Déguerpissement des handicapés du Pont 8 Novembre : « les agents ont brûlé tous nos objets »

Comme annoncé précédemment, les personnes à mobilité réduite (les handicapés) qui avaient érigé domicile sous le pont 8 Novembre, à l’entrée de la commune de Kaloum, ont été déguerpies de force hier, lundi 26 avril 2021, par des unités mixtes de policiers et de gendarmes. Ces personnes vulnérables, qui vivent de la mendicité ont « tout perdu » dans cette opération au cours de laquelle leurs objets (notamment des habits) ont été calcinés par les agents, a appris un reporter que Guineematin.com a dépêché sur les lieux.

« Ils (les agents) ont brûlé, tous nos objets » ! C’est l’expression qu’on retrouve sur toutes les lèvres de ces handicapés qui viennent d’être déguerpis de leur crèche. Apparemment, ils ont été surpris par cette opération visant à les déloger du pont 8 Novembre. En tout cas, ils ne s’y sont pas préparés et beaucoup d’entre eux ont observé impuissant leurs objets brûler. Les agents déployés sur les lieux y ont mis le feu, sans aucune pitié.

Madame Mabinty Sylla, Handicapée

Mabinty Sylla, mendiante, a encore les larmes aux yeux. Elle a tout perdu et demande l’aide du ministère de l’action sociale. « Nous étions couchés quand un ami handicapé est venu nous dire qu’ils (les agents) sont en train de mettre du feu à nos affaires. Mais, je lui ai répondu qu’ils ne peuvent pas brûler nos affaires ici. C’est entre-temps que j’ai entendu le bruit du feu. Je leur ai dit alors de m’attendre pour que je fasse sortir mon argent. C’était l’argent épargné pour acheter la tenue de fête de mes enfants et notre manger. Je l’avais gardé dans un pagne que j’avais attaché. C’est le pagne dans lequel se trouvait l’argent là et d’autres affaires que j’ai fait sortir dehors. Malgré cela, ils n’ont pas hésité à mettre de l’essence pour allumer le feu sur mes affaires y compris tous mes habits. Aujourd’hui, je n’ai nulle part où dormir. Il faut que le gouvernement nous aide. Je demande au ministère de l’action sociale de chercher un endroit où nous recaser. L’autre fois aussi, quand ils sont venus, ils ont pris mes 5 millions », se lamente la mère de famille, assise à même le sol.

Tout comme Mabinty Sylla, Cellou Tounkara a perdu tous ses objets dans cette descente musclée des forces de l’ordre. Assis sur son petit vélo, il a regardé, la mort dans l’âme, les agents mettre le feu sur ses affaires (habits et autres objets). A part le t-shirt et le pantalon qu’il porte, rien n’a été épargné par les agents. Ils ont tout brûlé.

Cellou Tounkara, Handicapé, victime de déguerpissement

« Ils (les agents) sont venus ici le matin pour gâter nos bagages. Ils ont brûlé tous nos habits, tout ce que nous avions ici. Donc, avec ça, nous on a peur. On appelle au secours, on appelle à l’aide. Celui qui peut nous aider n’a qu’à nous aider à trouver une place. On lance un appel au ministère de l’action sociale pour nous aider à avoir une cité. Moi je n’ai pas perdu d’argent, mais on n’a pas pu faire sortir nos objets. C’est seulement le complet là que j’ai… Aujourd’hui, on se sent mal. Parce qu’ils ont brûlé tous nos objets. Ils n’ont pas frappé quelqu’un mais ils ont brûlé tout ce qu’on avait. On a vraiment honte de ça », a indiqué Cellou Tounkara.

A en croire ce handicapé-mendiant, c’est devenu une coutume pour les forces de l’ordre de venir s’en prendre aux personnes vulnérables (les mendiants) pendant le Ramadan à Conakry.

« Chaque mois de ramadan c’est comme ça. Les forces de l’ordre viennent nous déguerpir ici. On était dans la cité de Jean-Paul II de Taouyah. Ils nous ont chassés là-bas sous prétexte qu’ils sont en train de renouveler là-bas. C’est pourquoi nous sommes venus ici (sous le pont 8 Novembre). Et depuis ce jour, on n’a pas reçu d’appels. À la cité solidarité, il y a certains qui sont là-bas mais qui ne sont pas des handicapés », a confié Cellou Tounkara.

Mohamed Guéasso DORÉ pour Guineematin.com

Tel : +224 622 07 93 59

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