Explosion meurtrière dans l’usine ODHAV de Dubréka : abandonnés dans la misère, les rescapés interpellent l’Etat

Près de deux ans après la grave explosion enregistrée dans une usine de fabrication de fer à béton à Dubréka, les victimes sont abandonnées à elles-mêmes. Le vendredi dernier, 28 novembre 2020, un reporter de Guineematin.com est allé à la rencontre de deux rescapés qui mènent une vie misérable. Ils sollicitent l’intervention de l’Etat guinéen pour amener la société à les rétablir dans leurs droits.

Le 12 décembre 2018, des bouteilles de gaz ont explosé dans l’usine de la société indienne ODHAV multi industries, située à Kagbélin, dans la préfecture de Dubréka. Cette exploitation avait fait 3 morts et 16 graves. Parmi ces blessés, figurait Amadou Diallo, un employé de cette usine. Il a passé près d’une année et demie sous traitement, mais n’a toujours pas recouvré pleinement sa santé.

« Jusqu’à présent, si j’entends un bruit d’une quelconque explosion, même si c’est la crevaison d’un pneu, ça me replonge dans le même cauchemar, comme si c’était le jour où l’accident s’est produit. Et, quand je sors sous un soleil ardent, ce n’est pas bon pour mon corps. Quand il y a une forte chaleur aussi, il y a un liquide qui sort au niveau de ma main. Et puis, quand je marche sur une distance d’un kilomètre, je me sens complètement fatigué. Donc, psychologiquement, physiquement, économiquement, je sais combien de fois ça joue sur moi », explique cette victime.

 

Plus grave encore, Amadou Diallo et tous les autres rescapés ont été abandonnés par la société qui les employait, alors même que certains d’entre eux n’avaient même pas fini leur traitement. Aujourd’hui, la vie de ce jeune a terriblement basculé. « Avant l’accident, j’étais un petit entrepreneur. Je collaborais avec 5 à 6 entreprises. Mais actuellement, je mène une vie très difficile. Parce que nous n’avons pas de soutien de la part de la société. Au début, ils nous avaient dit qu’ils allaient nous soutenir. Pendant les deux premiers mois, ils nous envoyaient un sac de riz plus un montant de 100 000 francs. Mais après, ils ont commencé à lâcher. Même pour avoir le prix de nos produits, c’était devenu difficile.

 

Il a fallu que moi-même je prenne mon argent pour acheter mes produits parce qu’il s’agissait de ma vie. J’avais une somme de 21 millions de francs environ que j’avais réussi à économiser, j’ai dépensé tout cet argent pour mon traitement. J’ai passé près d’une année et six mois sous traitement. Depuis lors, la société a coupé le cordon entre nous. Je suis marié et j’ai une fille. Je ne travaille pas. Donc, je demande aux autorités guinéennes de nous aider pour que nous soyons rétablis dans nos droits. Les responsables de cette usine doivent respecter le code de travail de la République », lance Amadou Diallo.

Tout comme ce dernier, Ousmane Barry, une autre victime de cet accident de travail, mène aujourd’hui une vie difficile. Lui, qui avait eu trois fractures au niveau de son pied gauche, est devenu quasiment une personne handicapée. Il souhaite aussi que l’Etat guinéen intervienne dans ce dossier en faveur des victimes. Après l’accident, un responsable du syndicat des travailleurs m’a appelé pour me dire d’aller prendre un montant de 5 millions 300 mille comme règlement.

 

Il m’a dit que j’allais ensuite signer un contrat à durée indéterminée (CDI). Alors que j’étais malade, je suis parti prendre l’argent. Mais depuis lors, je n’ai plus eu le moindre soutien de la part de la société. Même pour pansement de ma blessure c’était des problèmes. Aujourd’hui, je suis handicapé parce que je ne marche plus normalement. Et, jusqu’à présent, le fer qu’on a mis dans mon pied lors de l’opération n’est pas encore enlevé.

 

Il se trouve encore dans mon pied. La société ne s’intéresse plus à moi. Aujourd’hui, ma vie est très compliquée parce que je n’ai plus la capacité de faire certains travaux et je n’ai aucun soutien pour m’en sortir. C’est pourquoi, je demande vraiment aux autorités de nous aider pour que ces gens-là nous donnent notre droit afin que nous puissions faire quelque chose pour pouvoir nous prendre en charge », sollicite Ousmane Barry.

 

Si leur appel n’est pas entendu par les autorités guinéennes, ces citoyens annoncent qu’ils vont engager une procédure judiciaire pour réclamer leur indemnisation par la société.

Mohamed DORÉ pour Guineematin.com

Tél. : +224 622 07 93 59

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