Conakry : une douanière jugée pour trafic international de cocaïne

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Madame Kadiatou Touré a comparu ce lundi, 18 mars 2019, devant le tribunal criminel de Dixinn (délocalisé à la mairie de Ratoma). Cette douanière, âgée d’une trentaine d’années, mariée et mère d’un enfant est poursuivie pour « trafic international de drogue », portant sur de la Cocaïne. À l’ouverture de son procès, l’accusée a plaidé coupable des faits qui lui sont reprochés, rapporte un journaliste de Guineematin.com qui a suivi cette audience.

Vêtue d’une légère robe de couleur cendre et teintée de noir, madame Kadiatou Touré est apparue, visiblement, très faible. Au cours de son audition à la barre, cette douanière a d’ailleurs demandé une chaise pour s’asseoir. «Je suis malade. Est-ce que je peux avoir une chaise pour m’asseoir ?», a-t-elle demandé quelques minutes après avoir commencé de déposer.

Une demande à laquelle le tribunal a accédé, pour la bonne continuation des débats.

Dans cette affaire, il est reproché à Madame Kadiatou Touré d’avoir dissimulé de la cocaïne dans des habits qu’elle voulait expédier à Hong Kong. «La cocaïne était dissimulée dans des boutons cousus avec du tissu Wax», a précisé le ministère public.

Une chose que l’accusée n’a pas niée. Mais, pour sa décharge, madame Kadiatou Touré a indiqué que les habits ne l’appartenaient pas. «C’est à Dakar (au Sénégal) que j’ai rencontré une femme qui s’appelle Makissa Camara. C’est une guinéenne, mais elle réside là-bas. Tout comme moi, elle vend des habits. On a un peu échangé. Je lui ai dit que moi, j’envoie certains de mes habits en Europe. Je lui ai aussi dit que je suis douanière…

J’ai acheté mes habits et je suis revenue en Guinée. Ensuite, Makissa aussi est venue avec des habits. Quand elle est arrivée à Conakry, elle m’a appelée au téléphone. Elle m’a dit de l’aider à envoyer ses habits (32 complets) à Hong Kong. Je lui ai alors dit de venir me trouver à mon lieu de travail, en ville… Nous sommes allées ensemble à l’agence. Quand les habits ont été pesés, Makissa n’avait pas l’argent nécessaire pour payer les frais d’expédition de son colis. Elle n’avait que 4.500.000 GNF.

On a divisé le colis en deux. Les agents expéditeurs ont pris le nombre de kilogrammes d’habits qui équivaut aux 4.500.000 GNF et Makissa m’a confiée le reste des habits », a expliqué madame Kadiatou Touré, tout en précisant que c’est près d’un mois après cette opération qu’elle a été informée que de la drogue a été retrouvée dans le colis qu’elle a laissé à l’agence.

«Le colis a été enregistré au nom de qui ? », demande le tribunal. Et, l’accusée de répondre: «C’est mon adresse qu’on a laissée là-bas. Mais, c’était pour aider Makissa. Comme je suis douanière et avec mes relations, je ne paie pas le même montant que les simples citoyens. Moi, je bénéficie souvent d’un rabais au niveau des frais d’expédition».

«Comment avez-vous appris que de la drogue a été retrouvée dans votre colis ?», a demandé à nouveau le juge Aboubacar Mafering Camara.
«Ce sont mes amis qui m’ont appelé pour me dire que je suis activement recherchée par le service de Thiégboro Camara(le secrétaire général à la présidence chargé des services spéciaux, de la lutte contre la drogue et le crime organisé), qui a même publié mes photos sur les réseaux sociaux.

Ils m’ont dit que c’est pour une affaire de drogue. Cela m’a beaucoup surpris. Mais, j’ai quand-même décidé de me rendre pour savoir ce qui se passe. Je me suis rendue au commandant de mon unité. Et, ce dernier m’a conduit au service de Thiégboro. Arrivée là-bas, les gendarmes m’ont dit que c’est de la cocaïne qui a été retrouvée dans mes habits que j’ai laissés à l’agence.

J’ai répondu que ces habits appartiennent à Makissa qui se trouve à Dakar. Je leur ai même donné le numéro de téléphone de Makissa. Ils ont appelée, ça a sonné, mais elle a refusé de décrocher le téléphone», a expliqué madame Kadiatou Touré tout en précisant qu’elle avait appelé Makissa Camara avant de se rendre aux services spéciaux de la lutte contre la drogue et le crime organisé.

«Je l’ai appelée pour lui dire que son colis m’a créé des problèmes. Mais, dès que je lui ai dit que de la drogue a été retrouvée dans ses habits, elle a raccroché le téléphone», a-t-elle ajouté.

Pour le ministère public (qui a passé son temps à charger l’accusée), le colis contenant de la drogue était destiné à un certain Michel James qui se trouve à Hong Kong. Et, soutient le procureur Alphadio Barry, «madame Kadiatou Touré a pris assez de risques pour Makissa Camara».

Cependant, le procureur audiencier a déploré le fait que le service de Thiégboro Camara, ainsi que le magistrat qui a instruit ce dossier, n’ont pas fourni les efforts nécessaires pour mettre la main sur MaKissa Camara.
«En ma qualité de ministère public, je dis que ce dossier devait être plus approfondi », a-t-il dit.

De son côté, l’avocat de la défense s’est contenté de démontrer l’innocence de sa cliente dans cette affaire. «L’élément matériel (la cocaïne) sur lequel s’appuie le ministère public existe bien dans cette affaire. Mais ce qui est aussi évident, c’est l’ignorance de l’accusée de l’existence de la drogue avant sa découverte.

Parce que ma cliente est allée jusqu’à proposer à Makissa de vendre le reste de ses habits ici, en Guinée. Car, c’était à l’approche de la fête de Tabaski. Après s’être rendue, c’est ma cliente qui a aussi dit aux gendarmes de venir chez elle pour voir les habits que Makissa lui avait confié », a récapitulé Me Alseny Sylla après avoir interrogé sa cliente à la barre.

Finalement, l’affaire a été renvoyée au 1er avril prochain pour la suite des débats.

Mamadou Baïlo Keïta pour Guineematin.com

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