Mois de la femme : zoom sur Rose KOUROUMA, coiffeuse d’hommes

Les femmes de Guinée sont aujourd’hui présentes dans tous les secteurs socio-économiques du pays. Elles sont de plus en plus nombreuses à faire des métiers qu’on pensait destinés aux hommes. Parmi ces femmes qui font des métiers, Rose KOUROUMA. Elle fait la coiffure pour hommes depuis près de 20 ans avec passion et maitrise surtout.

Polyvalente, notre invitée est aussi bibliothécaire au Secrétariat Général des Affaires Religieuses et joue à la pétanque sport au compte duquel elle compte former une équipe féminine. Idiatou CAMARA a rencontré, en pleine activité, dans la commune de Kaloum (Conakry), cette femme qui fait que des « boulots d’hommes ».

Bonjour Rose merci de nous recevoir ici à cet atelier de simulation non loin de vos bureaux de l’AGUIPE ici à Kaloum, première question qui est Rose KOUROUMA ?

Je vous remercie pour cette opportunité, je suis Rose KOUROUMA je suis diplômée en informatique gestion, je joue à la pétanque, je suis bibliothécaire aussi et je coiffe avec passion les hommes depuis de près de 20 ans maintenant (sourire…). J’ai mon salon à Dubréka avec mes frères qui y sont et lorsque j’y vais, je fais des retouches sur ce qu’ils font.

Pourquoi avez-vous choix la coiffure pour hommes comparativement à toutes les femmes qui font la coiffure pour femmes c’est plutôt rare ce que vous faites ?

Vous avez raison c’est rare de voir des femmes et même très rare de voir des femmes qui coiffent les hommes, mais moi c’est une ne passion. Je suis la seule fille de ma famille, je me suis dite pourquoi c’est seulement les hommes qu’on voit dans ces métiers alors que les femmes aussi peuvent faire tout ce que les hommes font.

En fait je dois vous dire que je voulais faire la tôlerie et la peinture, cela ne plaisait pas à mon oncle qui avait une influence sur mon père, il a découragé mon père qui s’est opposé à mon choix, et donc finalement je me suis tournée vers la coiffure homme.

Parlez-nous de vos débuts justement dans la coiffure pour hommes ?

Pour mes débuts, mon maitre Dianguounde Moussa on l’appelle, à qui je fais un petit coucou d’ailleurs que je remercie beaucoup, pensait que je m’amusais lorsque je lui en ai parlé, c’était en 2003. Il m’a dit si tu es au sérieux va chercher le matériel, les peignes, ciseaux et lames entre autres, il a fait la liste et je suis allée tout acheter. A mon retour, alors il m’a dit sans blague ? Tu veux vraiment faire ce métier ? J’ai dit oui, je veux coiffer des hommes. Donc il m’a dit va chercher des enfants dans le quartier pour commencer, ce que j’ai fait. Et au fur et à mesure, j’ai appris avec le temps.

Je vais vous raconter une petite histoire. Un jour à mes débuts, un client est venu un jour, il m’a dit qu’il est venu se coiffer, mon maître était absent, il s’est assis, et lorsque j’ai commencé à le préparer, à mettre la serviette autour de son cou, il m’a dit, attendez, je ne vous ai pas dit que je ne suis pas venu pour me tresser mais pour me coiffer. J’ai dit oui je sais, je ne vais pas vous tresser mais vous coiffer justement. Il dit j’ai jamais vu une femme coiffer des hommes, donc vous n’allez pas me coiffer. Et donc en attendant que mon maître ne vienne, 3 autres sont venus je les ai tous coiffés ils sont repartis. Finalement il a été convaincu, il s’est assis, je l’ai coiffé. Il a fini par s’excuser et il est devenu est de mes meilleurs clients.

Rose, quel est le regard des hommes, de la société en général et des femmes en particulier en vous voyant faire ce métier qu’on pense être réservé aux hommes uniquement ?

La curiosité, la curiosité, tout le monde veut voir, s’approcher et voir réellement comment est-ce possible qu’une femme coiffe des hommes, et donc, c’est toujours étonnant de voir une femme coiffer des hommes, surtout lorsque je sors au dehors pour coiffer, les gens viennent en nombre pour regarder, mais c’est ma passion et j’aime ce que je fais. Je fais ce métier pour également répondre à ceux qui pensent la femme ne peut pas faire ce que fait l’homme, nous pouvons tout faire et mieux d’ailleurs s’y on s’y met véritablement.

Justement vous avez fait la démonstration devant nous en coiffant un homme, nous avons été séduite. Si on vous demandait vos difficultés dans ce métier, que répondriez-vous ?

C’est le manque de moyens, pour trouver le local qui coûte très cher, comme vous le savez à Conakry. C’est ce qui fait je n’ai pas encore pu ouvrir mon salon de coiffure ici. Mais je suis confiante, et je suis du genre déterminée et persévérante, je sais qu’un jour Dieu m’aidera.
Est-ce qu’il y a un secret, des astuces pour bien faire ce que vous faites ?
Aimer son travail c’est important, et avoir de la passion, s’engager pour ce qu’on aime et ne jamais abandonner ce qu’on aime quel que soit les obstacles que vous rencontrez.

Vous ne faites que ce que les hommes font, vous pratiquez aussi le sport qu’on appelle boule et pétanque, sacrée Rose !

Sourire…. Vous avez raison, j’aime les activités qu’on pense réservés aux hommes, mais comme je le disais, ce que l’homme fait la femme peut le faire. Pour la pétanque, j’aime beaucoup aussi, je suis même en train de coopter des femmes actuellement pour former une équipe. J’ai aimé cette activité à cause de mon papa il est médecin dentiste, il me soutient dans tout c’est mon ami et je l’aime beaucoup tout comme lui d’ailleurs. Je suivais mon papa lorsque j’étais petite, et c’est comme ça que j’ai pris goût.

Avec tout ce que vous faites qui ne ressemble pas à ce que les autres femmes font qu’est-ce que vous pensez de la famille?

Sourire…. J’ai été mariée si c’est cela la question, mon mari était un blanc et malheureusement il est décédé. J’ai 2 grandes filles, la première travaille au Ministère du commerce et la seconde a 8 ans.

Je pense que les hommes ne savent pas l’importance de la femme, surtout la Guinéenne, elle est brave. Faites-un tour dans les marchés de Matoto, de madina, du km 36 ce sont les femmes qui supportent les familles elles sont sur pied dès 4 h du matin. Les hommes, ils continuent à violenter les femmes, à les violer ou à accepter de les épouser alors que ce ne sont que des enfants qui ne sont pas préparés à la vie de couple. Il faut parler aussi des mutilations génitales féminines et le viol d’enfants.

Je veux préciser que je n’incite pas les femmes à se rebeller, à ne pas respecter leurs maris, mais je ne suis pas d’accord qu’on violente des femmes qu’on les manque le respect comme cela se passe actuellement. Pour cela je ne suis pas d’accord.

Nous sommes au mois de mars un mois dédié aux femmes, quel est le message que vous avez pour elles à cette occasion ?

Qu’elles se battent pour gagner leurs vies, tout ce que les hommes font elles peuvent le faire. Il suffit d’aimer ce qu’on fait, s’adonner, et avoir le courage de sa passion.

Nous sommes à la fin de cet entretien quel est votre mot de la fin ?
Je vous remercie beaucoup pour cette opportunité, afin de m’exprimer sur vos antennes et dans vos colonnes merci beaucoup. J’invite les femmes à se battre pour gagner leurs vies et imposer le respect sans avoir besoin de dépendre d’un homme ou de quiconque. Merci encore une fois pour cette opportunité.

Entretien réalisé par Idiatou CAMARA pout radioenvironementguinee.org

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