ibrahima Kassory Fofana, s’est poursuivi ce lundi, 17 juillet 2023, devant la Cour de répression des infractions économiques et financières (CRIEF). Mais, le prévenu a brillé à la présente audience par son absence. L’ancien chef du gouvernement guinéen serait encore malade et alité dans une clinique à Conakry, mais cela n’a pas empêché la Cour d’annoncer la clôture des débats dans l’affaire le concernant. Une affaire portant sur du détournement de deniers publics, blanchiment de capitaux et enrichissement illicite. Son avocat, Me Dina Sampil, a assimilé cette décision de la cour à « une simple promenade » judiciaire, rapporte un journaliste que Guineematin.com avait dépêché à la CRIEF.

A l’ouverture de l’audience de ce lundi, la Cour a constaté l’absence du prévenu Kassory Fofana à la barre. Et, à la suite de cette constatation, elle a donné la parole aux parties pour recueillir leurs avis sur cette situation. Et, c’est le ministère public qui a pris la parole en premier. Le procureur Aly Touré a déclaré que le refus de Kassory Fofana de comparaître devant la CRIEF est lié à « une mauvaise foi » et non à sa maladie.

Aly Touré, procureur spécial près la CRIEF

« Je n’ai cessé d’attirer l’attention de la Cour sur le fait que M. Kassory Fofana, admis à la clinique Pasteur depuis février 2023, a réagi à travers une tribune de près de 15 pages depuis qu’il a appris que son audience était programmée. Le résumé de cette tribune exprime clairement qu’il n’a absolument aucune confiance en votre Cour, et qu’en raison de cela, il ne comparaîtra jamais devant elle pour être jugé. Nous l’avons lue et comprise. J’ai remis une copie à la Cour pour qu’elle puisse constater ce que M. Ibrahima Kassory Fofana a dit et les mesures qu’il prend. Je vous ai toujours dit que sa non-comparution devant la Cour n’est pas due à sa maladie, mais à son refus catégorique et délibéré de se présenter devant votre Cour. Son médecin l’a affirmé. Il est lucide et répond de manière logique, comme vous avez pu le constater. À la question de savoir s’il peut venir ici pour répondre à vos questions, son médecin a dit que ce n’était pas à lui de décider, mais à M. Kassory Fofana lui-même. Cela signifie que le médecin sait qu’il peut venir, mais il ne peut pas l’y contraindre (à comparaître devant vous ici, à la barre). Seul M. Kassory Fofana peut en décider. Tout cela, Monsieur le Président, signifie que la non-comparution de M. Kassory Fofana devant votre Cour est uniquement motivée par la mauvaise foi. Il refuse catégoriquement de se présenter. C’est pourquoi j’ai toujours demandé à la Cour de passer à l’étape suivante, car la loi vous permet de juger quelqu’un conformément et conséquemment s’il refuse de comparaître devant votre Cour. C’est ce que j’ai demandé. Si votre Cour n’accepte pas cela aujourd’hui, nous souhaitons que cette affaire soit renvoyée au jeudi 20 juillet prochain pour qu’elle puisse être plaidée et que la Cour prenne la décision appropriée », a dit le procureur Aly Touré.

Abondant dans le même sens que le ministère public, la partie civile (représentée par l’agence judiciaire de l’Etat) a demandé à la Cour de constater le « refus catégorique » du prévenu de comparaître devant elle et d’ordonner le début des réquisitions et plaidoiries dans cette affaire. Me Amadou Babaein Camara a dénoncé « un affront » livré à la Cour par Kassory Fofana.

Me Amadou Babaein Camara, avocat

« L’agence judiciaire de l’État partage la même opinion que le ministère public. Nous étions ensemble à la clinique Pasteur et le patient (Ibrahima Kassory Fofana) qui était là est quelqu’un qui peut comparaître ici et être jugé. Les astuces qu’il a utilisées ne doivent pas tromper la Cour. Mais, je sais que grâce à votre vigilance, vous avez compris le jeu auquel il se livre pour ne pas comparaître devant vous Monsieur le Président. Donc, comme l’a dit le procureur, si M. Kassory Fofana ne se présente pas, je vous prie de renvoyer cette affaire à la semaine prochaine pour qu’elle puisse être plaidée. Parce que c’est un refus catégorique de la part de M. Kassory Fofana de comparaître devant votre Cour, et c’est un affront… Cette affaire ne doit pas rester en suspens en raison du refus du prévenu. Nous vous prions respectueusement de prendre les mesures appropriées pour que cette affaire puisse connaître une conclusion », a indiqué Me Amadou Babaein Camara.

Pour sa part, l’avocat de la défense, Me Dinah Sampil, n’a pas eu droit à la parole pendant cette audience. Mais, à la sortie, il a fait part de sa « grande déception face à la mascarade » qui s’est déroulée devant lui.

Me Dinah Sampil, avocat

« Aujourd’hui, je dois vous faire part de ma grande déception face à la mascarade à laquelle j’ai assisté. J’ai entendu le président poser la question au procureur spécial de savoir quelle conduite suivre, ce qui est surprenant. Un président d’une juridiction ne devrait pas demander à une des parties, en l’occurrence le procureur spécial, quelle conduite adopter, comme si cette partie décidait de tout et à laquelle il devait obéir. Ce n’est pas ainsi que cela se passe. Il aurait dû demander son avis sur mon exposé. Mais, la conduite à suivre, c’est comme si on imposait quelque chose qui doit être suivi. Et, cela s’est confirmé, parce que vous avez vu que la décision a finalement été prise uniquement sur les avis du parquet spécial. Toutes les demandes formulées par M. Kassory ont été rejetées sans motif. La demande d’évacuation a été rejetée, la contre-expertise (médicale) que la Cour de sa souveraineté a voulu que ça soit faite a été rejetée. Alors, finalement, qu’est-ce qui reste au prévenu Kassory comme droit dans ce procès, si tout ce qu’il demande doit être rejeté ? Enfin, je constate l’empressement affiché par le parquet d’aboutir coûte que coûte à la condamnation de monsieur Kassory que le siège vient d’entériner, puisqu’il a clos les débats et renvoyé le dossier pour réquisitions et plaidoiries. Ce qui est une simple promenade de santé qu’il va faire pour octroyer au parquet ce qu’il a toujours cherché, ce qu’il a toujours voulu, la condamnation d’Ibrahima Kassory Fofana pour des fins qu’il refuse d’avouer ici. Dans cette affaire, je ne peux pas plaider… Kassory est malade, il ne peut pas venir. On n’aurait dû me laisser prendre la parole pour rendre de la compréhension sur son état de santé et expliquer les motifs de la contre-expertise qui s’impose. Malheureusement, tel n’a pas été le cas », a réagi Me Dinah Sampil.

Mamadou Laafa Sow Guineematin.com

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