Conakry : une demoiselle de 21 ans jugée pour avoir tué son nouveau-né

Condamnée à une lourde peine de prison au tribunal de première instance de Labé pour avoir tué son nouveau né, Maimouna Sow avait interjeté appel. Le procès de cette fille, âgée de 21 ans, s’est ouvert à la Cour d’Appel de Conakry le vendredi, 13 mars 2020. A la barre, Maimouna Sow a continué à nier les faits d’infanticide pour lesquels elle est jugée. Son avocat a dénoncé son jugement sans avocat et sa condamnation dans une procédure criminelle, a constaté sur place Guineematin.com à travers un de ses reporters.

Selon nos informations, Maimouna Sow est originaire de la sous-préfecture de Yembéring, dans la préfecture de Mali. Elle est accusée d’avoir tué son nouveau-né avant d’emballer le corps dans un sachet plastique pour le jeter dans une fosse sceptique. Les faits se sont produits le 6 janvier 2019 au quartier Pounthioun, dans la commune urbaine de Labé. Mais, c’est seulement le 12 janvier qu’elle a été mise aux arrêts par la police.

Malgré ses dénégations, Maimouna Sow sera reconnue coupable le lundi, 25 février 2019, et condamnée à 16 ans de réclusion criminelle, avec une période de sûreté de 10 ans.

N’étant pas d’accord avec cette décision, l’accusée a saisi la Cour d’Appel de Conakry où elle a été entendue le vendredi dernier. A la barre, Maimouna Sow a expliqué ce qui s’est passé le 6 janvier 2019 au quartier Pounthioun. « C’est moi qui ai mis le bébé au monde. Après l’accouchement, j’ai eu du vertige, j’ai perdu conscience et j’ai chuté sur le bébé. J’ai chuté sur lui, mais j’étais inconsciente. Après, je l’ai pris pour aller le déposer derrière une cour. Les gens ont vu le bébé et ils ont informé le chef de quartier. Après enquête, le chef secteur est venu me chercher. Ils m’ont conduit au commissariat central avant de me traduire à la justice de Labé où j’ai été jugée sans avocats », a-t-elle expliqué.

Cette narration des faits n’a pas convaincu Elhadj Souleymane Bah, président de la Cour d’Appel. Pour lui, la version de Maimouna Sow devant la Cour est différente du contenu des procès verbaux dressés au commissariat de police et chez le juge d’instruction. « Vous avez déclaré au commissariat et au niveau du juge d’instruction que vous avez étouffé le bébé avant de le déposer dans un fossé. Mais ce n’est pas ça que vous avez dit ici ».

La jeune fille va se cramponner sur son argument de la chute sur le bébé.

Une réponse que rejette à son tour le Ministère Public, par la voix d’Abdourahmane Baldé, qui va poser une série de questions à Maimouna Sow. « Depuis quand avez-vous vu une mère de famille déposer un nouveau né derrière une cour ? ». L’accusée de répondre : « je n’ai vu ça nulle part. J’ai juste eu peur. »

Revenant sur l’argument de la perte de conscience avancé par la jeune fille, le Procureur Général va enfoncer le clou : « Lorsque tu as retrouvé tes facultés, est-ce que tu as informé la famille de ce qui est arrivée ? Tu as eu peur de quoi ? Tu n’as pas eu peur de tomber en grossesse, pourquoi avoir peur de mettre l’enfant au monde ? ». Des questions restées sans réponses.

Au terme de cette série, l’avocat de l’accusée, maître Tafsir Barry, va prendre la parole pour expliquer que sa cliente a été jugée et condamnée à Labé en dehors de toute procédure légale. « La procédure n’a pas été respectée. Elle a été interpellée, jugée et condamnée à Labé sans être assistée par un avocat. Or, l’article 409 du Code de Procédure Pénale guinéen dispose qu’en matière criminelle, l’assistance de l’accusé par un avocat est obligatoire. Mais, ma cliente est illettrée. Elle a été jugée et condamnée sans avocats et sans interprète. C’est la raison pour laquelle d’ailleurs on a interjeté appel », a indiqué l’avocat.

S’adressant à sa cliente, maitre Tafsir Barry va demander si elle regrette son acte. « Oui, je le regrette. Je n’ai pas fait exprès. Je n’avais pas l’intention de le tuer. Je demande pardon », a dit Maimouna Sow.

Dans ses réquisitions, le Parquet Général, après avoir relaté les faits, a sollicité de larges circonstances atténuantes pour l’accusée. « Elle avait l’intention de donner la mort à cet enfant. C’est pourquoi elle est allée accoucher toute seule, sans appeler au secours. Cependant, il y a certes eu des manquements parce qu’elle a été jugée sans l’assistance d’un conseil. Ça ! C’est une défaillance de la chaîne pénale… Mais, c’est un délinquant primaire. Donc, nous sollicitons à la Cour de lui faire bénéficier de larges circonstances atténuantes. »

Dans la même lancée, la défense va évoquer les dispositions de l’article 116 du Code de Procédure Pénale qui réduit les peines criminelles jusqu’à l’intervalle de 3 à 5 ans. Nous sollicitons la clémence de la Cour. Et nous sollicitons de larges circonstances atténuantes », a plaidé maître Tafsir Barry.

La Cour a mis le dossier en délibéré pour décision être rendue le 17 avril 2020.

Saïdou Hady Diallo pour Guineematin.com

Tel: 620 589 527/654 416 922

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