Kounsitel : des militaires accusés de favoriser l’exploitation clandestine d’or

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Depuis la découverte de l’or à Kounsitel, en juin 2021, les populations de cette collectivité de Gaoual n’ont plus la paix du cœur, ne vivent plus dans la quiétude et leur environnement est continuellement détruit avec toutes les conséquences pour le bétail et les pratiques agricoles.

Joint au téléphone par un journaliste de Guineematin.com hier, lundi 18 octobre 2021, Abdoulaye Samaké, un des jeunes leaders de la localité, qui préside actuellement le Comité de protection de l’environnement de Gaoual accuse les agents en uniforme d’être à la base de cette pagaille.

Abdoulaye Samaké, jeune leader de Gaoual

 « La situation à Kounsitel est bizarre. C’est la pagaille totale et partout. L’exploitation anarchique se fait nuit et jour et sans arrêt. L’autorité locale ne gagne rien comme taxe. Les militaires sont les seuls bénéficiaires. On creuse partout. Avant même le coup d’Etat, les gens ont réinvesti les lieux. Ils viennent creuser les terrains des gens et ce sont les militaires qui cherchent parfois les orpailleurs pour venir creuser. Les militaires prennent 200 000 francs guinéens, 300 000 francs ou 500 000 francs guinéens. Ils prennent leurs machines avant de les taxer… Ça dépend de la tête du client », dénonce Abdoulaye Samaké. 

Contrairement à la commune urbaine de Gaoual où les orpailleurs ont été vidés des lieux, poursuit-il, la mairie de Kounsitel se voit totalement impuissante face à la ruée vers l’or. « Vous savez, depuis les orpailleurs se sont attaqués aux populations, incendiés la maison des jeunes avant de s’en prendre au responsable des jeunes de la localité qui a vu son domicile réduit en cendre, les populations locales ont peur. Actuellement, les militaires sont les seuls responsables de la situation », déplore-t-il.

Selon Moussa Kéïta, président de la société civile de Gaoual, par ailleurs correspondant de l’agence guinéenne de presse, il y a plus de 300 comptoirs d’achat d’or installés à Kounsitel. Et malgré cette exploitation à outrance du sous-sol de Kounsitel, la communauté et l’Etat ne perçoivent aucun franc.

Egalement joint au téléphone par Guineematin.com, le Gouverneur de Boké, le Colonel Sékou Trésor Camara, se dit très préoccupé par la situation.

Colonel Sekouba Trésor Camara, gouverneur de Boké

« Nous sommes informés de cette arrivée massive de Guinéens à Gaoual. Le préfet m’en a parlé. C’est vrai que l’exploitation est interdite mais la population est plus nombreuse… Par rapport aux accusations portées contre les agents, bon, vous savez, parfois, il y a des détracteurs. Doncc il faut faire attention à ce qu’ils disent. Et par rapport à la gestion de cette situation, vous savez que militairement, la zone relève de Labé et administrativement, elle est de Boké », rappelle le Gouverneur, qui promet d’appeler le Préfet de Gaoual afin de lui demander de normaliser la situation sur le terrain.

Toutefois, selon un orpailleur évoluant à Kounsitel et qui exige l’anonymat, le drame environnement est imparable.

« Tout est détruit sur le plan environnemental. Les gens ne font que venir grossir les rangs des orpailleurs clandestins. Actuellement, aucun site n’est épargné. Mais le plus grand mal, c’est que la localité ne tire aucun profit de cette exploitation alors que c’est chez eux qui est détruit. Ailleurs, il y a des tomboloma (des groupes d’intérêts locaux règlementant l’exploitation artisanale de l’or) comme à Dinguiraye, Kouroussa, Kankan, Siguiri, Mandiana et Kérouné. Dans ces préfectures, partout où tu viens pour exploiter, tu t’adresses forcément à un tomboloma. Tu achètes un ticket d’accès et tu y verses 10 % de tes gains. Et les agents interviennent seulement lorsqu’il y a des problèmes de vol et autres infractions mais ils n’interviennent pas ni dans l’accès, ni dans l’exploitation. Mais à Kounsitel, il n’y a rien de tout cela », dénonce cet orpailleur.

Curieusement, à Kounsitel, le Comité de défense de l’environnement qui regroupait plus de 300 jeunes, a fini par se disloquer. Démoralisés et faute de soutien, les jeunes se sont dispersés dans la nature, laissant le terrain libre et à la merci des orpailleurs clandestins.

Abdallah BALDE pour Guineematin.com

Tél : 628 08 98 45

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