Conakry : première réaction de Fatoumata Bah, utilisée comme bouclier par des policiers à Wanindara

Fatoumata Bah, victime d’exactions de la police

Une mère de famille âgée de 26 ans, du nom de Fatoumata Bah, originaire de la sous-préfecture de Dara, dans la préfecture de Labé, a été humiliée, traînée et utilisée comme bouclier par des agents de la Compagnie Mobile d’Intervention et de Sécurité (CMIS). Les faits se sont produits dans la journée d’hier mercredi, au secteur 3 du quartier Wanindara, dans la commune de Ratoma.

La scène, filmée par des témoins et relayée sur les réseaux sociaux, a choqué les consciences. Dans une interview exclusive accordée à Guineematin.com, ce jeudi 30 janvier 2020, au lendemain de ce triste évènement, la nourrice a dit sa désolation face au traitement qu’elle a subi.

La malheureuse Fatoumata Bah a été agressée et utilisée comme bouclier par des agents de la CMIS, en marge des manifestations appelées par le Front National pour la Défense de la Constitution (FNDC). Les faits se sont produits alors qu’elle partait aux nouvelles de son beau-frère, Amadou Oury, touché plus tôt par un projectile lancé par les mêmes agents.

Interrogé par notre reporter, Fatoumata Bah a raconté sa mésaventure. « Hier, on m’a informé qu’un de nos proches a été tiré à Wanindara. Donc, je me suis précipitée pour aller aux nouvelles. J’étais en compagnie d’un vieil homme. A quelques pas de la maison du jeune touché par le projectile, le vieil homme et moi avons été arrêtés par des policiers qui étaient cachés derrière la clôture de la mosquée. Le vieux a été embarqué manu-militari dans leur pick-up. Moi, ils m’ont arrêtée et positionnée comme bouclier. Entre-temps, ils m’ont demandé d’où je venais. Je leur ai dit que je venais de l’hôpital car je suis malade et que je venais rendre visite à un blessé. Ensuite, ils m’ont dit que je mentais. J’ai répondu en disant que même si vous voyez mon physique, vous comprendrez que je suis maladive. Malgré tout, ils ne m’ont pas laissé. L’un me tenait de la main gauche et l’autre de la main droite. Ceux de derrière continuaient à lancer le gaz lacrymogène sur les enfants. Dans ce brouhaha, l’un d’entre eux me demandait de lui donner ce que j’avais sur moi comme biens. J’ai dit que je n’ai rien, car je viens de l’hôpital. Il s’est mis à me toucher sur tout le corps, à me fouiller alors que les deux autres me bousculaient et me traînaient par terre», a-t-elle expliqué.

Poursuivant, la mère de 5 enfants a indiqué que c’est seulement grâce à l’insistance des jeunes du quartier qu’elle a pu se faire libérer. Cependant, elle a dit avoir été blessée aux genoux. « Malgré mon insistance, les policiers n’ont pas accepté de me libérer. Heureusement, un des jeunes du quartier a dit qu’il me connaissait, qu’on est apparenté. C’est lui qui a mobilisé ses amis et ils ont pu chasser les policiers. Et donc, c’est suite à la course-poursuite entre les jeunes et les policiers, que ces derniers ne pouvant plus me tenir et attaquer les jeunes, m’ont laissé pour fuir. Cela, après m’avoir traîné pendant un long moment. Aujourd’hui, j’ai très mal. J’ai eu une entorse au niveau de mon pied droit et des égratignures presque sur toutes mes jambes ».

La pauvre dame n’a pas caché son indignation devant ce qu’elle a subi. Elle souhaite que justice soit rendue. « J’ai été désagréablement surpris par le comportement de ces policiers. Moi, je n’ai rien fait, j’étais juste de passage, je ne méritais pas cette humiliation, ce traitement dégradant et inhumain de la part de ces agents. Ces agents ne devaient pas être là où ils étaient. Leur place, c’est ailleurs et pas dans les quartiers. Le président de la République doit faire arrêter ces tueries, il doit faire arrêter ces humiliations dont nous sommes victimes de la part des forces de l’ordre dans nos maisons. Aujourd’hui, j’ai honte, ma dignité a été bafouée. Je suis une mère de famille, j’ai des beaux parents. Aujourd’hui, tout le monde, notamment ma famille, est témoin de cette humiliation dont j’ai été victime. Une humiliation à laquelle je ne m’attendais pas. Je ne pardonnerai pas ça. Je vais porter plainte contre eux à la justice dès que j’en aurai la possibilité », a-t-elle promis.

A noter que cet agissement des agents des services de sécurité est la suite d’une longue série qui cible les populations de la commune de Ratoma. Malheureusement, les agents bénéficient d’une impunité totale, garantissant la récidive.

Ibrahima Sory Diallo pour Guineematin.com

Tél. : (00224) 621 09 08 18

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