Meurtre du jeune Abdoul Karim Bah : voici le pathétique témoignage de sa grand-mère, Mme Binta Keïta

Comme indiqué dans nos précédentes dépêches, la manifestation organisée par le FNDC hier, jeudi 16 février 2023, s’est soldée par un bilan de deux morts et de nombreux blessés. Ibrahima Diallo et Abdoul Karim Bah (respectivement âgés de 16 et de 18 ans) allongent la macabre liste des personnes tuées lors des manifestations contre la junte du CNRD, dirigée par le Colonel Mamadi Doumbouya. Dans la matinée de ce vendredi, 17 février 2023, un reporter de Guineematin.com a rencontré Mme Fatoumata Binta Keïta, la grand-mère maternelle d’AKB.

C’est à Hamdallaye Pharmacie que le jeune Abdoul Karim Bah aurait reçu une balle sur la bouche aux environs de 15 heures, avant de rendre l’âme sur place, selon les témoignages.

Ce matin, Mme Fatoumata Binta Keïta a expliqué à Guineematin.com la manière par laquelle elle a appris la tragique mort de son petit-fils.

Abdoul Karim Bah, tué à Hamdallaye ce jeudi

« Hier, il a dit comme il y a une manifestation en haut là-bas de venir travailler par là ; donc, il est allé vers la route de Taouyah pour travailler. Après, il est revenu parce qu’il travaille jusqu’à 12 heures pour revenir se reposer. Un de ses oncles a demandé où était Karim, il n’est pas revenu. J’ai dit qu’il est revenu et qu’il est dans la maison. J’ai appelé Abdoul Karim pour lui dire que son oncle Souleymane l’appelait. Il est venu, ce dernier lui a demandé de l’accompagner à Taouyah. Il l’a accompagné à Taouyah, il a acheté ce qu’il voulait et ils sont revenus. Lorsqu’il est revenu, j’étais couchée dans la maison ; mais, tout mon corps me faisait mal. Alors, il a soulevé les rideaux pour dire qu’il souhaitait boire et il a dit « j’ai oublié que le frigo a été sorti d’ici ». Il est allé chez une des mes locataires ici, il l’a appelée mais sa petite sœur a dit qu’elle n’est pas là-bas. Il a demandé qu’on lui offre de l’eau à boire. Après, il a pris le bébé pour jouer avec lui. C’est là où je l’ai vu pour la dernière fois. Après, quand je suis sortie, on m’a dit qu’il est allé derrière là-bas. J’ai vu des gens courir, j’ai dit rentrons, ils sont dans le quartier, rendrons, faites entrer les enfants pour que je ferme la maison. Au moment où je le disais, j’ai entendu dire qu’il lui avait tiré dessus. Ils ont dit qu’ils ont tiré sur Karim Bah, Karim fils de Nénan Binta, ils lui ont tiré dessus. J’ai dit quoi ? Je me suis retournée. Puisque j’avais dit aux autres de rentrer, eux ils sont rentrés, j’ai fermé la porte. Mais, comme j’ai entendu qu’on lui a tiré dessus, j’ai préféré ouvrir pour rester dehors. J’ai couru pour demander ce qui se passait. Ils ont dit qu’on a tiré sur Karim, j’ai demandé à nouveau, ils ont dit OUI. Alors, j’ai demandé à quel niveau, certains ont dit que c’est sur la bouche. Je me suis assise, j’étais inquiète ; mais, je me suis dit peut-être que ça pourra se recoudre, même s’il aura eu une cicatrice. Je ne savais plus où j’étais. Alors, je me suis demandé comment Karim qui était là tout de suite a pu aller jusqu’à ce qu’on lui tire dessus. Après, Abdourahmane est revenu, je lui ai demandé s’il était mort, il m’a répondu qu’on lui a dit qu’il n’était pas mort. Mais, un des ses oncles a dit qu’il était mort. J’ai dit quoi ? Il a répondu qu’on lui a dit que Karim est décédé », a-t-elle expliqué, avant de fondre en larmes.

Interrogée sur la vie de son petit-fils, la vieille dame a indiqué que Karim n’avait aucun problème. Après l’hôpital Jean Paul II, le corps du jeune homme a été transporté à Ignace Deen où il est gardé à présent. Interrogée à ce sujet, sa grand-mère demande aux autorités de le rendre à la famille pour qu’il soit inhumé.

Mme Fatoumata Binta Keïta, grand-mère de feu Abdoul Karim

« Comme ils ont fini de le tuer, qu’ils nous aide à avoir le corps pour l’enterrer à cause de Dieu et son prophète Mohamed (PSL). Comme il est mort, ils ne peuvent le garder là-bas jusqu’à ce qu’il y ait quelque chose, ils lui ont tiré dessus, alors qu’il n’était pas à une manifestation, qu’ils nous rendent le corps pour qu’on l’enterre. C’est ce qu’on peut demander à l’Etat », a-t-elle sollicité.

Enfin, comme beaucoup de parents des victimes, Mme Fatoumata Kéita espère que l’auteur de ce crime payera un jour, si ce n’est pas ici-bas, ce sera à l’au-delà, devant Dieu.

« Que l’Etat nous vienne en aide parce que les enfants sont en train de mourir. Si tu n’as pas un enfant, tu ne peux pas avoir une grande personne. Qu’ils sachent que ces enfants sont aussi les leurs. Ils sont d’ici. Tous ceux qu’ils sont en train de tuer, c’est leurs petits-fils, leurs jeunes frères et leurs parents. Mais, celui qui l’a tué, comme il a fait exprès de lui tirer dessus, alors qu’il était courbé en train de se laver les mains, c’est là où il a tiré sur son visage, on ne le lui pardonne pas jusque devant le Créateur, Dieu. Le jour de la résurrection, si on va se voir et puisqu’il faut se voir là-bas, le jugement se fera entre nous là-bas ; car, il a ôté la vie de mon petit-fils qu’on m’a confié », a lancé Mme Fatoumata Binta Keïta.

Mamadou Yahya Petel Diallo et Ibrahima Bah pour Guineematin.com 

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