Diversification des filières au lycée : les réserves de Michel Pépé Balamou (SNE)

Michel Pépé Balamou, secrétaire général du Syndicat National de l'Education
Michel Pépé Balamou, sécretaire général du Syndicat National de l’Education

Comme annoncé précédemment, les autorités en charge de l’enseignement pré-universitaire et de l’alphabétisation comptent mettre en œuvre, à partir de cette année, un programme de « diversification des filières » au lycée. Et, ce sont les admis du BEPC de la session 2021 qui seront les cobayes de ce programme de tronc commun. A la place des trois options traditionnelles (sciences sociales, sciences mathématiques et sciences expérimentales), ces nouveaux lycéens seront orientés dans des « séries littéraires et scientifiques ». Ils auront aussi à étudier des « matières combinées (Histoire-Géo, Physique-Chimie,..) » dans ce champ expérimental qui sera ouvert dès la rentrée des classes le 21 octobre prochain.

Pour Michel Pépé Balamou, le secrétaire général du syndicat national de l’éducation (SNE), cette initiative des autorités est à saluer, d’autant plus que la diversification des filières entre dans le cadre de l’amélioration de l’apprentissage et la qualification de l’enseignement dans notre pays.

« La diversification des filières au niveau de l’enseignement pré-universitaire est une bonne initiative qui entre dans le cadre de l’amélioration de l’apprentissage, la croissance du niveau et la qualité de l’enseignement dans notre pays. Les filières traditionnelles (sciences sociales, sciences expérimentales et sciences mathématiques) sont en déphasage avec les réalités du marché de l’emploi, d’autant plus qu’il y a une inadéquation entre les offres d’emploi et les besoins d’emploi sur le terrain. Donc, la Guinée a besoin aujourd’hui de la main d’œuvre qualifiée. Et, cette main d’œuvre qualifiée ne peut être obtenue que par les filières scientifiques et littéraires. C’est pour faire en sorte que l’élève, à partir du lycée, puisse avoir un profil de sortie qui lui permettra, une fois à l’université, de ne pas être dépaysé scientifiquement. Celui qui fait le droit, l’ingénierie par exemple ou la médecine, de fois cela crée une discontinuité entre les programmes d’enseignement du lycée et ceux de l’université. Ça c’est un problème. Le second problème, c’est qu’on considère les écoles professionnelles techniques comme étant des écoles de seconde chance. C’est quand on aura échoué au Brevet ou au Bac qu’on tente sa chance vers les écoles techniques. Mais, lorsque les filières techniques sont insérées à partir du lycée et que l’enfant pratique déjà ces filières techniques, je crois ça lui donnera le goût de se donner la chance pour se dire qu’à l’université je ferai telle branche technique. Mais, actuellement, il y a certains candidats, même après le bac, ils ne savent pas quoi choisir. C’est-à-dire, il n’y a pas un profil de sortie », a indiqué Michel Pépé Balamou. 

Cependant, malgré la satisfaction qu’il éprouve pour ce programme, ce leader syndical se montre prudent sur la capacité des autorités de mener à bien cette diversification des filières. Michel Pépé Balamou estime que le manque d’enseignants qualifiés et le problème d’infrastructures adéquates pourraient être d’éminents obstacles dans la mise en œuvre de cet ambitieux programme du système éducatif. D’ailleurs, il redoute qu’on revive la mauvaise expérience de l’introduite de l’anglais au collège (où le manque d’enseignants avait été une terrible migraine dans les écoles).

« Vous savez, on a des expériences amères sur l’introduction de l’anglais au collège, parce qu’il y a un problème d’infrastructures, de personnels enseignants. Et, parce que dans les actuelles filières que nous avons d’abord, on a un manque criard d’enseignants. C’est de voir maintenant est-ce que les nouvelles filières qui vont êtres instaurées pourront avoir des enseignants qualifiés en la matière ; est-ce qu’on peut avoir les manuels pédagogiques, didactiques qui soient vraiment à la disposition des nouveaux enseignants et aussi au niveau des élèves. Donc, nous, en tant que Syndicat National de l’Éducation, pensons qu’il faut ouvrir un champ expérimental. Généralement, quand il y a des innovations pédagogiques, pour pouvoir opérer au niveau des curricula d’un système éducatif par exemple, il faut d’abord un champ expérimental. Ce champ expérimental commence par la 11ème année pour voir si ça va réussir ou pas. Si ça réussit, ça va maintenant se propager au niveau de la 12ème année. Ce qui veut dire que, ceux qui font la 12ème et la terminale vont continuer sur l’ancien système le temps d’expérimenter avec la 11ème année pour éviter les problèmes. Aujourd’hui, il y a un manque criard d’enseignants en Français, en Maths, en physique, en chimie, en Biologie et même en philosophie. Donc, à partir du moment où il y a les manques d’enseignants dans ces anciennes options, ça va créer des problèmes. Mais, je pense qu’avec un système de monitoring, de suivi pédagogique, cela permettra de corriger les lacunes et les défaillances qui vont êtres constatés çà et là dans l’application de ces nouvelles filières », a dit Michel Pépé Balamou.

Mohamed Guéasso DORÉ pour Guineematin.com

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