PROGRAMME MIDEXA : EXPLOITATION MINIÈRE ARTISANALE COMME INSTRUMENT DE LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ EN GUINÉE

1. Présentez-vous ?

DIABY Mamadou, Coordinateur de Programme Exploitation Minière Artisanale, Minéraux de Développement et le Suivi du Système de Certification du Processus de Kimberley au CECIDE.

Le CECIDE créer en 2000, intervient dans plusieurs domaines dont entre autres la Gouvernance minière ; la Santé et Education ; Ressources Naturelles ; Genre et Développement ; Agriculture et Sécurité Alimentaire ; Gestion des Conflits, Paix et Justice et l’environnement. Le programme MIDEXA a trois divisions : la division de l’exploitation minière artisanale de l’or, la division de l’exploitation minière artisanale du diamant, le suivi de système de certification du Processus de Kimberley et la division de l’exploitation des minéraux de développement.

2. Comment se présente aujourd’hui l’exploitation minière artisane de l’or et du diamant en Guinée ?

a. La division de l’exploitation minière artisanale de l’or ou l’orpaillage :

La production artisanale d’or est ancrée profondément dans la tradition guinéenne et occupe plusieurs dizaines de milliers de personnes. À ce stade, il est difficile, voire impossible, de donner une statistique réelle sur le nombre des exploitants artisanaux en Guinée, d’abord parce que l’activité n’est pas tout à fait cernée par le pouvoir public malgré les reformes engagés au sein du secteur. Ensuite, l’insuffisance des ressources nécessaires (humaines, matérielles…) complique davantage la compilation des données cohérentes dans le secteur. On constate néanmoins une augmentation démographique dans les différents sites miniers et l’ampleur du phénomène migratoire dû à l’orpaillage artisanal. Dans la zone spéciale de Kintinian par exemple, 75 000 personnes seraient engagées dans le processus d’après les estimations. Ces chiffres, même s’il s’agit pour le moment d’approximations mettent en évidence l’engagement des exploitants à travailler dans le secteur aurifère, malgré les graves conséquences sanitaires, voire mortelles, qui peuvent arriver : la grande majorité des exploitants artisanaux sont unanimes sur ces faits et la quasi-totalité de ces exploitants est venue des autres régions de la Guinée et de certains pays voisins comme le Mali, la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso, etc…. La principale région aurifère de Guinée est la Haute-Guinée (préfectures de Siguiri, Kouroussa, Mandiana, Dinguiraye, Kankan). On trouve aussi de l’or dans les zones de Fitaba (Mamou-Faranah), Sierra-Foré (Est de Kindia : conglomérats aurifères de Mambia, Or de Boko) et N’Zérékoré (Gama-Karana- Yomou).

b. La division de l’exploitation minière artisanale du diamant

Le potentiel de la Guinée a été estimé à environ 40 millions de carats, tandis que la capacité de production a été estimée dans une plage entre 480 000 et 720 000 carats par an selon l’étude sur le potentiel de ressources en diamants alluviaux et évaluation de la capacité de production de la Guinée (USGS). Contraire à l’orpaillage, le secteur minier artisanal du diamant est plus structuré, dynamique et est affecté par une variété de facteurs internes et externes. Les estimations du nombre d’artisans et les inconnues sur les gisements, comme la teneur, varient en fonction de chaque site et de chaque zone.

En 2009, un Arrêté du Ministre des Mines à légaliser l’exploitation artisanale des mines de diamants dans des zones spécifiques au sein de 11 préfectures. Ces préfectures comprenaient Kindia, Télimélé, Forécariah, Coyah, Kérouané, Kissidougou, Guéckédou, Macenta, Nzérékoré, Beyla, et Yomou. Une douzième préfecture, Boffa, fût également autorisée pour l’exploitation minière artisanale, mais cette zone est légalisée pour l’exploitation des mines de rubis et autres pierres précieuses (Ministère des Mines, de l’Energie et de l’Hydraulique, MMEH, 2009). Cet Arrêté Ministériel est la plus grande expansion des activités d’exploitation minière artisanale dans l’histoire de la Guinée.

Les problèmes de la pauvreté, de l’impunité, de l’instabilité politique, de la mauvaise gouvernance entraînant souvent des tensions ethniques et du chômage. Ces différents facteurs ont poussé de nombreuses familles guinéennes, à la recherche d’une vie améliorée, à travailler dans des sites d’exploitation minière artisanale au détriment d’autres secteurs d’activités (agriculture, pêche, élevage, etc.). Ainsi, certaines zones minières artisanale du pays, ont dû faire face à l’arrivée massive de chercheurs du métal jaune et du diamant estimé à plus d’un million, sans compter les ressortissants des pays limitrophes de la Guinée.

3. Le secteur des minéraux de développement n’est pas bien. Pourquoi ? et comment se présente ?

Les Minéraux de Développement sont constitués par un certain nombre de ressources minières généralement considérées comme à faible valeur, en raison de leur faible rapport prix-masse et leur valeur relativement faible sur les marchés des matières premières. Ils regroupent ainsi des minéraux industriels ; matériaux de construction ; pierres semi-précieuses et pierres ornementales, etc.) qui fournissent des intrants essentiels pour le développement économique national. En effet, les Minéraux de Développement Négligés constituent la « matière première de base » dans la construction des infrastructures, parfois dans la manufacture et l’agriculture. Le gravier, le sable et le granit sont par exemple indispensables dans la construction des routes et de l’habitat, bien que le marchand de sable ou de pierre (granit) ne bénéficie point de la même considération que l’industriel qui fournit au chantier le fer à béton ou le ciment.

L’exploitation des Minéraux de Développement peut avoir un impact considérable sur le développement de la Guinée. Le boom des infrastructures et l’urbanisation rapide sont les vecteurs d’une demande importante de matériaux de construction, de pierres de taille, de minéraux industriels et de pierres semi-précieuses. Il y a donc là un potentiel important en matière de développement, surtout au niveau local.

4. Pourquoi le Processus de Kimberley

L’origine du processus de Kimberley remonte à mai 2000, date à laquelle les pays producteurs de diamants d’Afrique australe se sont réunis à Kimberley, en Afrique du Sud, pour débattre des moyens à employer afin de mettre un terme au commerce des « diamants de la guerre » et pour veiller à ce que le commerce des diamants ne finance pas les activités de mouvements rebelles violents et de leurs alliés visant à déstabiliser des gouvernements légitimes.

Ce processus a été mis en place en 2003 par des États, des professionnels du diamant et des organisations de la société civile d’où un processus tripartite, pour mettre fin au commerce international des « diamants du sang ». Il vise à garantir au consommateur que les diamants qu’il achète ne sont pas des diamants bruts utilisés par les mouvements rebelles, ou leurs alliés, pour financer des conflits visant à déstabiliser des gouvernements légitimes.

Le CECIDE a organisé dès cette date un séminaire national à l’intention des acteurs du secteur. Il fait partir des quatre (4) premières organisations non gouvernementales africaines membres de la coalition internationale de la réunion du Processus de Kimberley qui continue l’application des décisions des autres pays africains dont le Congo, la Sierra Leone et l’Angola avec nos collègues du CANADA (IMPACT), la Grande Bretagne (Global Witness).

5. Comment vous vous positionnés à l’international ?

Le CECIDE est l’une des organisations de la société civile guinéenne de première classe qui a participé à la création et/ou à la mise en place de plusieurs initiatives internationales, régionales et nationales. Le Comité ACP-EU, la Coalition PCQVC, la Coalition sur PK, etc…
Au cours de la 7ème session plénière annuelle du SCPK, tenue à Swakopmund, en Namibie, en novembre 2009, une décision administrative (DA) concernant la Guinée a été adoptée. La DA de Swakopmund sur la Guinée a été le résultat d’inquiétudes concernant l’augmentation exponentielle de la production de diamants de la Guinée au cours des années 2007 et 2008. Grace au travail abattu par le CECIDE que la production et la commercialisation du diamant de la Guinée à éviter l’embargo. Ainsi, la DA a demandé que les autorités guinéennes relancent un système de contrôles internes, incluant l’arrêt des exportations de diamants bruts d’origine suspecte. Avec le passage de cette DA, le groupe de la plénière a conclu que des efforts supplémentaires devraient être effectués pour évaluer la capacité de production diamantifère de la Guinée (KPCS, 2009).

Par ailleurs, lors de la réunion de gestion du 23 juillet 2019, le Conseil Economique et Social de l’ONU (ECOSOC) a prouvé la recommandation du Comité chargé des ONGs visant à octroyer le Statut Consultatif Spécial à notre organisation, CECIDE. Ce qui nous donne la facilité de participer les travaux des Nations Unis, en particulier de l’ECOSOC et de ses organes subsidiaires.

6. Quels sont les principaux objectifs du programme MIDEXA ?

 Contribuer à la qualification de l’exploitation minière artisanale pour la réduction des inégalités et de la pauvreté ;

 Promouvoir l’exploitation des minerais de développement à la base pour stimuler le développement industriel et commercial, la création d’emplois locaux, particulièrement des jeunes et des femmes, dans le respect de la règlementation sanitaire et sécuritaire ainsi que la protection de l’environnement au travail et dans les zones minières.

 Contribuer à l’amélioration des revenus des artisans miniers ;

 Faire de l’exploitation minière une opportunité de développement pour les communautés résidentes ;

 Promouvoir les lois et droits des communautés résidentes dans l’exploitation minière.

 Assurer le suivi de la transparence dans l’exploitation minière en général (ITIEG, PK…).

7. Quelles sont les activités réalisées ?

a. Etudes de cas « bénéfice de l’exploitation minière artisanale du diamant sur les communautés » dont l’objectif est de montrer les faiblesses de la redistribution des revenus aux communautés issus de l’exploitation artisanale du diamant de la zone de Banankoro et de Binikala. Août 2020.
b. Sensibilisation et prise de conscience par les communautés frontalières au sein des pays membres de l’Union du Fleuve Mano des exigences du Processus de Kimberley dans la Préfecture de Macenta, avril 2018.

c. Etudes diagnostiques de l’exploitation artisanale de l’or et du diamant en Guinée en 2016 : L’Objectif de ces Etudes étant d’orienter la politique du gouvernement et l’adoption des pratiques d’exploitation qui favorisent une meilleure organisation de l’exploitation artisanale de l’or et du Diamant en vue de leur insertion dans le tissu économique du pays tout en préservant l’écosystème environnemental et renforçant la résilience des populations dans les zones d’exploitation.

d. Etudes d’évaluation rapide rurale sur la situation actuelle de l’exploitation artisanale du diamant dans la Préfecture de Kérouané en décembre 2013 avec le projet Droits de Propriété et Développement du Diamant Artisanal (DPDDA) II /Tetra Tech ARD.

e. Etudes sur le potentiel de ressources en diamants alluviaux et l’évaluation de la capacité de production de la Guinée en 2012.

8. Conclusion

L’exploitation minière artisanale actuellement joue un rôle important dans les communautés des zones d’orpaillage, diamantifères et de l’extraction des minéraux de développement en Guinée. Toutefois, la tendance générale actuellement observée est que l’activité d’exploitation artisanale du diamant risque de ralentir si la production reste faible, et l’existence d’autres secteurs économiquement attrayants renforcera certainement cette tendance. Les zones de production habituelle se sont nettement vidées et on note une ruée vers les zones aurifères où l’espoir est plus grand selon le contact des acteurs de la filière. La qualité du diamant guinéen est bien placée sur le marché international, c’est donc un secteur qui peut être une grande source de revenus non seulement pour les communautés mais aussi pour le gouvernement.

L’exploitation minière artisanale, en tant que deuxième activité principale des villages miniers, constitue une source de revenus non négligeable dans le revenu global des populations et dans la création d’emploi au sein des communautés. Malgré les avantages que les communautés tirent de cette activité, il est évident que la fragilité du système d’exploitation artisanale est dû à la non cohérence entre la législation et les pratiques sur le terrain qui ne favorise pas l’obtention des bénéfices escomptés. Malgré l’effort du Ministère des Mines et de la Géologie à travers la Direction Nationale des Mines dans la promotion des produits à l’international, l’Etat doit engager une véritable impulsion dans l’organisation et la qualification des acteurs. Le retour sur investissement est assuré dans le domaine.

Par CECIDE Guinée

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