63 ans de la Guinée : la lecture d’Amara Camara

Amara Camara, journaliste, enseignant-chercheur
Amara Camara, journaliste, enseignant-chercheur

La République de Guinée a 63 ans ce samedi 02 octobre 2021. Pendant donc plus d’un demi-siècle, les guinéens ont conduit propre destin sur le plan politique avec à la clef la succession de plusieurs leaders tant civils que militaires.

63 ans d’indépendance, 63 ans d’histoire assumée et 63 ans de combat pour le développement socio-économique, c’est la leçon que l’on peut tirer à l’occasion de cette fête nationale. Au plan politique, on retiendra que l’an 63 de l’indépendance guinéenne se célèbre sous la présidence du sixième chef de l’Etat tout régime confondu. Ce, d’Ahmed Sékou Touré au Colonel Mamady Doumbouya en passant par le Général Lansana Conté, le Capitaine Moussa Dadis Camara, le Général Sékouba Konaté et le Pr Alpha Condé.

Pendant les 63 ans de la République, trois partis politiques, le PDG-RDA, le PUP et le RPG se sont succédé au pouvoir avec des mandats entrecoupés de transition politico-militaire. Si la première République du président Sékou Touré qui a duré 26 ans, était axé sur le parti unique, le PDG-RDA, la deuxième République du Général Lansana Conté, elle, s’est illustrée par l’instauration du multipartisme intégral avec la création de plusieurs dizaines de partis politiques. Mais on notera que le passage de la première à la deuxième République a connu une période de transition militaire d’avril 1984 à décembre 1993 avec le Comité militaire de redressement national (CMRN), à sa tête le colonel Général Lansana Conté, devenu Général plus tard.

Ce dernier a conduit le pays durant toute la deuxième république tout en acceptant d’accrocher son uniforme et son galon militaires pendant quelques mois. Il se maintiendra à la tête de la Guinée jusqu’à sa mort le 22 décembre 2008. Soit, 24 ans de gouvernance. Ce, après une modification de la constitution en 2001.

Seulement, tout comme le PDG-RDA, son régime s’est effondré le jour même de sa mort. Ainsi, un groupe de jeunes militaires conduit par le Capitaine Moussa dadis Camara accompagné du Général Sékouba Konaté, s’est emparé du pouvoir le 23 décembre 2008. Une deuxième transition militaire s’est ainsi ouverte dans le pays. Mais à la différence de la première transition (1984-1993) celle-ci s’est déroulée deux temps. Le premier, avec le capitaine Moussa Dadis Camara, du 23 décembre 2008 au 3 décembre 2009 et le deuxième, avec le Général Sékouba Konaté, du 04 décembre 2009 au 21 décembre 2010.

C’est à partir de cette date que la Guinée est entrée dans la troisième République avec l’avènement du président Alpha Condé au pouvoir. Il avait été déclaré vainqueur à l’issue du deuxième tour de l’élection présidentielle. Ce qui était une première d’ailleurs en Guinée. C’était le 7 novembre 2010. Alpha Condé devait passer le témoin à un autre élu le 21 décembre 2020. Ce, conformément à la constitution du 07 mai 2010 qui limitait le nombre de mandat présidentiel à deux seulement.

Mais, contre toute attente, l’homme a mis sa machine en branle pour contourner la constitution sur laquelle il a prêté serment à deux reprises. La conséquence, c’est la division de la population guinéenne en pro et anti troisième mandat avec à la clef, la chasse aux anti troisième mandat. Le bilan est lourd. Des dizaines de morts, des centaines de blessés, des dégâts matériels incalculables. Mais contre vents et marées, une nouvelle constitution est déclarée adoptée le 22 mars et promulguée en avril 2020. Alpha Condé est à nouveau déclaré réélu à l’issue du scrutin présidentiel du 18 octobre 2020. Cela entraine le pays dans une crise politico-économique et sociale sans précédent.

L’aboutissement de tout cela, c’est le renversement du président Alpha Condé, au petit matin du dimanche, 05 septembre 2021 par un coup d’Etat militaire piloté le Colonel Mamady Doumbouya, jusque là commandant du groupement des forces spéciales qui dirige les destinées de la Guinée depuis ce jour. Cet officier supérieur de l’armée guinéenne et ancien légionnaire de l’armée française a hérité d’un pays politiquement divisé avec un tissu social fragilisé, et économiquement au ralenti. Un héritage qui n’est que la conséquence de la mauvaise gouvernance politique et économique ayant marqué les dix dernières années de l’évolution politique de notre cher pays, la République de Guinée.

Amara Camara, journaliste, enseignant-chercheur

Tél. : 664 215 088

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