Coyah : immersion dans l’univers compliqué de Mme Issa Sy, handicapée et nourrice

Madame Barry Issa Sy
Madame Barry Issa Sy

Le ministère de l’Action Sociale, de la Promotion Féminine et de l’Enfance et ses partenaires ont célébré récemment la journée dédiée aux personnes handicapées. L’accent a été mis sur leur insertion socioprofessionnelle. Mais, nombre de ces handicapés disent n’avoir pas été associés aux festivités, réduits à vivre cloîtrés, traînant un handicap qui leur rend la vie plus que jamais compliquée. C’est le cas de madame Barry Issa Sy, diplômée en Pharmacie de l’Université Kofi Annan de Guinée, jeune femme handicapée, nourrice domiciliée au secteur CBA, dans le quartier Kountia, relevant de la commune de Coyah.

Dans un entretien accordé à Guineematin.com dans la journée d’hier, mercredi 17 décembre 2019, madame Barry Issa Sy est revenue sur son quotidien, pas du tout facile.

Guineematin.com : vous êtes une femme handicapée et mère d’une fille. Comment faites-vous pour en sortir dans vos différentes tâches ménagères ?

Issa Sy : je me débrouille, comme la volonté de Dieu est inévitable. Non seulement je suis handicapée, mais le tout puissant Allah m’a donnée ce bébé qui s’appelle Hassanatou Barry. Elle a eu juste aujourd’hui un mois et une semaine. Et, je me débrouille pour m’en sortir avec des personnes par-ci, par-là, des fois, par de simples passants qui viennent m’assister. Étant une mère, en même temps une handicapée, vous savez, avec le bébé, ce n’est pas facile. Dans ce quartier, vraiment, je ne peux même pas définir comment je souffre ici. Comme c’est le mois de décembre, c’est la raison pour laquelle nous avons de l’eau de temps à autre. Quand l’eau vient aujourd’hui, ça ne vient pas demain, après demain ça revient. Donc, si les mois de janvier, février et mars arrivent, on voit l’eau ici une fois par semaine ou deux fois par semaine ; et, avec le bébé, ce n’est pas facile. J’ai des difficultés à quitter ici à la maison. Il n’y a pas de route, il n’y pas d’eau. Moi, en personne, je peux rester une journée sans me laver ; mais, ça ne va pas dépasser cela. C’est mon mari qui puise l’eau pour moi ; et, dès que les mois que j’ai cités arrivent, on gagne l’eau difficilement dans les puits, On se lève de 5 heures à 6 heures pour avoir deux ou trois sceaux, ça ne va pas dépasser cela ; et, on doit préparer, laver les habits et ainsi de suite. Donc, c’est la raison pour laquelle je souhaite quitter ici. Si j’ai des gens, des personnes de bonne volonté qui peuvent m’aider à avoir des moyens, ça me fera plaisir pour habiter un quartier où on peut trouver de l’eau. Ça, c’est ma première préoccupation.

La deuxième chose, vous m’avez vu, c’est moi qui lave les habits du bébé. Si j’ai des personnes de bonne volonté qui peuvent m’aider à avoir une machine à laver ou bien avoir de l’argent pour prendre une bonne qui peut laver des habits pour moi, ça me fera plaisir. Sinon, c’est difficile parce que quand je lave très bien, je ne peux pas rincer. Il faut trouver quelqu’un pour rincer les habits ; mais, c’est très difficile. Les tâches que je peux faire, c’est très facile pour moi, malgré mon handicap.

Guineematin.com : de quoi avez-vous besoin comme aide ?

Issa Sy : vraiment, si les moyens me permettaient, j’aurais pu prendre une bonne. Mais, comment ? Je ne travaille pas, mon mari ne travaille pas, ce n’est pas facile. C’est moi qui fais la cuisine, qui lave les habits. Si mon mari est là, c’est lui qui m’aide. Pour partir au marché, comme vous avez vu la route, c’est mon mari qui part au marché, qui puise de l’eau, c’est lui qui m’achète tout ce dont j’ai besoin. Maintenant, je reste à la cuisine et je prépare tout.

Guineematin.com: comment s’est passée la suite de votre accouchement, notamment les soins ?

Mme Barry Issa Sy

Issa Sy : en ce qui concerne les soins, ça a retardé. Parce que j’ai pu avoir des moyens pour faire mes soins et les soins du bébé qu’à la troisième semaine. Il y a eu un monsieur de bonne volonté, parce qu’on avait publié sur les réseaux sociaux, il a vu la vidéo sur YouTube, il était très renseigné comme mon numéro était en bas. Il a pu m’appeler pour demander quelle était la situation. Mon mari lui a expliqué, on est parti à l’hôpital de Ratoma. Il a payé les frais de mes soins et de mon déplacement qui a coûté 200 000 GNF. Parce que quand mon mari part chercher le véhicule pour le déplacement, ils donnent un prix moins cher. Mais, dès qu’ils viennent et qu’ils me voient seulement, ils vont savoir vraiment que mon mari est dans le besoin. Donc, il augmente le prix. Parce qu’ils savent qu’ils augmentent ou pas, mon mari va obligatoirement payer. Donc, c’est ainsi qu’il est allé au carrefour pour le déplacement, ils sont tombés d’accord pour 150 000 GNF. Dès que le monsieur est venu, il m’a vu, il a augmenté 50 000 GNF.

Guineematin.com : vous êtes une jeune dame diplômée, est-ce vous avez cherché à avoir un emploi ?

Issa Sy : je n’ai pas pu déposer mes documents quelque part ou chercher de l’emploi, pas du tout. Parce que j’étais enceinte. Dans le quartier, depuis que je suis venue ici, même les voisins, je ne suis arrivée à la porte de personne. On ne peut pas, il y a trop de cailloux. Parce que je mets mes genoux sur les chaussures pour marcher. Donc, c’est difficile. Je me souci, je m’inquiète tellement pour trouver de l’emploi, je ne peux pas le dire. C’est le tout puissant Allah qui arrange les choses.

Guineematin.com : on vient de célébrer la journée internationale des handicapés. En aviez-vous entendu parler ?

Issa Sy : c’est la troisième fois cette année que j’entends les rumeurs sur une journée comme ça. Au moment où madame Sanaba Kaba était ministre de l’action sociale, de la promotion féminine et de l’enfance, j’étais partie chez elle. D’ailleurs, on se connaissait très bien et j’avais son numéro. Elle m’avait promis beaucoup de choses ; mais, la promesse n’a pas été réalisée. Je ne sais pas si c’est une femme ou un homme qui est actuellement ministre de l’action sociale.

Guineematin.com : quel est le dernier mot ou l’appel que vous avez lancé ?

Issa Sy : le dernier mot et l’appel que j’ai à lancer aux citoyens, personnes de bonne volonté, c’est de me venir en aide, de s’occuper très bien de mon bébé. Pourquoi ? C’est moi qui suis handicapée, celle-là n’est pas handicapée. Peut être que dans 4 à 5 ans, elle aussi à son tour, si le tout puissant Allah nous donne la chance de vivre, elle pourra faire quelque chose pour moi.

Fatoumata Diouldé Diallo pour Guineematin.com

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