Les mots et les maux du ministre

Habib Yimbering Diallo
Habib Yembering Diallo

Cher ami,

Tu as sans doute suivi les derniers développements de l’actualité dans notre pays. Avec entre autres ce que nos détracteurs appellent l’échec de notre pays au fameux MCC. Notre pays a manqué son éligibilité à ce programme. Nous privons du coup d’une aide importante du pays de l’Oncle Sam. Se réjouir de l’échec de son pays est un comportement peu patriotique. Mais c’est désormais la triste réalité que nous vivions. Conséquences de l’imposition d’un système politique qui  ne correspond pas à nos mentalités. Je veux parler de la démocratie à l’occidentale qui a non seulement entamé l’unité nationale mais aussi mis à rude épreuve le patriotisme.

Mais mon sujet n’est pas la démocratie à l’occidentale ou à l’africaine. Je voudrais donc revenir à mon sujet. A savoir toute une série de revers diplomatiques pour mon pays. Or je ne t’apprends rien en te disant que cette situation me concerne directement. Toute d’abord, et tu as dû l’apprendre certains parlementaires du vieux continent ont exigé une sanction contre notre pays.

Pour leur part des organisations dites de défense des droits de l’homme s’insurgent toutes contre mon gouvernement. Que ce soit l’Amnesty international, human rights watch ou encore d’autres organisations africaines, toutes fourrent leur nez dans nos affaires intérieures. À voir ce qui se passe, on ne peut s’empêcher de penser qu’il y a un véritable complot contre notre pays qui est fomenté au niveau international.

Mais quand j’ai fait cette remarque devant ma femme elle m’a rétorqué que le problème ce n’est pas la communauté internationale. Selon elle le problème c’est nous-mêmes. A titre d’exemple, elle m’a rappelé que depuis que le monde est monde, les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets. Prenant l’exemple sur l’ancien régime, elle m’a fait remarquer que les mêmes organisations internationales dénonçaient sur tous les toits ce régime. Raison, selon, les prisons du pays étaient remplies à l’époque. Et, conclut-elle, ces mêmes prisons recommencent à se remplir.

Cette remarque, venant de ma femme, m’a rappelé ce que mon grand-père aimant me racontait chaque fois qu’il était aux prises avec grand-mère : à savoir quelle que soit la position sociale d’un homme, sa femme peut le rabaisser. Ma femme estime que la meilleure façon de faire taire les critiques à l’égard de mon gouvernement c’est de faire en sorte qu’il y ait zéro prisonnier politique dans le pays. Se pressant d’ajouter qu’il ne faudrait pas bien sûr que les tombes remplacent les prisons. C’est-à-dire qu’il ne faudrait pas que les exécutions sommaires remplacent les peines d’emprisonnement.

Estimant qu’il y a une part de vérité dans les observations de mon épouse, j’ai décidé d’interpeller mon collège de la justice. Pour le supplier de nous aider à sortir de cette situation. Vider les prisons. Et s’il faut les remplir, que les occupants soient des délinquants économiques. En effet, cher ami, il est quand même assez surprenant qu’après ce qui s’est passé ces dernières décennies, que notre pays n’enregistre aucun procès à caractère économique. Tous les procès sont à caractère politique. Cela veut dire qu’on peut se permettre de tout dès lors qu’on ne prétend pas au fauteuil du grand patron. J’ai demandé à mon collège de la justice d’agir. Et vite. Car la justice est à un gouvernement ce que le cœur, les reines et le foie sont au corps humain. Quand la justice est atteinte tout le gouvernement est atteint.

Il est fort à parier que si c’étaient les délinquants économiques qui étaient en prison, les organisations de défense des droits d’homme auraient plutôt applaudi. Mais elles savent que les infortunés, qui sont privés de liberté, n’ont commis qu’un crime de lèse-majesté. Comme pour s’opposer au premier mandat de la quatrième République ceux qui méditent à la maison centrale appellent le troisième mandat.

Bref, je voudrais peser de tout mon poids pour obtenir de mon collègue de la justice l’élargissement de prisonniers. Même si ses marges de manœuvre sont lui-même très limitées. Pour te dire la vérité, personne ne peut prendre la décision de priver la liberté à toutes ces personnalités sans l’aval du grand patron. C’est pourquoi le tollé suscité et l’unanimité qui se dégagent au niveau international est une bonne chose.  Tu seras surpris que ces propos soient tenus par un membre du gouvernement. Mais je dois t’avouer que je suis navré par la volonté de nous ramener dans les années de plomb. Notre pays ne mérite pas cela. Malheureusement au lieu de se regarder dans le miroir, de faire notre examen de conscience on use et abuse de la rhétorique Pdgiste en crirant au complot.

A ce sujet, quand j’écoute un chroniqueur d’une époque que je croyais à jamais révolue sur les antennes des médias d’Etat, je suis malade pour notre pays. À mon avis on ne devait en aucun cas permettre à cet homme qui a servi et s’est servi de tous les régimes de ravaler ses vomissures. Mais je dois, encore une fois, avouer que je ne reconnais pas mon patron. Pas plus tous ces jeunes qui, en permettant à ce vieux d’un autre âge de mettre à nu son indignité. Bref, je risque d’être pris pour un opposant. Je l’assume. Je suis un opposant. Mais pas contre mon président. Je suis plutôt un opposant contre un système qui se pérennise.

Pour terminer, je souhaite que nous nous œuvrions tous pour tenter d’apaiser la situation. Et la meilleure façon de le faire c’est de bien faire faire et de laisser dire. Je parie que si demain, tous les prisonniers politiques recouvrent leur liberté, si demain un véritable dialogue politique est amorcé avec l’opposition, la vraie pas celle qui est fabriquée, si demain certains opposants entraient dans le gouvernent nous allons faire taire toutes les criques que nous entendons aujourd’hui. C’est pour te dire que le problème ce ne sont pas les autres. Le problème de notre pays c’est nous-mêmes.

J’attends ta réponse et surtout ton commentaire pour envisager d’autres actions visant à redorer le blason de mon pays.

Ton ami le ministre

Habib Yembering Diallo, joignable au 664 27 27 47

Toute ressemblance entre cette histoire et une autre n’est que pure coïncidence

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