Un prévenu devant le tribunal : « l’Etat nous doit près de 2 milliards de francs »

Le procès de plusieurs membres d’une même famille s’est ouvert le lundi, 16 décembre 2019, au tribunal de première instance de Mafanco. Ibrahima Kalil Keïta, Yayé Keïta, Hawa Keïta sont poursuivis pour destruction de biens publics par le Serproma (service national de promotion et de réglementation des ONG) relevant du ministère de l’administration du territoire et de la décentralisation. Les prévenus ont plaidé coupable des faits pour lesquels ils sont poursuivis mais ils ont dit avoir agi ainsi parce qu’ils n’avaient plus le choix, a constaté un reporter de Guineematin.com qui était sur place.

Ce procès est la conséquence d’un bras de fer qui oppose la famille Keïta et le Serproma depuis 15 années. Tout est parti d’un contrat de bail d’un bâtiment appartenant à cette famille passé entre le père de famille et le service étatique. Après l’expiration du contrat qui était de quatre ans, les problèmes ont commencé entre les deux parties. La famille a exigé le renouvellement du contrat ou le départ du Serproma de son local. Mais, le locataire a refusé toutes les deux options. La famille Keïta a porté plainte et la justice lui a donné raison. Mais, le Serproma n’a pas accepté de se plier aux multiples décisions de justice lui demandant de libérer le bâtiment.

C’est ainsi qu’en juin 2019, Ibrahima Kalil Keïta, Yayé Keïta, Hawa Keïta, dont le père est décédé, sont allés démonter toutes les portes et fenêtres du bâtiment. Ils les ont embarquées avec d’autres objets dans un camion pour une destination inconnue. Suite à cet acte, le Serproma porte plainte contre eux pour « destruction de biens mobiliers publics ». Devant la présidente du tribunal Djénabou Doghol Diallo, Ibrahima Kalil Keïta a reconnu les faits dont il est accusé avec ses deux sœurs, tout en donnant les raisons qui les ont poussés à agir de la sorte.

« Je reconnais avoir démonté les portes et fenêtres et emporté les objets. Mais, on a fait cela pour qu’on en arrive là afin qu’ils déguerpissent enfin de notre bâtiment. Cela fait 15 ans qu’on est dans ce problème, plusieurs décisions de justice ont été déposés chez eux pour qu’ils quittent les lieux sans suite. L’Etat nous doit près de 2 milliards de francs guinéens d’arriérés. Ils se comportent en locataire, alors que ce n’est pas le cas.

Ils sont illégalement installés sur notre propriété. Puisque c’est l’Etat, ils se sentent plus forts mais au moins qu’ils nous payent nos loyers comme ils refusent de quitter. Ou s’ils ne veulent pas libérer les lieux, qu’ils proposent de racheter le bâtiment ou qu’ils nous indemnisent. C’est pourquoi on a posé cet acte pour qu’on arrive à nouveau devant la justice afin qu’on trouve une solution », s’est-il défendu.

Yayé Keïta, Hawa Keïta ont abondé dans le même sens que leur frère. Tous reconnaissent avoir mal agi mais ils assurent qu’ils n’avaient pas une autre alternative. « Je reconnais avoir mal agi mais nous n’avons rien détruit. Ce sont des objets qu’on peut remettre à leur place en deux minutes. C’était la seule alternative qu’on avait, nous voulons qu’ils quittent notre bâtiment. Ils ont porté plainte mais il faut être propriétaire ou locataire pour porter plainte. Ils ne sont ni l’un ni l’autre, ils occupent illégalement les lieux », ajoute Ibrahima Kalil Keïta.

Après la comparution des trois prévenus, le tribunal a renvoyé le dossier au 6 janvier 2020 pour la suite des débats.

Salimatou Diallo pour Guineematin.com

Tel. 224 623 532 504

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