3ème mandat en Guinée : le sens interdit en démocratie

VOX POPULI

Docteur Abdoulaye Bah, Professeur d’Université aux États Unis

La cascade de déclarations et commentaires de certains de nos compatriotes faisant semblant que le débat qui a conduit à la crise actuelle en Guinée (autour d’une nouvelle constitution) est une question de souveraineté est d’une malhonnêteté intellectuelle sans précèdent dans l’histoire du pays. Les défenseurs de ce « mouvement dit authentique et souverain », à travers les ondes et sur d’autres plateformes de diffusion des nouvelles utilisent des citations qui sont pour le moins amusantes ! Ils me rappellent mon professeur de Français en 7eme année au collège de Coléah, qui nous a appris que Voltaire assis sur Racine Boileau de la Fontaine. Toutes leurs références sont de citer des philosophes étrangers (Européens) pour justifier leurs positions. Aucune mention de Kankou Moussa, de la charte de Kouroukan Fouga, du Waliou de Gomba, de Karamoko Alpha Mo Labé, de Nzegbela Togba Pivi, j’en passe. Par manque d’arguments valides, ils cherchent à transformer le débat et les revendications des Guinéennes et Guinéens en une question “tribale”.  Mais comme l’a si bien dit le Professeur Lansine Kaba : « Ne nous trompons pas…. la question est d’ordre politique plutôt qu’ethnique ».

Certains individus qui ont la voix haute et le ton élevé sont en train d’envahir les ondes des radios et les réseaux sociaux avec de fausses informations, basées sur leurs opinions. Ils parlent de ce que le « peuple » veut, sans preuve. Pourtant, les Guinéens ont fait connaître leur sentiment vis à vis du respect de la limitation des mandats, y compris les partisans du gouvernement actuel (voir ci-dessous). Selon le résultat de ce sondage, quatre-vingt-deux pour cent (82%) de Guinéens supportent la limitation des mandats présidentiels à deux, y compris 70% des membres du RPG.

Aujourd’hui, notre pays est gouverné par une élite qui a élevé l’incompétence comme critère fondamental et requis pour la participation à la gestion des affaires du pays. Toute dénonciation de cet état de fait est considérée comme un délit, voire un crime. Certains défenseurs de la situation actuelle utilisent un « litmus test » pour justifier le « status quo » (si la personne au pouvoir est de leur ethnie/région cela suffit). Ils s’attaquent généralement à toute personne opposée à la révision constitutionnelle sur le simple fait que leur patronyme indique une appartenance différente. Cette politisation de l’ethnicité est le résultat de l’action de quelques politiciens/entrepreneurs qui l’utilisent comme un raccourci pour leur enrichissement illicite sur le dos de notre peuple.

C’est là que se trouve, en partie, le danger potentiel pour la Guinée. Cette simplification « du débat sur une base souvent ethno-politique est en train de cimenter les fondations d’une culture de médiocrité et d’impunité dont le pays aura du mal à se relever. L’implication de la culture de médiocrité est qu’elle détourne des résultats qui comptent pour la Nation et occupe les citoyens dans des combats futiles pour la victoire de leurs parents ».

Les efforts consacrés à défendre les échecs de nos gouvernants successifs et du gouvernement actuel au nom de la souveraineté nationale ou de l’image de notre pays se font au détriment de nos parents et concitoyens qui ne bénéficient pas de nos ressources nationales. Par exemple, Rusal vient de s’engager à investir $200 000 000.00 de dollars dans la construction d’une usine d’aluminium aux États Unis pour transformer en partie la bauxite guinéenne.

Malgré toutes les pérégrinations faisant croire que notre pays marche, « le signe infaillible de son image dépend du climat social qui y règne. Le monde entier en a connaissance ». Nous tuons nos propres enfants en plein jour.  « Il est temps et grand temps que nos « intellectuels », toutes ethnies confondues, commencent à débattre des idées au lieu de défendre la faillite de nos gouvernants passés et actuels ».

Le FNDC n’est pas un masque pour quelque politicien que ce soit ! Abdourahmane Sano et ses collègues sont des patriotes qui ont une vision d’une Guinée à laquelle nous devons tous aspirer. Un pays dirigé par des individus intègres, compétents et patriotes. Pour une Guinée unie et prospère, nous devons tous soutenir un dialogue qui nous évitera de continuer à avoir des cliques alternantes qui s’accaparent de nos ressources communes. Cherchons à mettre plus d’ingéniosité, d’efforts et de ressources dans la création  des institutions démocratiques qui nous permettront d’édifier un régime constitutionnel permanent au bénéfice de tout le peuple de Guinée.

Docteur Abdoulaye Bah
Professeur d’Université aux États Unis
Ancien chef du Département des sciences sociales et comportementales
Directeur, Centre pour la santé comportementale et la résilience
Université de Lincoln
Jefferson City, Missouri USA

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