Reversement du régime d’Alpha Condé : « c’est ce qui arrive quand on veut asseoir son pouvoir sur la misère des gens », dit Dr Zoutomou

Dr Edouard Zoutomou Kpogomou, président de l’UDRP (Union Démocratique pour le Renouveau et le Progrès)
Dr Edouard Zoutomou Kpoghomou, le président de l’union démocratique pour le renouveau et le progrès (UDRP)

Comme annoncé précédemment, après près de 11 ans de pouvoir à la tête de la Guinée, Alpha Condé a été débarqué hier, dimanche 05 septembre 2021, de ses fonctions de président de la république par une unité d’élite de l’armée guinéenne (les forces spéciales). Ce coup d’Etat (vivement condamné par la communauté internationale) a été très applaudi par les guinéens. Ce putsch contre le désormais ancien chef de l’Etat guinéen est perçu comme une délivrance par une bonne majorité du peuple. Et, la même la liesse est perceptible du côté de certains acteurs politiques et de la société civile.

Dans un entretien accordé à Guineematin.com ce lundi, 06 septembre 2021, Dr Edouard Zoutomou Kpoghomou, le président de l’union démocratique pour le renouveau et le progrès (UDRP), a laissé entendre que c’est la volonté d’Alpha Condé d’asseoir son pouvoir sur la misère de son peuple qui a conduit à ce coup d’Etat.

« Nous avons pris acte de ce qui s’est passé ; et, moi je dois dire que nous ne sommes pas du tout surpris. Parce que ça c’est une suite logique de tout ce que nous avons vécu dans ce pays. Quand on veut asseoir son pouvoir sur la misère des gens en essayant de les apprivoiser, de les museler et de les marteler, c’est ce qui arrive. Et de toutes les façons, c’était une question de temps. Disons-nous la vérité, le 3ème mandat nous l’avons toujours dit, c’était le mandat de trop. Vous voyez que nous ne sommes même pas à un an de ce coup d’Etat constitutionnel. Ça veut dire que tout le monde en avait vraiment marre. C’est-à-dire,  je ne peux même pas le qualifier. Ce qui est sûr, c’est ce que nous observons. Il n’y avait que trois voies possibles pour monsieur Alpha Condé de quitter ce pouvoir. On l’avait dit : soit par les urnes, soit par une insurrection ou bien par un coup d’Etat militaire où les trois convergent vers le même objectif qui était son départ. Alors, c’est ce qui est arrivé. Malheureusement, il (Alpha Condé : ndlr) va partir par la petite porte. On a essayé de le lui dire à plusieurs moments, mais il n’a pas voulu nous écouter. En fait, on cherchait à nous museler. On faisait la chasse aux gens ici pour ça », a dit Dr Edouard Zoutomou.

Dans ses premiers discours, la junte (le CNRD) désormais au pouvoir en Guinée a annoncé sa volonté de rassembler les guinéens pour impulser une dynamique vers le développement et l’émancipation du pays. Les militaires assurent qu’il n’y aura pas de chasse aux sorcières et qu’ils ont besoin de tout le monde pour insuffler un nouveau départ à la Guinée. Et, ces discours ont l’air de rassurer le président de l’UDRP.

« Les premiers discours m’ont rassuré dans la mesure où ils essaient de peindre la situation sociopolitique du pays, peindre les réalités que nous vivons, l’amertume de la population, la misère et la précarité dans le pays. En essayant de lire le discours en disant  qu’ils veulent créer un cadre pour que tous ces problèmes soient solutionnés me rassure. Ça, c’est le combat que nous sommes en train de mener dans toutes les organisations auxquelles nous appartenons », a indiqué Dr Edouard Zoutomou.

Dans l’euphorie de la prise du pouvoir, le CNRD (comité national de rassemblement et du développement) a exprimé sa volonté d’écrire une nouvelle constitution mieux adaptée aux réalités des guinéens. Cette idée n’est pas désapprouvée par le président de l’UDRP. Mais, l’opposant prévient que toute décision concernant la constitution doit être prise après un dialogue inclusif où chaque acteur aura à se prononcer.

« Toutes les choses que nous sommes en train de vivre aujourd’hui viennent de cette nouvelle constitution (adoptée en mars 2020) qui est le fruit du troisième mandat. Cette constitution ne peut pas rester et qu’on dise qu’on fait un changement. Donc, on ne peut que la réfuter ; et, cela me rassure. Maintenant, si les militaires parlaient de la constitution de 2010, au moment où ils sont en train de faire une prise pour renverser les tendances, on aurait pensé qu’ils voulaient instituer quelque chose. Je crois que si on doit revenir à une constitution, pour quelle forme qu’elle soit, ça sera après des consultations. Je me réjouis du fait qu’eux ils (les militaires) vont créer le cadre et faire intervenir tout le monde. Ça sera un effort inclusif à l’issue duquel il sera décidé de réécrire une constitution ou de retourner à une ancienne constitution. Mais, ce sont des démarches qui doivent être entreprises lorsque les gens se parlent », a laissé entendre Dr Edouard Zoutomou Kpoghomou.

Par ailleurs, ce leader politique s’est réjoui de l’annonce faisant état de la possible libération de tous les détenus politiques qui croupissent dans les prisons du pays.

« C’est une très bonne nouvelle. On ne peut pas continuer à museler les gens dans une campagne d’intimidation. Nous avions entrepris des démarches, malheureusement nous n’avions pas la force pour aller extraire les gens-là de la prison. Aujourd’hui, ceux qui peuvent le faire, ce sont ceux qui sont en train de le faire. Moi, je ne peux que m’en réjouir », a dit Dr Zoutomou.

Alpha Assia Baldé pour Guineematin.com

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