Hon. Sila Bah sur la crise du Front anti-accord : « il y a une manipulation » (interview)

Le coordinateur du Front National pour la Défense des Droits des Citoyens (FNDDC), Alpha Ibrahima Sila Bah se dit mal à l’aise face à la cacophonie qui prévaut au sein du mouvement. Dans une interview accordée à un reporter de Guineematin.com, ce mercredi 25 janvier 2017, le député pense que cette agitation n’a pas de sens et qu’elle serait le fait d’une main invisible. Mais pour lui, l’essentiel des efforts devrait plutôt être accordé à la défense du point 2 de l’accord politique du 12 octobre.

Décryptage !

Guineematin.com : le front dont vous êtes le coordinateur est aujourd’hui englué dans une crise. Comment vivez-vous cette situation ?

Alpha Ibrahima Sila Bah : je vis cette situation très mal. Mais, par ailleurs ça ne m’étonne pas. Puisque le point 2 de ce dialogue concerne un point fondamental pour la paix, parce que les partis politiques, s’ils veulent nommer les chefs de quartiers et de districts, ils transforment le pays en partis politiques. Or, un parti politique nomme ses responsables en son sein et non au sein de la nation. Ce qui est extrêmement important pour moi, c’est qu’au niveau de la base, il faut que les citoyens puissent élire directement un représentant tel que consacré dans la Constitution. Je pense donc, qu’il ne faut pas se laisser divertir par ce qui se passe. Ce qui a uni le front, c’est autour d’une idée maitresse qui est celle de lutter ensemble contre ces dispositions du point 2 de l’accord du mois d’octobre. C’est ce qui uni les gens et rien d’autre. Vous savez, dans ce pays, les gens ont cette capacité de toujours laisser de côté l’essentiel pour se focaliser sur ce qui n’est pas important. Parce que la lutte qui se passe actuellement au sein de ce front, il s’agit d’affaires personnelles.

Guineematin.com : il s’agit de Dr Faya d’un côté et de l’autre Abdoulaye Kourouma et Dr Ibrahima Sory Diallo n’est-ce pas ?  

Alpha Ibrahima Sila Bah : ça, c’est leur affaire. Ils n’ont qu’à régler leurs comptes entre eux et laisser le Front de côté. Nous avons constitué ce front pour défendre cette idée sur l’élection des chefs de quartiers et de districts. C’est le seul aspect qui justifie l’existence du Front et la défense du droit des citoyens à chaque fois que c’est nécessaire. Ceux qui partagent ce point de vue, le moment venu, ils pourront toujours se retrouver ensemble pour continuer la lutte. Ce qui se passe actuellement ne concerne pas le Front.

Guineematin.com : le fait que Dr Faya ait rencontré le président Alpha Condé sans pour autant avertir les autres membres du Front, est-ce que vous n’avez pas ressenti cela comme une sorte de trahison de sa part ?

Alpha Ibrahima Sila Bah : nous avons déjà discuté de ce problème avec Dr Faya. Il s’est largement expliqué sur la question. Le Front n’est pas en mesure de défendre ou d’empêcher quelque entité que ce soit de suivre le chemin que cette entité veut suivre. Ce qui uni les gens du front, c’est cette idée de se battre pour le point 2. Et tout le reste, c’est l’affaire de ces entités-là. Ils n’ont qu’à se battre entre eux là-bas comme ils veulent et qu’ils laissent le front tranquille. Parce qu’il y a un amalgame qu’on est entrain de faire pour distraire le pays par rapport à ce qui est essentiel. Ce qui est essentiel aujourd’hui, c’est la défense du droit des citoyens.

Guineeamtin.com : est-ce qu’en tant que coordinateur du Front, vous avez tenté de rapprocher les parties en conflit ?

Alpha Ibrahima Sila Bah : vous ne pouvez pas rapprocher des gens qui ne veulent pas se rapprocher. Et puis, la bataille se situe ailleurs, c’est une bataille entre eux.  Peut être que certains d’entre eux sont mus pas des forces que nous ne connaissons pas. Toujours est-il que c’est une décision d’essayer de saborder les efforts du Front. Mais, ils ne pourront pas saborder le Front.

Guineematin.com : pensez-vous qu’il y ait une main noire derrière, une main invisible qui tire les ficelles ?

Alpha Ibrahima Sila Bah : c’est certain. Ça, c’est évident parce que ce qui se passe là est une manipulation pour distraire le pays. C’est parce qu’il y a eu une unité d’actions au sein de ce Front et qui a permis de retarder le vote du point 2 de l’accord. Je pense que cela a inquiété beaucoup et ça a engendré des frustrations. Donc, on peut s’attendre à ce que ces forces externes essayent de manipuler les membres du Front. Nous n’allons pas nous exposer à cela.

Guineematin.com : il y a des membres du Front qui accusent Papa Koly Kourouma d’avoir proposé jusqu’à 50 millions de francs guinéens à certains élément du Front pour abattre Dr Faya. Qu’en dites-vous ?

 Alpha Ibrahima Sila Bah : je n’ai rien à dire là-dessus. Quand vous me parlez de l’accord politique, je vous répondrais. Mais de grâce, ne m’amenez pas  à parler de quelqu’un d’autre. Je n’ai jamais discuté avec Papa Koly. Pour moi, leur problème, ils n’ont qu’à le régler entre eux. Ça n’a rien à voir avec le Front.

Guineematin.com : où en êtes-vous alors avec le Front surtout qu’il se profile à l’horizon la session extraordinaire de février ?

Alpha Ibrahima Sila Bah : nous attendons qu’on nous dise que cette disposition va être représentée au niveau de l’Assemblée sous la forme telle que négocié pendant le dialogue ou si elle va être amendé. Donc, on attend cela avant d’aller de l’avant.

Guineematin.com : est-ce que vous êtes toujours optimiste par rapport au vote de ce litigieux point 2 de l’accord du 12 octobre ?

Alpha Ibrahima Sila Bah : je suis très optimiste parce qu’il s’agit de l’intérêt de la Guinée. Je suis certain qu’aujourd’hui dans beaucoup de quartiers et districts de notre pays, on ne veut voir parachuter des chefs de quartiers et de districts nommés par des partis politiques.

Guineematin.com : y a-t-il un danger lié à la nomination des chefs de quartiers et de districts par les partis politiques s’ils sont majoritaires ?

Alpha Ibrahima Sila Bah : le quartier et le district n’appartiennent pas à  un parti politique. Les responsables de ces quartiers et districts sont là pour régler les problèmes de la communauté, de la population à la base. Ils ne sont pas affiliés à un parti politique, c’est tout. C’est-à-dire que nous ne voulons pas balkaniser notre pays. Parce que c’est ce qui va arriver ici. Quand l’UFDG va nommer des chefs de quartiers, ceux qui leurs sont opposés vont s’ériger et dire que non, on n’accepte pas. Alors que si quelqu’un est élu par la population, personne ne va contester. Parce que si on veut la paix dans ce pays, vous avez déjà vu un avant goût à Kindiadi, dans Dubreka, on ne veut pas tomber dans cela. De grâce, essayons de nous concentrer sur ce qui est essentiel et qui est bon pour ce pays pour aller de l’avant. On a trop perdu du temps à dialoguer entre nous et à chaque fois remettre en cause les lois fondamentales de ce pays, remettre en cause  même la Constitution pour aboutir à des consensus politiques. Où est-ce qu’on va avec ça ? La Guinée ne peut pas être une République bananière, il faut qu’on soit géré par une Constitution et des Lois qui ont acceptées de tous. C’est tout.

Interview réalisée par Alpha Mamadou Diallo pour Guineematin.com

Tél. : 628 17 99 17

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