Cellou sur les massacres du 28 septembre 2009 : « il faut qu’il y ait de la justice »

Cellou Dalein Diallo, président de l'UFDG
Cellou Dalein Diallo, président de l’UFDG

« J’étais au stade. Je suis sorti de là dans le coma. Un militaire a sorti son arme, il a tiré sur moi. Il a dit où est Dalein, où est Dalein. Mon garde du corps a pris la balle sur l’épaule. J’étais blessé à la tête, je saignais du nez, de la bouche. J’avais les cottes cassées. Je suis prêt à pardonner ; mais, il faut qu’il y ait la justice ».

Comme tous les samedis, l’union des forces démocratiques de Guinée (UFDG) a tenu, ce 28 septembre 2019, son assemblée générale hebdomadaire à son siège à la manière. Et, c’est son leader, Cellou Dalein Diallo, qui a présidé la rencontre. Une rencontre au cours de laquelle le chef de file de l’opposition guinéenne a évoqué avec beaucoup d’émotions, les crimes perpétrés le 28 septembre 2009 au stade du même nom à Conakry. Devant ses militants, Cellou Dalein Diallo a dit être prêt à pardonner. Mais, précise-t-il, il faut qu’il y ait de la justice, rapporte un journaliste de Guineematin.com qui était au siège de l’UFDG.

Au cours de cette rencontre politique de son parti, le leader de l’UFDG s’est remémoré les tristes et douloureux évènements du 28 septembre 2009 à Conakry. Tout en réclamant justice, Cellou Dalein Diallo a évoqué les atrocités qui ont été commises contre la foule qui était massée à l’enceinte du stade de Conakry, à l’appel des forces vives (partis politique, syndicat, société civile).

Cellou Dalein Diallo, président de l’UFDG

« Il y a dix ans, vous étiez massivement sortis pour aller exiger plus de démocratie, plus de liberté pour notre peuple. Beaucoup d’entre nous, arrachés à notre affection par des forces de défense et de sécurité, n’avaient pas pu rejoindre leur domicile. Ils s’étaient acharnés contre les manifestants au stade du 28 septembre. Nous avions assisté à des spectacles insoutenables. 157 morts, 100 disparus, 100 femmes violées en plein jour, dans notre capitale. Ce n’est pas facile d’oublier ça. Jusqu’à présent, malgré l’existence de deux rapports dressés par une commission mise en place par les Nations Unies, il n’y a pas eu de procès. Mais, nous devons exiger le procès, non pas pour que certains aillent en prison, mais pour notre peuple, pour que les victimes et les coupables admettent ensemble que ce sont des actes inhumains, dégradants qui ont été commis, pour que ça ne se répète pas. Parce que l’impunité encourage la récidive. Il faut que les guinéens soient d’accord que ce sont des actes répréhensibles, inhumains qui ont été commis. Et, que nul ne soit jamais fier d’avoir commis des actes de cette nature. On doit avoir honte si on a participé à ces massacres », a dit Cellou Dalein Diallo devant ses militants.

Tout en accusant le président Alpha Condé de refuser, « pour des calculs politiciens », le procès des massacres du 28 septembre, le chef de file de l’opposition guinéenne précise que la justice ne signifie pas nécessairement la prison. « Mais, lorsque des actes répréhensibles ont été commis, la justice du pays doit dire que ce sont des actes répréhensibles, prévus dans la loi. Aujourd’hui, rien ! Mais, ce n’est pas étonnant. Et, ça a continué lors de nos manifestations. De 2011 à maintenant, 104 guinéens ont été tués. A Zogota, à 01 heure du matin, les forces de l’ordre chargées d’assurer la sécurité des guinéens, investissent un district et tuent de paisibles citoyens. Et, jusqu’à présent, il n’y a pas de procès. On a violé les droits des gens à Galapaye. Ces derniers n’ont jamais pu être rétablis dans leurs droits. Il faut que la Guinée tourne ces pages de la violence d’Etat, pour qu’on avance vers la réconciliation. Et, que nous prenions conscience que nous sommes tous des frères ; et, on n’a pas le droit de violer les droits de son frère, de lui ôter la vie. Sinon, c’est toute la société qui reste de son côté, au-delà des appartenances ethniques et politiques. Ce qui s’est passé le 28 septembre, ce n’est pas une ethnie. C’est la Guinée qui a été touchée. Et, les gens sont morts, ils n’ont pas eu droit à la justice. Un viol en plein jour, au XXIème siècle, au stade », a-t-il dénoncé.

Pour sortir de ce « cycle de violence », le leader de l’UFDG soutient qu’il faut aller vers la réconciliation. « Mais, avant de tourner la page, il faut la lire. Faire en sorte qu’on distingue et qu’on discerne le bien du mal. C’est un mal de tuer un être humain. C’est un mal de garantir l’impunité à un assassin, fut-il votre frère ou votre mère… J’étais au stade. Je suis sorti de là dans le coma. Un militaire a sorti son arme, il a tiré sur moi. Il a dit où est Dalein, où est Dalein. Mon garde du corps a pris la balle sur l’épaule. J’étais blessé à la tête, je saignais du nez, de la bouche. J’avais les cottes cassées. Je suis prêt à pardonner ; mais, il faut qu’il y ait la justice. Le jeune soldat qui avait tiré sur moi, j’ai appris plus tard qu’il a été découpé vivant. Je ne me suis pas réjoui d’une mort si cruelle, infligée à un compatriote de manière extrajudiciaire. J’ai condamné l’acte. Il faut que ça s’arrête par un vrai processus de réconciliation. Des rapports ont été produits par nos religieux sur ce qu’il faut pour aller à la réconciliation… Ils sont mis dans les tiroirs. Les tiroirs de monsieur Alpha Condé. Rien n’a été mis en œuvre. Or, les guinéens ont besoin de réapprendre à vivre ensemble dans la fraternité, la tolérance, la solidarité. L’UFDG au pouvoir, le fera », a déclaré Cellou Dalein Diallo.

Mamadou Baïlo Keïta pour Guineematin.com

Tél. : 622 97 27 22

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